Hommes & entreprises |
succès et difficultés |
Dans la Sarthe, Jean-Yves et Corinne Herman font du Ricordeau un superbe outil proposant un ensemble de prestations pertinentes. Chambres et réception flambant neuves permettent à l'activité hôtelière de se hisser au niveau de la restauration. Cette dernière s'enrichit d'un bistro destiné à la clientèle locale.
m Olivier Marie
Tout vient à point à qui
sait attendre. Cette maxime, les clients du Ricordeau peuvent l'apprécier à sa juste
valeur. Cet ancien relais de diligence, planté au cur de la Sarthe dans un pays de
volaille, Loué, renoue avec les fastes du passé. Jusqu'à présent, les deux jeunes
propriétaires, Jean-Yves et Corinne Herman s'étaient concentrés sur la table.
Aujourd'hui, et sans délaisser le restaurant, bien au contraire, ils dévoilent une
nouvelle hôtellerie pétrie de charme. "Notre établissement était quelque peu
déséquilibré avec des chambres d'hôtel ne correspondant pas à la qualité de la
table. Désormais, c'est fini, et le Ricordeau retrouve un bel équilibre",
précisent de concert Jean-Yves et Corinne.
Que de chemin parcouru depuis leur arrivée en 1996 ! Le Ricordeau, célèbre grâce au
talent de son créateur, Emile Ricordeau, avait fini par tomber dans l'oubli jusqu'à ce
que trois investisseurs le remettent sur les rails. Messieurs Peschard, Paris et Jacquet,
eux-mêmes restaurateurs, installent alors dans l'établissement un jeune couple, les
Herman. Ils ont le nez fin. Au départ salarié, le couple rachète peu à peu le fonds de
commerce (1 million de francs) puis les murs aujourd'hui. Doté de sérieuses
références, trophée Coq Saint-Honoré 1996 et concours gastronomique de Rennes en 1998
notamment, Jean-Yves Herman se consacre à la table non sans succès puisque le guide Michelin
lui décerne rapidement un Bib Gourmand et le Gault & Millau un 14/20. Le
Ricordeau renonce aux erreurs du passé et Jean-Yves Herman clame haut et fort : "Ici,
ce ne sera jamais une maison trop chère !" Au restaurant, le ticket moyen est de
l'ordre de 300 francs.
Mais il faut néanmoins diversifier et attirer notamment une clientèle d'affaires. "Nous
avons à Loué 2 000 habitants et un tissu économique important", précise
Jean-Yves. Et même si le prix moyen couvert ne demeure pas excessif, cette clientèle
locale ne peut se permettre de venir déjeuner ou dîner plusieurs fois par semaine au
Ricordeau.
"Aujourd'hui, nous sommes plus sereins", expliquent Corinne et Jean-Yves
Herman, propriétaires du Ricordeau à Loué.
Complémentarité du bistrot
Jean-Yves et Corinne Herman ouvrent alors un bistrot, Le Coq Hardy, "dans une
maison située à deux pas du restaurant. Nous y proposons une cuisine authentique, simple
à envoyer comme du coq au vin, du canard confit... Le gros de la mise en place est fait
ici, au Ricordeau, selon mes recettes, et là-bas, nous avons installé un chef de partie.
Deux personnes en cuisine et une en salle". Dans un esprit décontracté de pub
anglais à la décoration boisée, Le Coq Hardy accueille quelque 60 couverts répartis
sur deux salles, plus une terrasse l'été d'une soixantaine de places. Ici, le prix moyen
tourne autour de 100 à 120 francs avec des formules entrée + plat à 75 francs ou
entrée + plat + dessert à 85 francs. Répondant toujours à un esprit de
diversification, les Herman proposent une prestation traiteur. "Nous ne nous
déplaçons pas. C'est une belle cuisine, mais forcément bien moins chère avec des
entrées à partir de 25 francs et des menus de 90 à 150 francs, précise Corinne
Herman. Ce service fonctionne très bien le dimanche et attire tout aussi bien une
clientèle particulière comme d'entreprise."
