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La Boulangerie Kayser

Tout au levain naturel liquide

Eric Kayser, boulanger installé rue Monge à Paris depuis septembre 1996, a su rapidement conquérir consommateurs et restaurateurs. La raison de ce succès ? Un pain savoureux, moelleux et craquant à la fois. Un pain fabriqué au levain naturel liquide avec des farines sélectionnées.

Par Bernadette Gutel


La Maison Kayser a ouvert deux boutiques à Paris. La Boulangerie « bio » située à côté de la boulangerie
traditionnelle séduit de nombreux clients.

Eric Kayser, compagnon du Devoir du Tour de France, a enseigné la fabrication du pain pendant une dizaine d'années à l'Institut national de la boulangerie-pâtisserie (INBP) avant d'ouvrir une boulangerie avec son épouse Laurence. Entre temps, Eric Kayser a travaillé avec la société Electrolux Baker pour mettre au point un appareil fort utile pour les boulangers qui travaillent au levain naturel, c'est-à-dire du levain obtenu à partir de farine fermentée par ses propres micro-organismes. Cet appareil appelé Fermentolevain a d'ailleurs reçu le prix de l'innovation au Salon Europain 1994. Il permet de fabriquer dans de bonnes conditions du levain naturel liquide. « Cet appareil, explique Eric Kayser, simplifie le travail des boulangers qui utilisent du levain naturel. En effet, travailler au levain naturel est délicat : il faut préparer son levain la veille et bien le surveiller. Sinon, il est soit trop acide, soit pas assez. Le Fermentolevain est un appareil destiné à la fabrication non pas de levain pâteux mais de levain liquide. Il permet de parfaitement maîtriser tous les paramètres de fabrication du levain liquide : température, hydratation, oxygénation, vitesse de brassage... Ainsi le boulanger n'est plus soumis aux aléas climatiques. Cette technologie lui permet de travailler à l'ancienne dans de bien meilleures conditions. Fabriqué la veille, le levain liquide permet ainsi aux boulangers de ne commencer leur tavail qu'à 5 heures du matin» . Il existe des fermenteurs à levain depuis plus d'un siècle. Mais ces appareils peu performants et pas automatisés n'étaient jusqu'alors guère utilisés par les boulangers. Les pâtes fabriquées avec du levain liquide sont un peu plus difficiles à manipuler parce qu'elles sont molles mais en contrepartie la qualité du pain obtenu est nettement meilleure qu'avec du levain naturel en pâte : qualité constante, plus savoureux, meilleure tenue à la cuisson et bonne conservation.

Du pain riche en saveurs

En effet, l'utilisation du levain naturel liquide permet de parfaitement maîtriser l'acidité du pain. Au cours de la fermentation, il se produit de l'acide acétique et de l'acide lactique. L'équilibre entre ces deux acides dépend de la température et du taux d'hydratation. A 22/25 °C et dans un milieu peu humide comme le levain en pâte, c'est l'acide acétique qui l'emporte et qui donne au pain un goût de vinaigre peu agréable. A 12/15 °C et dans un milieu plutôt liquide, c'est l'acide lactique qui domine. Cet acide donne au pain un goût très doux, un goût de lait, de viennoiserie. « Une trop forte acidité, explique Laurence Kayser, masque les autres saveurs du pain. C'est pour obtenir des pains riches en goûts que nous avons choisi de travailler avec du levain naturel liquide. J'ai demandé à un œnologue de renom de goûter nos pains comme il goûte les vins. Il a trouvé des arômes de raisin, de noix, de genêt, de miel... On ne pense pas à tout cela quand on fabrique et que l'on vend du pain. Dans les grands restaurants, le sommelier conseille des vins en fonction des plats choisis, pourquoi ne pourrait-on pas conseiller des pains en fonction des plats ? Sans tomber dans l'excès, bien sûr. »

Temps de fabrication du pain : 13 à 14 heures

Il y a des boulangers qui fabriquent du pain en 4 heures. Bien sûr, ce pain ressemble plus à une éponge qu'à du pain. Et, il est rassis au bout de 2 heures. Eric Kayser, lui, prend tout le temps nécessaire pour faire son pain. Entre le moment où il pétrit sa pâte et l'instant où le pain sort du four, il s'est écoulé entre 13 et 14 heures. « Je pétris ma pâte avec le levain liquide peu de temps pour que la mie soit de couleur crème et riche en arômes. Quand on pétrit trop longtemps, on gagne en volume, donc en prix de revient, mais on obtient un pain léger, blanc et insipide. Ensuite, je laisse « pointer » dans le pétrin (autrement dit « fermenter ») au moins une heure à température ambiante. Je divise la pâte et la façonne à la main. » Les pâtons ainsi préparés sont placés dans une chambre de pousse à 10 °C où ils vont fermenter lentement pendant une dizaine d'heures. Cette deuxième fermentation est très importante. Elle est à l'origine de beaucoup d'arômes et d'une mie alvéolée sans excès et de façon irrégulière. Car le levain travaille ainsi tout doucement. La cuisson est réalisée dans un four à sole constitué de briques très épaisses qui conduisent bien la chaleur. Une condition importante pour obtenir une croûte bien craquante et de belle couleur jaune-marron.

