m Lisa Casagrande
Lorsque, en 1979, l'ancienne
brasserie Le Phénix de la Valentine, à Marseille, mettait pour la première fois en
bouteilles le fameux cocktail bière-limonade né au début du siècle dans les cafés des
grands boulevards parisiens sous la marque Panach', elle ne s'attendait pas à remporter
un tel succès. Elle inventait en fait un nouveau segment sur le marché de la bière,
lequel fut très vite copié par d'autres brasseurs.
Aujourd'hui, son "invention" est toujours leader sur le marché français des
panachés industriels mais la vocation de la brasserie marseillaise, qui appartient depuis
1986 au groupe international Heineken, dépasse largement ce cadre.
Avec 215 salariés et une production de 1,3 million d'hectolitres, elle reste certes le
plus petit des trois sites français du groupe, également implanté en Alsace, à
Schiltigheim, et dans le Nord, à Mons-en-Baroeul.
Mais elle a comme mission de fournir toutes les marques, produites ou importées par le
groupe, au sud d'une ligne Bayonne-Lyon, et de faire face à l'arrivée des brasseurs
espagnols et italiens sur ce marché de 13 millions d'habitants.
Une extrême flexibilité
Heineken y réalise donc de gros investissements afin d'abaisser les coûts de production
et d'en faire plus que jamais une spécialiste des petites séries et des conditionnements
sur mesure, capable de répondre rapidement à l'évolution de la demande.
De 1988 à 1996, Heineken y avait déjà investi plus de 500 millions de francs. De 1996
à 1998, le groupe a rajouté 117 MF. En effet, dès 1997, il a accordé au site
marseillais son agrément pour brasser la marque Heineken, numéro un français des
bières spéciales, avant même de l'accorder à la brasserie de Schiltigheim, sa plus
ancienne unité de production française. D'où la nécessité d'adapter les équipements
aux normes très strictes imposées pour le brassage de cette bière (réaménagement des
caves de garde, nouvelle cuve, nouvelle levurerie).
Autre investissement clef : l'installation d'un nouvel ensemble de conditionnement.
Composé de deux lignes d'embouteillage, ce dernier peut traiter tous les types de
conditionnement à un rythme de 40 000 bouteilles/heure chacune. Il permet à
l'établissement, dont le coefficient saisonnier varie de un à quatre, d'être l'un des
sites du groupe les plus réactifs en termes de flexibilité et de répondre notamment
sans problème à l'engouement croissant pour les flacons de 25 centilitres qui, après
avoir convaincu les particuliers, séduisent de plus en plus les professionnels.
Une autre ligne, fonctionnant à 12 000 bouteilles à l'heure, continue de prendre en
compte la demande (en perte de vitesse) de la bière en litre et une autre encore permet
la mise en fûts de 30 ou 50 litres destinés aux professionnels et dont la production est
à peu près stable.
Autre signe de l'adaptation à la demande : la réalisation, depuis un an, de bouteilles
Heineken sérigraphiées (30 000 par an), à destination des professionnels
d'établissements de luxe.
Au total, la brasserie de la Valentine peut sortir chaque jour deux millions de bouteilles
et 8 500 fûts. Et si pour l'instant elle ne met pas la bière en boîte, mais se contente
de jouer le rôle de distributeur pour les produits convertis à ce mode de
conditionnement, elle devrait le faire d'ici deux à trois ans.
La bière en boîte
En effet, ce marché est en progression régulière d'environ 8 % par an. En France, au
total, il représente l'équivalent de 190 000 hectolitres. "Quand il atteindra
250 000 hectolitres, nous installerons une chaîne ici", annonce Gijsberg
Slootweg, directeur de la Valentine.
Au chapitre des investissements 1999 : l'installation d'un nouveau concept de chaudière
permettant d'économiser l'énergie et de cuire la même quantité de moût en deux fois
moins de temps, de nouveaux hangars pour stoker les matières premières (malt et maïs),
de nouvelles cuves de fermentation et de garde. Soit encore 50 millions de francs
investis. La petite Sudiste n'a pas peur de grandir. Normal : les Méridionaux, qui ont
longtemps boudé la bière, l'aiment de plus en plus. Ils en consomment en moyenne 35
litres par an, et même s'ils sont encore très loin des nordistes (60 litres par an), ils
n'ont que 5 litres de plus à boire pour rattraper la moyenne nationale... n
© Henry Parent
L'un des investissements 1999 : de nouvelles cuves de fermentation et de garde.
© 33 Labo
A 61 ans, Gijsberg Slootweg a parcouru tous les pays du monde avant de prendre son
poste à Marseille en 1997.
© Henry Parent
Parlons chiffresL'établissement de la Valentine produit aujourd'hui près de 20 % des ventes
françaises de la marque Heineken, avec 300 000 hectolitres, dont 250 000 écoulés dans
la région. © Jose Nicolas |
L'HÔTELLERIE n° 2642 Magazine 2 Décembre 1999