Parallèlement à la restauration, on l'a vu bien diversifiée, Jean-Yves et Corinne
Herman viennent donc d'améliorer sensiblement l'activité hôtelière jusqu'à présent
insuffisamment exploitée. "Nous tournons à 50 % de TO sur l'année. Il faut
faire mieux." Après 5 mois de travaux, "il n'existe pas une pièce qui
n'ait pas été refaite. Nous avons tout modifié, sauf le toit". Le Ricordeau
compte aujourd'hui 18 chambres, dont 13 haut de gamme (4 étoiles), réparties dans les
trois étages du Ricordeau, et 5 chambres classées 3 étoiles situées au-dessus du futur
bistrot. Pour des prix s'échelonnant de 280 à 800 francs. Toutes les chambres ont été
personnalisées (style Empire, romantique, anglais, oriental...), et renferment un
mobilier superbement bien restauré dans leur esprit d'origine. "Ils appartenaient
autrefois à Mme Ricordeau", explique Corinne. "En fait, nous avons
travaillé en ayant à l'esprit d'inviter les gens chez eux", témoigne
Jean-Yves. Pour pénétrer dans ces chambres, les couloirs, plus larges et accueillant des
espaces détente, ont également été repensés. Pour gagner de l'espace, les Herman ont
d'ailleurs décidé de condamner 3 chambres. Ce programme de travaux concerne également
l'accueil qui a été refait selon l'esprit originel du Ricordeau. Dans les tons boisés,
et où se succèdent trois salons de 10, 20 et 40 personnes, un bar, une réception, bien
entendu, et un ascenseur. Restent encore 6 boxes en ciment de 60 m2 chacun avec balcon. "Par
la suite, nous envisageons de les transformer en suites très haut de gamme dans deux à
trois ans", souligne Jean-Yves. Ces grands travaux s'accompagnent d'une série de
petits plus censés charmer et satisfaire au mieux la clientèle, comme les prises
Internet dans les chambres, les lignes directes sans passer par le standard, les chaînes
TV câblées, les lits pour bébés, baby-sitter, piscine... "Si l'on veut que
notre clientèle reste plusieurs jours, il ne faut pas uniquement lui proposer la chambre
et la table, mais également toute une série d'activités, comme le VTT, le canoë, la
pêche..."
Prolonger la durée des séjours
"Nous voulons en fait créer un vaste complexe hôtelier afin de satisfaire au
mieux notre clientèle." Client d'affaires ou de tourisme, de passage ou de
séjour, les Herman ne délaissent personne.
Le Ricordeau, relativement excentré de Loué, mise aussi sur son site Internet
(www.ricordeau.fr) qui vient de voir le jour. "Ici, nous enregistrons des séjours
de 2 à 3 jours et notre objectif est de prolonger leur durée, notamment pour la
clientèle étrangère qui, de juin à mi-octobre, reste ici quelques jours visiter le
coin. La clientèle parisienne d'été est davantage une clientèle de passage en transit
vers la Bretagne ou La Baule", précise Jean-Yves Herman.
Quoi qu'il en soit, fort de ces nouveaux aménagements, le Ricordeau ne manque
certainement pas d'ambitions. Jean-Yves et Corinne Herman en ont assurément les moyens.
Ne serait-ce que financiers. "Pour réaliser tous ces travaux, nous avons reçu
l'aide financière d'un industriel local, fournisseur à l'époque de M. Ricordeau, et
partenaire des investisseurs qui nous ont confié les rênes. En nous aidant, il voulait
que l'on se consacre uniquement sur notre profession, sans nous soucier des problèmes
financiers." Ce mécène les aide notamment lors du rachat des murs en 1999. "Avec
les chambres et l'auberge, le tout se monte à quelque 6 millions de francs Une somme que
nous n'aurions pas pu débourser sans l'aide de ce monsieur et des subventions. Nous
remboursons petit à petit", explique Jean-Yves. A la fin de l'année 2000, les
Herman réalisaient un CA de près de 6 millions de francs et les deux jeunes
professionnels confient volontiers : "Aujourd'hui, nous sommes plus sereins qu'il
y a quelques années." n
Après 5 mois de travaux, toutes les pièces ont été refaites. Le Ricordeau
compte aujourd'hui 18 chambres, dont 13 haut de gamme (4 étoiles), et 5 chambres
classées 3 étoiles situées au-dessus du futur bistrot. Pour des prix s'échelonnant de
280 à 800 F.
Vos commentaires : cliquez sur le Forum des Blogs des Experts
L'HÔTELLERIE n° 2707 Magazine 1er Mars 2001