m Sylvie Soubes
"Mon objectif ? Susciter la créativité de chacun", sourit Laurent Greco en incisant d'un geste rapide et précis une lamelle de pomme. Une fine dentelle de fruit se forme alors derrière le tracé du couteau. "Il suffisait d'y penser", ajoute le chef barman du Réservoir. Penser à faire de la décoration de cocktails un art. Car les étoiles, éventails et autres figures découpés dans les fruits et les mini-légumes par notre styliste culinaire, spécialisé dans les métiers du bar, s'apparentent bien à de l'art. Et pourtant, assure-t-il, "c'est à la portée de tout barman désireux d'aller plus loin dans la présentation des cocktails". Son parcours est d'ailleurs des plus classiques. Diplômé de l'école hôtelière de Strasbourg, membre de l'Association des barmen de France, Laurent Greco a découvert la cuisine dans le giron de sa mère qui tenait un restaurant à Dijon. Après des études traditionnelles et sans histoires, quelques expériences sur le terrain à Saint-Etienne, le jeune homme a traversé l'Atlantique, destination New York. Il y est resté six ans. Six années pendant lesquelles il allait exprimer une technique qu'il créait, découvrait et améliorait tout à la fois. Peu de barmen sont en effet aujourd'hui capables de réaliser un tel panel de décorations. Pour y parvenir, Laurent n'a fait qu'appliquer les techniques de découpe qu'il a apprises en cuisine et en pâtisserie. Sa patte personnelle relevant d'abord de l'envie de séduire, de faire plaisir. "Vous savez, commente-t-il, je trouve dommage de vendre 150 F un cocktail sans qu'il y ait un travail de personnalisation derrière. Les cocktails reviennent en force dans les bars, les clients sont demandeurs et je crois qu'il est grand temps de développer de nouvelles présentations, de nouveaux styles."
La qualité
Laurent Greco vient donc tout juste de lancer sa propre société de conseils et de
formation*. Réussir une décoration de cocktails demande non seulement un coup de main
mais une bonne connaissance des produits. Ainsi, il faut choisir le fruit ou les
mini-légumes (Laurent fait des prodiges avec une petite courgette par exemple) dans les
plus frais et les plus beaux. "Le moindre défaut se voit. Ici, on ne recherche
pas le goût mais l'apparence, la bril-
lance, l'allure. La sélection doit être rigoureuse. Ensuite, il faut connaître la
texture des produits. Un fruit farineux ne peut pas être utilisé. Je travaille beaucoup
avec des pommes Granny Smith du val de Loire, des Royal Gala rouge, des poires William ou
encore des oranges Nel ou Jafa, parce qu'elles ont une consistance très ferme."
Laurent préfère aussi les fruits et les légumes de saison. "Le litchi passe de
170 à 19 F le kilo en saison. Autant l'utiliser quand il est au plus bas prix."
Il faut aussi bien choisir son matériel, avoir les bons couteaux. "Quand je dis
que tout le monde peut réussir, cela ne veut pas dire que cela est facile. Ceux qui
auront les meilleurs résultats seront d'abord ceux qui veulent s'investir car il faut
réfléchir avant de couper, il faut comprendre le fruit ou le légume utilisé. Il faut
l'observer attentivement. Regarder sa forme et le tailler sans précipitation. C'est la
base de la réussite. Mais il faut également laisser libre cour à son imagination. Je
pense qu'un barman qui aime créer des cocktails a en lui la capacité à créer une
multitude de décorations." n
Points fortsm mise en valeur des
qualités, spécificités et originalité des produits |
L'HÔTELLERIE n° 2638 Magazine 4 Novembre 1999