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Evian

Du palace au complexe de loisirs international

Il a fallu vingt ans pour qu'Evian renoue avec le succès et le prestige, après un long déclin que les deux guerres mondiales avaient accentué. Aujourd'hui, grâce au dynamisme et à l'expansion continue du Domaine du Royal Club d'Evian, c'est un des plus beaux complexes de loisirs d'Europe. La station thermale située aux confins de la France et de la Suisse n'est plus seulement un casino et un golf.

Par Claude Bannières

Déjà au cours des années soixante-dix, la Société des Eaux d'Evian, propriétaire d'un ancien casino de style mauresque et d'un superbe terrain de golf de 18 trous de 6 030 m (par 72) sur dix-sept hectares, avait commencé à moderniser son palace début de siècle qu'elle n'avait pu vendre en appartements comme tant d'hôtels de la station l'avaient été. Le directeur de l'époque, Robert Lassalle, avait conçu tout un programme d'animations, de loisirs et de détente afin d'ouvrir l'établissement dix mois par an au lieu de trois.
Le rachat de l'ensemble par le groupe BSN, aujourd'hui Danone, allait donner une accélération spectaculaire à l'embellissement de cet hôtel amiral dominant le Léman et à la diversité des activités dites périphériques.

La "danseuse" d'Antoine

Il est vrai qu'Antoine Riboud s'était pris de passion pour cette "danseuse" qui le changeait de ses entreprises gigantesques devenues un des principaux groupes agroalimentaires de l'ouest et de l'est européens. Appliquant avec son équipe des méthodes de management et de commercialisation qu'ils avaient expérimentées avec efficacité et succès dans les autres branches de sa multinationale, il n'eut de cesse de développer ce complexe sans trop en altérer l'image de luxe, d'exception et de tranquillité cossue.
Ces dernières années, précise Roger Mercier, directeur général de la SEAT, "notre produit global a évolué sans cesse pour répondre aux attentes de la clientèle et, dans la mesure du possible, à anticiper ses attentes."

Un chantier permanent

Chaque année, durant la fermeture hivernale, et par tranches successives de dix millions, des travaux ont permis de refaire complètement le Royal, étage par étage ; d'agrandir les piscines intérieure et extérieure ; de doter l'institut "Mieux vivre" d'équipements récents et sophistiqués ; de réaménager complètement le club-house du golf ; de transformer radicalement les salles de jeux et l'espace congrès ; de multiplier les activités et les spectacles ; de hisser ses différents restaurants parmi les meilleures tables de la Haute-Savoie : l'ensemble gastronomique ou diététique, placé sous la houlette de Michel Lentz.
En 1988, nouvelle accélération : la Société d'exploitation d'activités touristiques (SEAT) qui coiffe le domaine reprend l'Ermitage - un autre bel hôtel du début du siècle que la commune avait transformé en hôpital de 1950 à 1987 - qu'elle complète avec un bâtiment doté de tous les aménagements souhaitables pour des séminaires et des congrès de cent à six cents personnes : plus de cent millions de travaux. Depuis, ce "tourisme d'affaires" marche si fort, surtout sur le plan international à cause de la proximité de Genève et de Cointrin, que la direction a dû instaurer des quotas pour ne pas importuner les particuliers, explique Alain Spieser, porte-parole du Domaine.

"La Grange au lac"

Par ailleurs, Antoine Riboud, qui s'était littéralement entiché de Mstislav Rostropovitch, transforma le festival des "Jeunes musiciens sans frontières" qu'avait créé Serge Zehnacker en festival de stars internationales : "Les Rencontres musicales d'Evian". Et pour accueillir ces concerts prestigieux, fit construire un superbe auditorium en bois de 1 200 places dans le style des datchas cher à Slava, en pleine forêt, à deux pas de l'Ermitage et du Royal : "La Grange au lac". Afin d'attirer une clientèle encore plus large sans léser les activités haut de gamme, la SEAT a agrandi le casino que dirige désormais Patrice Caillaux en portant les bandits manchots à deux cent cinquante ; transformé le cabaret aux spectacles coûteux en discothèque ; lancé à côté de la prestigieuse Toque Royale (un macaron au Michelin), le Jardin des Lys et, surtout, Le Liberté, bar-restaurant avec soirées à thème, retransmissions de matchs, karaoké : onze restaurants au total, de styles différents. Le tout en reprenant les façades donnant sur la croisette avec force néons, lasers, murs d'image, etc. Ce n'est pas encore Las Vegas, mais devant cette avancée moderniste, le Domaine du Royal Club d'Evian rappelle qu'ils ont réalisé une somptueuse suite baptisée Edouard VII, puisque le prince de Galles fut, dès 1907, un des clients titrés et attitrés du Royal : un salon, deux chambres, deux salles de bains, une salle de gym, une terrasse panoramique donnant sur le lac et Lausanne.
Si le Domaine accueille moins de têtes couronnées et de princes qu'avant la grande guerre, les grands de la finance, de la politique, du jet set et du showbiz ne manquent pas : "Nous garantissons une totale discrétion à nos clients qui viennent goûter la tranquillité du Domaine", dit encore Alain Spieser.

Paré pour l'offensive helvétique

Ainsi, le chiffre d'affaires de l'hôtellerie seule dépasse 130 millions avec des taux d'occupation de 65 à 69 %, de quoi faire pâlir les autres palaces de France : il était temps. Avec l'ouverture du casino d'Annemasse passé en deux ans de la 117e place à la 13e du classement français, le casino d'Evian a accusé un recul de 9 %, avec près de 200 millions de CA toutefois.
Cela dit, Evian et son Domaine sont parés pour la prochaine offensive : la concurrence de salles de jeux suisses dont l'ouverture a été décidée par le gouvernement confédéral mais dont les décrets d'application tardent à paraître.

Pastor

L'Hôtel Royal dans ses nouveaux atouts et, au second plan, L'Ermitage et son centre de congrès.


Le Jardin des Lys, autre nouveau restaurant de 40 places dans un jardin exotique.


Décoration très transatlantique du bar du nouveau restaurant Le Liberté.

Cioffi

Le restaurant Le Liberté au Casino Royal, 200 places à l'intérieur et en terrasse.


L'HÔTELLERIE n° 2599 Magazine 4 Février 1999

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