m Nadine Lemoine
Gilles Guillo, créateur de Chez Cochon à Nanterre.
Les vieilles recettes ont du bon. C'est en découvrant le restaurant parisien Chartier, plus que centenaire, que Gilles Guillo a eu un déclic. Le bouillon, ancêtre des bistrots parisiens, où l'on pouvait manger très bon marché, à la bonne franquette, ce fameux bouillon amélioré de quelques morceaux de viandes et de légumes, est une formule plus que conviviale. Gilles Guillo décide d'y imprimer sa griffe en l'adaptant aux besoins de la clientèle d'aujourd'hui. Décor dépaysant et chaleureux, cuisine traditionnelle, carte conséquente, plats simples et prix attractifs, Chez Cochon réunit tous les ingrédients pour recréer une nouvelle génération de restaurants populaires. A la barre, un professionnel de la restauration qui a fait ses classes chez les autres avant de donner vie à son propre projet.
Une salle de 400 m2 répartie sur deux niveaux.
Deux ans de conception
"Il faut connaître ses limites et procéder par paliers", explique
Gilles Guillo. Une conviction à l'image de son parcours. Originaire de Pontivy en
Bretagne, Gilles a commencé dès 15 ans à faire des saisons tout en suivant ses études
au lycée agricole. A 20 ans, il se décide véritablement pour la restauration en suivant
une formation pour adultes commis de salle à la CCI de Vannes et entame sa carrière au
Sofitel Bourbon à Paris. Deux ans plus tard, le jeune chef de rang rejoint la Grande
Cascade dans le bois de Boulogne. Puis, en 1981, il entre dans le groupe Accor (assistant
maître d'hôtel au Novotel Orgeval) qu'il quittera sept ans plus tard en tant que
responsable de la restauration du Mercure Porte de Pantin. De 1988 à 1991, il dirige
L'Auberge du Bonheur (gérance appointée) dans le bois de Boulogne. "Puis avec
mon épouse Christiane, on voulait trouver une gérance libre ou reprendre un fonds, mais
rien ne nous plaisait, il fallait créer", explique Gilles Guillo. En 1992, il
lance sa première affaire et première création : L'uf et le Buf à La
Garenne-Colombes (Hauts-de-Seine). Un restaurant de 115 places qui réalisait 180
couverts/jour pour un ticket moyen à 148 F lorsqu'il le revendra quatre ans plus tard.
Son but ? Créer de toutes pièces un nouvel établissement de plus grande envergure sur
le mode bouillon. Il consacre les deux années suivantes, toujours en collaboration avec
son épouse, à monter son projet, définir le concept, affiner la thématique, chercher
le financement...
Un concept déjà primé
Dès le départ, Gilles Guillo reçoit des encouragements. Au stade de projet, en 1998,
Chez Cochon a reçu le prix Graine de Leader décerné par les membres du Leaders Club et
parrainé par Restauration Investissement. Et c'est Restauration Investissement, convaincu
par le concept, qui a permis à Gilles Guillo de financer à 100 % son affaire.
L'investissement global, achat du terrain compris, s'élève à 10 MF. Quant au parrain du
jury, Jean-Paul Bucher, p.-d.g. du groupe Flo, il a suivi de près son poulain. Conseil
pour l'aménagement, la carte, visite du terrain avant construction, Jean-Paul Bucher a
suivi toutes les étapes.
Pour commencer, il faut un vaste espace, parce qu'un restaurant bouillon, c'est un
établissement animé qui doit pouvoir accueillir beaucoup de clients. Aussi, après de
multiples recherches, Gilles Guillo décide de lancer son concept en bâtiment solo.
Implanté à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine, Chez Cochon est une construction neuve
conçue en collaboration avec l'architecte décorateur Daniel Guilloux du cabinet XX.
Premier choix stratégique, le bois. Un matériau qui permet non seulement une grande
souplesse lors de la construction pour procéder à d'éventuels changements, mais qui
réduit également sérieusement la durée des travaux (ici 4 mois clés en mains). Autre
avantage, l'aspect authentique, sans prétention et chaleureux du bois, qui correspond
parfaitement à l'univers populaire du bouillon. Aussi, à l'extérieur comme à
l'intérieur, le bois brut confère à l'établissement une note campagnarde sympathique
et dépaysante dans ce coin de banlieue parisienne ultra urbanisé. Le 22 février
dernier, Chez Cochon ouvre ses portes.
Espace et convivialité
Le bâtiment a une superficie de 700 m2. Les 400 m2 consacrés à la salle accueillent 220
couverts sur deux niveaux. Au rez-de-chaussée, 120 places assises réparties au gré des
banquettes colorées (bleu et bordeaux) pour inciter à la convivialité. Car l'esprit
bouillon, c'est aussi l'animation créée par les clients. "Un lieu qui accueille
une clientèle variée, où tout le monde se mélange. Un peu bruyant", rappelle
Gilles Guillo. On y trouve aussi un bar de belle envergure en demi-cercle où peut
s'attabler une dizaine de clients. Ce pôle d'attraction offre en prime à la vue de la
clientèle des saucissons, jambons et autres qui permettent de découvrir les produits.
Très vite, cette partie du bar répondra aussi à la demande de vente à emporter. En
prolongement, un coin mange-debout d'une capacité de 8 personnes. Le jeu des espaces et
des volumes a été étudié pour éviter toute monotonie.
