m Cécile Junod, Photos X. Testelin
Application quotidienne
courante, voire banale, l'éclairage est pourtant un domaine sensible, subjectif,
déterminant pour notre bien-être et notre plaisir. "Au cours des vingt
dernières années, de considérables évolutions en matière d'éclairage ont eu lieu,
explique Philippe Michel, architecte et éclairagiste. Aujourd'hui l'offre produits
étant très importante, il est possible de réaliser d'innombrables combinaisons et ainsi
d'obtenir des résultats très différents, tant sur le plan ergonomique qu'esthétique.
Il n'existe pas de solution type. Chaque cas s'étudie spécifiquement. Déterminant pour
la décoration, l'éclairage permet par exemple de valoriser des matériaux même
basiques, de structurer un espace ou de compenser certains défauts architecturaux. La
lumière est un élément décoratif à part entière qu'il faut adapter à chaque espace."
Le bon éclairage d'un lieu nécessite la prise en compte de plusieurs facteurs très
différents, mais parfaitement complémentaires. Le premier et non des moindres correspond
au confort visuel et à la satisfaction de l'utilisateur. L'éclairage doit répondre à
ses attentes, ses besoins et à la tâche qu'il effectue. Son confort et sa productivité
en dépendent.
En second temps, il est nécessaire de bien appréhender le volume à éclairer et l'effet
lumineux recherché : calme, sérénité, assiduité, convivialité, etc. On n'éclaire
pas de la même façon un tableau de classe, une vitrine, un hall d'hôtel qu'un étalage
de fruits et légumes. Des effets très différents sont obtenus selon les ampoules
utilisées.
Cependant, quel que soit l'espace à traiter, trois critères sont à prendre en
considération pour le choix des lampes : la "température de couleur" (Tc),
"l'indice de rendu des couleurs" (IRC) et "l'efficacité lumineuse"
(voir glossaire p.94).
Plus la température de couleur est élevée, plus la lumière est froide donc riche en
teinte bleue, et inversement. Plus elle est basse, plus elle est chaude et donc riche en
rouge. Ainsi, pour créer des ambiances chaleureuses, on optera de préférence pour des
ampoules dont la température de couleur est plutôt basse.
En ce qui concerne l'IRC, on le choisira en fonction des applications et de la qualité
recherchée. Par exemple, dans un musée, il est indispensable que l'appréciation des
couleurs soit aussi exacte que possible. On utilisera donc des lampes dont l'IRC est
voisin de 95. Il en est de même pour les salles de bains. En revanche, dans les bureaux,
un IRC de 85 suffit.
C'est donc en jouant sur les températures de couleur et les indices de rendu de couleurs
que l'éclairagiste anime et transforme un espace. Les caractéristiques des différentes
lampes disponibles sur le marché sont si variées qu'elles permettent de répondre aux
exigences de chaque type d'espace.
Au restaurant
Pour les restaurants, impossible de dégager des recettes stéréotypées. Plusieurs
paramètres doivent être étudiés : prestation, décor, environnement, nombre de
couverts, etc. Cependant, selon les trois grands types de restauration, on peut dégager
trois principales solutions d'éclairage.
Les restaurants haut de gamme privilégient les ambiances chaudes et intimistes. Des
lampes à incandescence (souvent des halogènes), en indirect, avec une température de
couleur de l'ordre de 2 900 K, procurent une lumière douce, propice aux atmosphères
feutrées. Un éclairage indirect réalisé avec des lampes halogènes et des ampoules
très basse tension (TBT) participera à l'intimité du lieu tout en soulignant les
volumes et l'architecture générale.
Dans les restaurants traditionnels, coexistent souvent deux modes d'éclairage : d'une
part un éclairage général en fluorescence (lampes fluocompactes), d'autre part un
éclairage localisé utilisant des appliques halogènes ou des spots équipés de lampes
TBT. Ces spots encastrés et orientables sont dirigés vers les tables et murs, en
éclairage d'accentuation. L'utilisation de teintes chaudes personnalisera l'espace tout
en flattant le client et le contenu de l'assiette.
La restauration rapide, pour sa part, fait appel à un éclairage général fonctionnel,
réalisé à l'aide de lampes fluorescentes, souvent des fluocompactes. Ce type
d'éclairage assure le guidage des clients, garantit un bon niveau d'éclairement (400 lux
au niveau des tables) et met en valeur les éléments décoratifs ainsi que la
présentation des produits.
