Dans le cantou, la grande cheminée, une marmite en fonte noire reste en permanence au-dessus du feu. A n'importe quelle heure, il est possible d'avaler un bol de soupe. Ici, à 1.350 m d'altitude, La Tuillière se distingue des autres auberges, dans tous les domaines. Pas d'eau courante : elle est acheminée par ci-ternes en été et fournie par la neige en hiver ; pas d'électricité, mais des lampes à pétrole et un groupe électrogène, utilisé seulement pour faire les lessives. "C'est une question d'organisation. Nous ne faisons les repas que sur réservations, parce qu'il faut prévoir le ravitaillement", souligne Roselyne Misko. Avec Alain, son mari, et leurs deux enfants, elle s'est installée à La Tuillière il y a quatre ans. La famille habite là à l'année et pas seulement pendant les périodes estivales. Loin de tou-tes routes goudronnées, l'auberge de La Tuillière se trouve sur un sentier de grande randonnées. Donc sa clientèle se compose de randonneurs, vététistes, cavaliers et de skieurs de fond. L'ancienne grange a d'ailleurs été transformée en gîte avec quinze lits, à 20 F la nuit par personne. Mais, ce n'est pas tout. Des clients viennent exprès des environs pour déjeuner, surtout les dimanches. Ils n'hésitent pas à franchir les six kilomètres du chemin de terre battue, plein de nid-de-poule et de bosses, qui mène d'une départementale à l'auberge, pour s'installer sur un banc autour de la grande table couverte d'une toile cirée de la pièce principale ou bien dans l'ancien four banal attenant, transformé autrefois en buron et devenu salle d'auberge.
Authenticité et ambiance
Au menu, des spécialités locales (Pounti, Tripoux, Choux farcis, etc.) pour 85 F, ou
bien : jambon de pays, omelette, fromage et crêpes pour 65 F, sans parler des
casse-croûte et du petit déjeuner. En boissons, sodas sirops, café, thé comme dans
tous les restaurants. En vin, un choix unique : Saint-Saturnin de l'Hérault. "Le
brasseur nous le livre par barrique de 120 litres, avec les autres boissons",
explique Alain Misko. Le tout est conservé au frais à la cave... parce qu'il n'y a pas
de réfrigérateur bien sûr. Authenticité du cadre et du contenu de l'assiette,
originalité des lieux et ambiance hors du temps expliquent le succès d'une formule
impensable en théorie. "Le bouche à oreille, petit à petit, nous fait
connaître", explique Roselyne Misko. "Ici, c'était un hameau situé sur
la route des crêtes. Cette bâtisse du XVIIème, avec ses murs de deux mètres
d'épaisseur, a toujours été une auberge", raconte Alain Misko. "Elle
était fermée depuis deux ans quand nous l'avons achetée et nos prédécesseurs
n'étaient pas ouverts toute l'anné", poursuit son épouse. "Nous
rêvions de nous installer dans un endroit à l'écart", ajoute Roselyne qui
travaillait dans le milieu médical tandis que son mari était chauffeur routier. Ils ont
alors tout laissé tomber. Elle a appris la cuisine traditionnelle "toute seule,
à droite à gauche." Lui s'occupe de la plonge.
Tout en reconnaissant que leurs activités leur permettent de vivre, ils les complètent
malgré tout avec un potager et un peu d'élevage pour leur consommation personnelle.
|
|
|
|
|
L'HÔTELLERIE n° 2578 Magazine 10 Septembre 1998