Une vie partagée entre la restauration et le vin, un profond attachement à la formation des jeunes et un pied dans le Net depuis deux ans. Parcours d'un sommelier heureux et volontaire.
Sylvie Soubes
Eric Sertour a derrière lui un parcours fait de passions et de découvertes.
A 7 ans, il voulait déjà
travailler dans un restaurant. A 10, il aidait sa mère à faire la cuisine et lorsqu'il a
annoncé, à 15 ans, alors qu'il passait en seconde, qu'il quittait l'école pour un
apprentissage, ce
fut la 'honte'. Peu de personnes, autour de lui, comprirent sa démarche. Qu'importe. Eric
était décidé à aller au bout de sa passion. Sa première rencontre avec la profession
est marquée d'une croix blanche. "J'ai démarré chez Jacques Pic. Un grand
Monsieur. Il reste mon maître à penser. Il était très dur au travail mais très juste."
Eric Sertour se souvient aussi du père André Pic. "J'étais chargé de lui
apporter son repas." Alors qu'il fait ses études au CFA de Livron, Jacques Pic
l'inscrit à Suze-Larousse. Il fait ainsi partie de la première promotion de
sommelier-conseil de l'université de Suze-Larousse. En 1979, il devient officiellement
sommelier, mais il participe depuis un an déjà au concours du Meilleur sommelier de
France. Il n'obtiendra jamais le titre, mais il ne regrette pas l'aventure. "Une
leçon d'humilité". En 1984, Jean Frambourg, alors président de l'Association
des sommeliers de France, lui propose de rejoindre l'équipe du Pétrus. Leur sommelier
vient d'avoir un accident. "J'étais perplexe. Monter à Paris était une
aventure. La capitale, c'était le bout du monde pour moi." Le pas franchi, Eric
constate que le travail est pourtant "plus dur" en province qu'à Paris.
"Chez Pétrus, nous avions deux jours de repos et puis je gagnais deux à trois
fois ce qu'on gagnait en province." Pendant son remplacement, Eric va "refaire
la cave". "Une cave doit être rangée, jolie à regarder. Aujourd'hui,
quand j'ai des apprentis, je leur apprends d'abord l'empilage... Les bouteilles, les
étiquettes parlent. Une cave doit refléter la personnalité du sommelier."
Son remplacement terminé, Eric repart dans le Sud. Sa future femme l'y attend. Après
plusieurs expériences, il s'associe au lancement d'un bistrot à vins à Grenoble : Le
Pain et le Vin. L'enseigne s'attaque à Paris. Eric remonte et fait l'ouverture. "Je
n'étais plus seulement sommelier, mais directeur de la restauration. Je m'occupais des
équipes, de la salle..." Eric est chargé ensuite du deuxième Le Pain et le Vin
de Paris. L'établissement rodé, il devient directeur des achats pour une société qui
met en place des boutiques sur le thème de la Provence. Il découvre l'univers du café,
du thé... Il devient aussi 'acheteur en vins'. Il parle alors de la notion de puissance
qu'on peut avoir lorsqu'on discute et négocie avec le Bordelais ou la Bourgogne. "Il
ne faut jamais aborder un niveau de prix mais parler quantité. J'ai beaucoup appris à
cette époque." En 1989, notre Ardéchois fait le point sur sa carrière. Retour
à la restauration. "Elle me manquait". Du Relais d'Auteuil, il passe au
Fouquet's Europe. "On m'a donné un budget de 500 000 F pour faire la cave. Leur
objectif était l'étoile Michelin (la première a été obtenue en 1992). J'étais
entièrement libre, mais il fallait des résultats." Quelques années plus tard,
dans le sillage du groupe, il reprend la direction du Tout Paris (Samaritaine). "J'ai
créé des formules moins chères, j'ai fait deux restos en un. Un qui s'adressait à la
clientèle du midi, un autre pour le soir." En 1997, l'aller-retour dans le Sud
aux côtés de Reine Samut est un "bonheur". En 1998, il pose bagages au
Récamier. Mais l'homme s'intéresse au Net. Le voici cofondateur du site
www.clickonwine.com. Il participe aussi activement à la création, avec son ami de
toujours Philippe Faure-Brac, au premier MOF sommellerie de l'histoire. Eric Sertour,
âgé de 38 ans, a derrière lui un parcours fait de passions et de découvertes. Si, pour
lui, l'avenir est au Web, il aime rappeler cette définition du métier : "Le
sommelier n'est pas un vendeur d'étiquettes mais d'émotions." zzz18p zzz46o
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L'HÔTELLERIE n° 2690 Magazine 02 Novembre 2000