Les fermenteurs à levain

Ce concept n'est pas nouveau. Plus de 43 brevets ont déjà été déposés entre 1881 et 1914. Le système Arnal a même reçu le premier prix à l'exposition internationale de boulangerie en 1907. Les fermenteurs à levain du XXIe siècle entièrement automatiques font des émules partout dans le monde. Ainsi, plus de 600 Fermentolevain, fementeur mis au point par Eric Kayser et la société Elextrolux Baking sont installés dans le monde. Il permet de fabriquer 120 kg de levain liquide utilisable en 6 à 8 heures.

Des farines sélectionnées

Un des autres secrets de fabrication d'Eric Kayser est l'assemblage des farines. Il sélectionne les farines et compose des assemblages précis, notamment entre la farine issue du blé Camp Rémi, un blé à amande jaune et crémeuse et la farine issue du blé Soissons. « Je demande à mes meuniers, précise Eric Kayser, de garder ces farines au moins trois semaines en silo avant de les livrer afin qu'elles « prennent du plancher » autrement dit qu'elles soient plus faciles à travailler. Une farine pétrie aussitôt après la mouture du blé se « relâche », elle ne s'hydrate pas bien et ne prend pas une bonne force au moment du pétrissage. Ça, c'est un service que me rendent mes fournisseurs de farine. » Pour faire ses assemblages, Eric Kayser se base sur les résultats des essais de panification que lui transmettent ses meuniers. Eric Kayser fabrique aussi du pain « bio ». « Nous avons, précise Laurence Kayser, ouvert une seconde boulangerie pour fabriquer et vendre ce pain. Ce pain « bio » est de 20 à 30 % plus cher car la farine et les coûts de main-d'œuvre sont plus élevés. Mais, encore plus savoureux et plus typé, il plaît beaucoup à nos clients. »

Formation et conseils

Aujourd'hui, la clientèle de la Boulangerie Kayser se compose de 80 % de particuliers et de 20 % de restaurateurs.
« Notre personnel de vente, explique Laurence Kayser, est bien formé. Il sait décrire le goût des divers pains et conseiller ces pains en fonction des mets. On n'est pas juste là pour vendre des baguettes. » Effectivement, en plus de fabriquer son pain, Eric Kayserdonne des conseils aux boulangers ou aux restaurateurs qui veulent en savoir plus sur la fabrication du bon pain. En France et dans tous les autres pays du monde.


Un des points clés de la bonne qualité du pain Kayser : le levain naturel liquide. Ce levain est fabriqué et stocké dans le Fermentolevain, un appareil mis au point par Eric Kayser et Electrolux Baker.


Chez Kayser, le pain est façonné à la main.

 

Il y a levain et levain naturel

En boulangerie, on peut utiliser trois grands types de levain :
w Le levain naturel est obtenu par fermentation de la farine par ses propres micro-organismes après ajout d'eau, de sel et éventuellement de jus de pomme et sans ajout de levure. Le pain au levain naturel est riche en goût, sa mie est souple et bien alvéolée.
w Le levain levure ou « poolish » ou « sponge » est fabriqué sur la base d'une pâte fermentée ensemencée avec de la levure boulangère. Il permet de réaliser un pain de bonne qualité. Dans ce cas, le pain n'a plus le droit à l'appellation « pain au levain ».
w Le levain « starter » est obtenu à partir de « starter » qui sont des micro-organismes sélectionnés et cultivés en industrie que l'on appelle des « souches ».

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Quelques pains de la Boulangerie Kayser

Les Monges : baguette, bâtard, gâche, petit pain individuel
Composition
* Farine de froment et levain naturel.
Dégustation
* Craquantes et alvéolées.
* Impression de fraîcheur, mâche élastique.
* Longue saveur en bouche, goût de céréales chaudes, odeur de moissons.
Associations
* Convient à tous les plats.


La Baguette Monge

Les Palines : baguette, boule, rustique, petit pain individuel
Composition
* Farine de sarrasin et de froment, levain naturel.
Dégustation
* Couleur chaude et mie grise.
* Odeurs de fruits secs ; noisettes torréfiées, gousse de vanille, raisins de Nhoa séchés, amandes fraîches écrasées, vieux miel. Le goût tapisse complètement le palais et la langue. Grande longueur en bouche.
Associations
* Délicieux avec le poison grillé, le fromage.


Le Petit pain individuel Paline

La Tourte : gros pain de 1,8 kg
Composition
* Farine écrasée à la meule de pierre, levain naturel, sel de Guérande.
Dégustation
* Sensation de fraîcheur, odeur de vieux miel et de genêts. Belle longueur en bouche.
Associations
* Agneau de lait, foie gras et autres mets raffinés.
Conservation
* Une semaine bien enveloppée dans un sac en tissu.

 


La Tourte

Le seigle
Composition
* 80% de seigle et levain naturel.
Dégustation
* Se mange comme un gâteau.
* Aspect compact.
* Odeurs d'épices chaudes d'Orient, sève de pin, miel, réglisse et anis.
* Tendre et moelleux, mie fondante, longueur en bouche très subtile. Laisse un goût final de châtaignes et de noisettes.
Associations
* Subtil avec du vieux comté, du miel ou de la confiture.


Le Seigle

Les Pains individuels
* Aux raisins, aux pruneaux, à l'abricot, à l'orange. A proposer sur votre buffet petit-déjeuner ou à l'heure du thé.


L'HÔTELLERIE n° 2599 Magazine 4 Février 1999

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