m Olivier Lacour
Après un apprentissage près de la frontière suisse et des débuts professionnels effectués dans dix-huit restaurants, de Lausanne (L'Hermitage) à Bâle (Stucki), il a déniché l'écrin tant recherché à Rixheim, dans la banlieue de Mulhouse : une maison de maître sur 1 080 m2 habitables, rachetée dans un piteux état pour 2,4 millions de francs. L'éclat redonné au Manoir impressionne tant par la qualité des matériaux mis en uvre (boiseries, cristaux) que par la sobriété de la décoration. "Nous n'avions plus d'argent pour acheter des tableaux. Alors, un ami peintre et galeriste nous a prêté quelques uvres", s'excuse Eric Runser. L'investissement consenti pour l'aménagement du restaurant ferait, il est vrai, pâlir plus d'un professionnel aguerri : 6,2 millions de francs, dont un tiers pour le seul équipement de la cuisine. "Pour amortir l'enveloppe de départ, nous devions servir au minimum 25 couverts quotidiens", calcule Eric Runser. L'obtention de la première étoile Michelin six mois après l'ouverture du restaurant lui apporte un sérieux coup de pouce. "Nous servons déjà 70 couverts par jour", annonce le propriétaire des lieux. L'obtention rapide du macaron au Manoir a surpris les milieux de la restauration alsacienne.
La truffe fait recette
Eric Runser reconnaît d'ailleurs modestement que certains détails du service sont encore
en rodage. Côté cuisine, en revanche, le jeune chef (29 ans) exprime déjà une forte
personnalité, marquée notamment par une inspiration provençale. "Nous avons
passé quelques années autour de Saint-Maximin, d'où j'ai rapporté un grand intérêt
pour la truffe", raconte t-il. La réputation du Manoir n'a pas tardé à
s'établir autour de ce mets précieux : le menu aux truffes blanches ou noires, en
fonction de la saison, représente déjà 60 % des ventes. Les accents méditerranéens se
retrouvent aussi dans le menu Saga de la marée, élaboré chaque jour en fonction des
arrivages. Une troisième formule dite du Grand Gourmet sert de cadre aux tests des
recettes élaborées toutes les six semaines par Eric Runser : les plats à succès, tel
le Gratin de saint-jacques façon baeckeoffa à la tombée d'épinards et à la mimolette,
ont une chance de se retrouver ensuite à la carte. Côté vins, le Manoir, parti d'un
stock inexistant en septembre dernier, affiche désormais 135 références et s'appuie sur
une cave de plus de 5 000 bouteilles. Une sélection de "vins d'ailleurs"
(Chili, Portugal) côtoie un riche éventail de vins français sur lesquels Eric Runser
s'interdit de pratiquer des tarifs prohibitifs : "Des coefficients de 1,6 sur le
haut de gamme à 3 sur les prix d'appel assurent la meilleure rotation des produits."
Le macaron confortera l'assise encore fraîche de l'établissement. Eric Runser n'envisage
pas pour autant d'accélérer son projet de création d'une terrasse à l'arrière de la
bâtisse, prévu à une échéance de six ans. "Attendons de connaître notre
potentiel", calcule-t-il sagement. Pendant quelques années encore, les clients
devront se contenter d'admirer le parc arboré fraîchement aménagé autour du Manoir. Et
de l'utiliser comme parking disgracieux. n
Le Manoir
65, avenue du général de Gaulle
68170 Rixheim
Tél. : 03 89 31 88 88
Fax : 03 89 31 88 89
Eric et Michèle Runser de retour au pays.
Parlons chiffresInvestissements Nombre de couverts 52 Prix moyen Menus Prix menus Effectif |
L'HÔTELLERIE n° 2612 Magazine 6 Mai 1999