Sylvie Soubes
Qui dit punch, dit rhum. Le cocktail, pour les puristes, est indissociable de cet alcool. L'histoire à l'appui. "Dans les West Indies, rappelle le professeur Alain Huetz de Lemps, dans son excellent ouvrage sur le rhum Histoire du rhum*, les Anglais prirent l'habitude de mélanger le rhum à divers produits : du thé, du sucre, du citron, de la cannelle... Ils donnèrent à ce cocktail le nom de punch ; là encore, l'origine de ce nom a suscité diverses hypothèses dont la plus plausible est indienne. Le mot panch signifie cinq, et il s'agit en effet d'un mélange de 5 substances différentes. En fait, les mélanges variaient d'un lieu à l'autre." Le terme fut vraisemblablement francisé en 1730, devenant alors ponche.
Dynamiser les ventes
Il n'existe donc pas une recette de punch, mais un éventail de recettes. Ajoutez à cela, aujourd'hui, un bon moyen pour les barmen de passer certains restes de spiritueux. Laurent Gréco, professeur de bar auprès de l'Institut bar management européen, conseille : "Dans un bar, le punch peut aisément faire office de cocktail du jour. Ce qui permet de dynamiser les ventes et surtout de passer les stocks de cave dormant. Si vous avez, par exemple, des bouteilles de whisky que vous n'arrivez pas à vendre, passez-les dans des cocktails, mélangés à du jus d'orange, d'ananas, de l'Amaretto et du sirop de fraise." Cette digression vis-à-vis du rhum sera retenue notamment dans le cadre de buffets.
Exotisme
Le consommateur actuel voyage. Cette notion est importante car elle est à l'origine de
ses goûts et de son évolution. Ainsi, à Lille, Dominique Lecrocq, patron depuis 13 ans
du Tudor Inn, un bar très axé sur le rhum aujourd'hui, constate : "Les gens
partent de plus en plus loin. Cuba ou la République Dominicaine font partie des
destinations en vogue et lorsqu'ils reviennent, ils aiment se rappeler les boissons qu'ils
ont bues pendant leurs vacances. Sur les 300 alcools environ que nous avons en
référence, une grande partie sont des rhums. Ce n'était pas le cas il y a quelques
années." L'activité du Tudor Inn a toujours évolué en fonction de la demande.
Celui-ci proposait auparavant une carte de cocktails avec quelque 120 recettes.
Aujourd'hui, le principe est radicalement opposé. Si les cocktails restent la première
vente, ceux-ci sont réalisés en fonction du client. "Nous avons la volonté
d'être toujours un peu précurseur. Ce client qui voyage a besoin de se sentir libre mais
aussi considéré, reconnu. Le barman va choisir avec lui le rhum qui va l'inspirer ce
jour-là. Ce que nous essayons de faire, en fait, c'est de créer un contact direct avec
la clientèle. Certains consommateurs vont préférer leur punch avec beaucoup de jus de
fruit, d'autres le voudront avec du citron vert ou avec de la glace... Nous faisons aussi
des punchs avec des fruits frais. Ça aussi, c'est dans l'air du temps." Au Tudor
Inn, on sert, par exemple, un cocktail à base de pastèque placé dans la coque du fruit.
Le principe est aussi utilisé avec le melon.
Autre approche du punch, tout aussi actuelle et pourtant différente, celle de Jean-Marc
Fabre, patron de La Jamaïque. L'établissement a été créé en février 1988. "J'avais
vu le concept à Dijon et j'ai eu envie de faire la même chose à Paris." Situé
place de la Catalogne, dans le XVe arrondissement, ce bar est en dehors des flux
touristiques. "On vient chez moi plutôt par le bouche à oreille. C'est un
endroit où les gens souhaitent être tranquilles, seuls ou entre amis." Ici, le
rhum est une vocation et la carte des cocktails, avec 160 propositions, est
incontournable. "Ma clientèle vient pour elle. Certains cocktails comme le
Brasilia (rhum blanc, rhum brun, rhum vieux, liqueur d'abricot, jus de citron et jus
d'ananas), le Marie Galante (rhum brun purée de banane, fruit de la passion), ou encore
le Chope Créole (rhum brun, jus de citron vert, jus d'orange, brandy, sirop de maracuja)
sont plébiscités depuis des années. La recette doit rester la même au risque de
déplaire." L'établissement fonctionne d'ailleurs avec seulement quelques
marques de rhums précises, comme Séverin ou Saint-Etienne. "Nous recherchons la
qualité. Nous réalisons tous nos cocktails mais pas le punch coco. C'est un produit
difficile à faire si on veut qu'il soit bon. Nous utilisons le Punch coco de Séverin. Ce
sont les gens qui connaissaient le punch coco qui nous ont amené à référencer ce
produit."
48 heures à l'avance
"Le punch est une boisson très populaire en France, remarque Laurent Gréco. S'il permet de faire tourner la cave, il permet aussi d'être créatif. Il ne faut pas avoir peur d'innover quand l'établissement et la clientèle s'y prêtent. Il faut savoir aussi qu'il n'y a pas de recette précise. Prenons le cas du planteur, c'est du rhum agricole mélangé à des jus de fruits, exotiques si possible. Pour le reste, c'est au barman d'apporter sa touche personnelle au mélange." Avec le punch, on peut jouer sur les couleurs. "Un cocktail doit être attractif au coup d'il. Que voyez-vous en premier ? Sa couleur, sa présentation ?" D'un point de vue pratique, le punch est aussi un produit facile à vivre. "Vous pouvez le préparer jusqu'à 48 heures à l'avance en le conservant dans un conteneur de plastique fermé et placé dans un réfrigérateur. Certains seront également meilleurs après macération." Autre constat : la boisson n'est pas nécessairement très alcoolisée. Et puis, quel que soit le contexte dans lequel vous le servez, le punch parle de vacances, de soleil, de cocotiers... *
|
|
|
|
Recettes pour banquet ou buffetProposées par l'Institut bar management européen Punch planteur classique Progression Variante plus élaborée Progression Même progression que pour le punch classique. Cette présentation de punch est attractive. Elle a été réalisée par Laurent Gréco au Réservoir, à Paris. Le plaisir de l'oeil allié aux plaisirs du palais. |
* Paru aux éditions Desjonqueres, diffusé par P.U.F.
Cette présentation de Punch est attractive. Elle a été réalisée par Laurent Gréco au
Réservoir, à Paris. Le plaisir de l'oeil allié aux plaisirs du palais.
Vos commentaires : cliquez sur le Forum des Blogs des Experts
L'HÔTELLERIE n° 2668 Magazine 1er Juin 2000