Le souffle du Michelin
ressemble au vent des Pyrénées, tantôt chaud, tantôt glacé. Installé à l'ombre du
massif, face au marché central de Tarbes, Daniel Labarrère a les pieds sur terre. Il ne
craint pas les écarts de température, il fait confiance aux éléments. "L'étoile
est un concours. Les gens du Michelin ont leurs raisons, il faut rester humble",
explique-t-il, heureux d'avoir réussi le pari qu'il s'était fixé avec son équipe :
retrouver l'étoile reçue en 1975 et retirée en 1997. "Je n'ai pas vécu le
retrait de l'étoile comme une brimade, mais comme un challenge qui nous a beaucoup
stimulés." Contrairement à la première fois, le macaron ne lui fait pas
l'effet d'un coup de massue. "En 1995, je ne savais pas ce que c'était, et je ne
m'y attendais absolument pas. J'avais déjà beaucoup de monde. L'étoile a fait venir des
gens de l'extérieur, mais j'ai perdu en clientèle locale alors que nous n'avions rien
changé, ni la cuisine, ni les prix. L'étoile avait fait peur à certains de mes clients.
Elle n'a donc pas eu beaucoup d'incidence sur le chiffre d'affaires du restaurant. Et
quand je l'ai perdue, ça n'a pas non plus beaucoup joué."
Il faut reconnaître que l'Ambroisie n'a pas la place de contenir plus de 7 tables, soit
25 couverts. Réputation aidant, le lieu est souvent complet (6 fois sur 10), avec une
moyenne de 35 repas servis par jour. Daniel Labarrère en a pris possession il y a sept
ans. C'était un petit restaurant sans prétention comme il y en a tant autour des
marchés de France.
Mlle Victor ne le perd pas de vue
C'est justement cette situation qui a décidé le restaurateur. Car ce marché de Tarbes
est un peu le sien : il y venait enfant, avec son grand-père, pour y vendre des fleurs et
des légumes. Le jardin du grand-père, réfugié espagnol, faisait vivre la famille.
"Les racines sont plus fortes que le reste. On y revient toujours",
explique André Labarrère. Son itinéraire ? L'école hôtelière de Tarbes, avec des
professeurs qui lui ont transmis l'amour du métier et une directrice, Mlle Victor,
aujour-
d'hui retraitée, qui garde toujours un il sur son petit monde.
Ensuite : Chez Maxim's à Orly, le Relais de La Poste à Paris et quelques maisons dont le
château de Laraldia (Villefranque), avant de prendre une petite gérance dans le Gers, le
Lac du Saut du Loup, puis d'acheter l'hôtel-restaurant La Terrasse à Layrac (47), qu'il
a tenu pendant une douzaine d'années avant de retrouver Tarbes. Parmi ses modèles : M.
Escassu, Michel Trama (Puymirol), Michel Guérard, Christian Parra (Urt). La cuisine de
Daniel Labarrère est une cuisine d'inspiration, une cuisine du moment. Il a d'ailleurs un
menu surprise que ses clients prennent les yeux fermés, sans savoir ce qu'ils auront dans
l'assiette. "Je suis mon instinct et les produits de saison. Si le Bon Dieu a fait
des saisons, c'est pour qu'on les respecte. L'identité et la sensibilité des produits
font le reste. Je déteste l'hypocrisie. La question n'est pas de savoir s'il y a de bons
ou de mauvais cuisiniers. Elle est de se dire qu'il n'y a qu'une seule cuisine, la cuisine
du cur. Et celle-là, elle est toujours réussie", conclut Daniel
Labarrère qui devrait quitter son restaurant actuel en septembre prochain pour
s'installer dans le presbytère de la cathédrale de Tarbes, une superbe demeure que les
prêtres abandonnent. n
L'Ambroisie
38 rue Larrey
65000 Tarbes
Tél. : 05 62 93 09 34
Fax : 05 62 93 09 24
"Il n'y a qu'une seule cuisine, la cuisine du cur. Et celle-là, elle
est toujours réussie."
Parlons chiffresInvestissements 900 kF Nombre de places 25 Nombre de couverts servis par jour 35 Chiffres d'affaires annuel 1,50 MF Effectif 5 personnes Prix moyen Menus |
L'HÔTELLERIE n° 2612 Magazine 6 Mai 1999