Quoi qu'il en soit, l'éclairage d'un restaurant doit être compris comme un outil de
vente et, en conséquence, répondre à certaines exigences. La lumière doit être
flatteuse pour la clientèle et mettre en valeur de façon attrayante les tables et les
plats servis. Enfin, elle doit s'harmoniser avec l'architecture de la salle et le
mobilier.
Les autres espaces
Dans les salles de séminaires, l'éclairage ne joue pas seulement sur les performances
visuelles, il peut également améliorer significativement la concentration et la
mémorisation. Aussi un bon éclairage doit-il fournir la qualité de lumière nécessaire
à la tâche exercée mais aussi maîtriser le flux lumineux, c'est-à-dire prendre en
considération les préoccupations ergonomiques liées à l'éblouissement, la
répartition des éclairements et les multiples effets de la lumière. Les dernières
technologies ont permis de mettre au point des luminaires au rendement et au confort
accrus, ainsi que des lampes fluorescentes présentant de larges gammes de températures
de couleur et de bons rendus de couleurs. De plus, leur durée de vie est très longue
(> 10 000 heures). Premier support de communication entre l'animateur et les
participants, le paper board doit être éclairé même en présence de la lumière du
jour afin d'atténuer les reflets qui pourraient gêner les observateurs.
L'acuité visuelle est nettement améliorée par un bon équilibre des luminances et des
contrastes. De trop fortes luminances augmentent l'éblouissement, de trop forts
contrastes favorisent la fatigue. Et par ailleurs, de trop faibles luminances et
contrastes constituent un environnement peu stimulant pour le travail. Ces considérations
sont particulièrement importantes dans les bureaux. Souvent, la meilleure solution
consistera en l'association de deux éclairages, direct et indirect, tout en veillant à
la luminance de toutes les surfaces (sol, plafond, murs, etc.) qui pourront entraîner des
fatigues excessives par éblouissement.
La lumière naturelle provenant d'une fenêtre introduit des contrastes élevés
provoquant des "luminances de voile", par exemple sur l'ordinateur. Résultat :
une nette diminution de la visibilité et donc des performances visuelles. L'écran
d'ordinateur doit bénéficier d'un éclairage particulièrement étudié.
Dans une chambre, l'idéal est de pouvoir implanter un éclairage d'ambiance et des
éclairages dirigés. Les lampes halogènes conviennent bien pour créer une ambiance
générale, tandis que des lampes à très basse tension, des mini-halogènes ou des
luminaires, peuvent assurer des éclairages dirigés. Le juste équilibre entre les
diverses sources lumineuses crée la bonne ambiance.
Toutes ces considérations ne doivent cependant pas faire oublier la notion d'économie
d'énergie. Outre les systèmes de "gestion technique du bâtiment", il existe
de nouveaux systèmes électroniques permettant de n'éclairer que les parties occupées
des bureaux ou des couloirs et de faire varier l'intensité lumineuse en fonction de la
lumière naturelle. n
La "boîte à lumière" permet de visualiser les différences de
perception de la lumière selon la température et l'indice de rendu de couleurs
utilisés.
Le même restaurant éclairé de trois façons différentes pour des effets de
mise en valeur très variés. 1. Ambiance intimiste et feutrée grâce à un jeu de
clair-obscur réalisé par un éclairage localisé : 3 spots encastrés orientables pour
lampes TBT. 2. Cette fois-ci, on accentue l'effet décoratif du relief du mur par des
spots encastrés orientables à lampes halogènes TBT, dirigés vers le mur. 3. Eclairage
général sans accentuation par tubes fluorescents 36 W dotés d'une température de
couleur chaude 2 700 K afin de créer une sensation de bien-être.
Une même boutique pour deux éclairages. A droite : éclairage général par
fluorescence. Couleur froide Tc élevé et pas d'effet lié à un éclairage
d'accentuation. A gauche : le même éclairage général fluorescent et mise en valeur des
objets par un éclairage d'accentuation réalisé avec des fibres optiques, halogènes TBT
et spots halogènes dichroïques TBT.
Le même habitat en deux versions : (en haut) lampes fluocompactes ; (en bas) jeu de
lumière avec lampes à incandescence classiques et halogènes.
GlossaireEclairement |
L'HÔTELLERIE n° 2616 Magazine 3 Juin 1999