Au premier étage, en mezzanine, une centaine de couverts attend les clients souhaitant
une atmosphère plus cosy. Ici, pas de banquette, mais des tables en bois de 2 à 6
personnes. Plus intimiste mais avec vue sur l'étage inférieur, l'alternative n'en permet
pas moins de profiter de l'ambiance. A l'arrière du restaurant, au calme, une terrasse de
70 m2 avec ses 50 couverts supplémentaires devrait être apprécié aux beaux jours.
Quant au cochon, puisque nous sommes Chez Cochon, il est partout. Gilles Guillo, à la
recherche d'une enseigne qui accroche tout en étant drôle et sympathique, a été
séduit par l'animal. Et parce qu'il souhaitait une décoration "pas sérieuse"
tout en étant de bon ton, il a fait les brocantes pendant deux ans réunissant 520
figurines différentes, soit une multitude de petits cochons exposés sur tous les murs du
restaurant. "Recréer comme un petit musée à la gloire de la campagne avec des
pièces qui rappellent à chacun un souvenir... Je voulais créer un restaurant convivial,
différent et dépaysant", explique Gilles Guillo.
Cochon, buf, agneau... saumon
Côté carte, toujours dans l'esprit bouillon, Gilles Guillo mise sur une cuisine simple
façon terroir à des prix très raisonnables. "Ma hantise, c'est le rapport
qualité/prix", confie-t-il. Avant de commencer le repas proprement dit, pour
accompagner l'apéritif ou en grignotage, les "amuse-cochons" font leur
apparition. Ces petites assiettes de charcuterie en provenance du Pays Basque, des
Pyrénées, mais aussi d'Italie et d'Espagne (tapas), soit 24 propositions, sont
facturées de 15 F à 75 F. Suivent les entrées, ufs durs mayonnaise, saucisson
chaud ou des salades (de 16,50 F à 34 F). Pour les plats, Chez Cochon ne compte que 6
propositions sur 19 à base de porc. Souris d'agneau, pavé de thon et côte de buf
sont aussi au menu. Ici, les prix s'échelonnent de 49 F à 92 F. Trois mois après
l'ouverture, le tiercé gagnant c'est le Pied de cochon grillé, le Boudin aux châtaignes
et le Pavé d'andouille. La carte des desserts compte également 19 références (entre 16
F et 42 F), de l'île flottante aux profiteroles en passant par le clafoutis. Trois
propositions du jour (une entrée, un plat, un dessert) viennent compléter l'offre.
L'établissement tourne actuellement avec un effectif de 24 personnes et devrait
rapidement renforcer son équipe pour suivre sa montée en puissance. Avant l'ouverture,
toute l'équipe a suivi une semaine de formation afin de maîtriser toutes les ficelles du
concept et tester aussi la cuisine. Bien connaître ses produits pour mieux les vendre,
impliquer et solliciter la participation du personnel afin de gagner leur adhésion...
Gilles Guillo est un adepte du Service qui Vend, méthode de stimulation des ventes venue
d'outre-Atlantique. Ainsi, deux fois par jour, il réunit tous les employés pour un
rapide briefing destiné à les motiver et à préciser les objectifs de la journée.
L'occasion également de définir les arguments de vente de l'entrée, du plat et du
dessert du jour qui sont affichés en salle sur des ardoises. Trois fois par semaine, tous
participent à un débriefing où chacun expose son point de vue, ses difficultés,
histoire de trouver des solutions. Communication, interactivité, participation, Gilles
Guillo tient à maintenir "une ambiance sympathique que ressent le client".
Et depuis l'ouverture, l'équipe semble apprécier ce style de management puisqu'aucune
défection n'est à déplorer.
Objectif : 300 couverts/jour
Ouvert 7 jours sur 7, de 12 h à 23 h, Chez Cochon a une capacité de 220 places assises.
Le ticket moyen s'élève à 140 F. A deux mois de l'ouverture, l'établissement réalise
200 couverts/jour. Pour son premier anniversaire, une moyenne de 300 couverts/jour est
l'objectif à atteindre. Pour se faire connaître, Gilles Guillo a d'abord visé la
clientèle de proximité. Il a édité un prospectus distribué dans 45 000 boîtes aux
lettres autour de l'établissement. De la publicité également dans les journaux locaux
et une revue départementale. "Il faut un budget non négligeable. 300 000 F,
c'est le minimum", dit Gilles Guillo. Quant au jeu des prévisions, Gilles Guillo
estime entre 10 et 11 MF le chiffre d'affaires de la première année (sur 10 mois) et
vise 14 MF pour la deuxième année.
"Ancré dans la tradition française mais pas passéiste, ce concept doit durer,
explique Gilles Guillo. Mais je suis plus créateur que développeur." Car
cette enseigne a été conçue dès le départ pour être duplicable. Une future chaîne
Chez Cochon ? En tout cas, c'est "en franchise, en filiale, en faisant appel à un
gros opérateur", qu'il entrevoit l'avenir de Chez Cochon. Pour sa part, Gilles
Guillo, toujours bouillonnant d'idées, a déjà d'autres projets. A demi-mot, discrétion
oblige, il confie avoir "deux concepts de restauration commerciale en gestation".
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Chez Cochon
208 avenue François Arago
92000 Nanterre
Tél. : 01 56 47 14 14.
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Parlons chiffresInauguration 22 février 1999 |
L'HÔTELLERIE n° 2616 Magazine 3 Juin 1999