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Jean-Pierre Ghiribelli, un ancien salarié de l'établissement, a racheté l'Hôtel Ile Rousse à Bandol dans le Var. Attaché à son indépendance, il s'inspire des méthodes de gestion des chaînes.
La dernière réalisation de Jean-Pierre Ghiribelli : la nouvelle cuisine de l'Hôtel Ile Rousse à Bandol dans le Var. Une cuisine-école de 90 m2 est mise à disposition pour les cours de Jean-Paul Lanyou, le chef du restaurant de l'hôtel, Les Oliviers. Un nouveau service proposé par l'Hôtel Ile Rousse, destiné à compléter l'offre de séjours, après la gastronomie, la thalassothérapie, les séminaires... Autre satisfaction : sa toute récente adhésion à la chaîne volontaire Châteaux et Hôtels de France. "Pour nos clients habitués, c'est devenu un plaisir de découvrir chaque année des nouveaux services, des petits plus. C'est un peu notre stratégie commerciale, la fidélisation par la nouveauté", explique Jean-Pierre Ghiribelli, propriétaire de l'établissement. Outre la cuisine, un nouvel investissement d'environ 3 millions de francs est prévu cette année, destiné aux chambres cette fois. Difficile d'obtenir plus de précisions du propriétaire. Car, si Jean-Pierre Ghiribelli a gardé de sa formation de chanteur lyrique le sens du geste théâtral et l'art de capter son auditoire, il sait rester discret quand il s'agit de chiffres. "Nous sommes arrivés à un point où chaque investissement suscite des commentaires malveillants et de la jalousie. Nous préférons ne pas donner de chiffres." Pas de problème, en revanche, pour évoquer son histoire. Celle du chef de rang devenu propriétaire du palace, du "self-made-man issu d'une famille d'artistes siennois", qui gère aujourd'hui une entreprise regroupant un 4 étoiles et cinq restaurants.
Une formation sur le tas
"D'abord, je dois dire que ma formation, je l'ai faite sur le tas, de la cuisine
au service, dans pratiquement tous les métiers de l'hôtellerie. Mes employés savent
aujourd'hui que je pourrais, s'il le fallait, reprendre ma place en salle ou en
cuisine", raconte Jean-Pierre Ghiribelli. Arrivé à Bandol en 1970, le jeune
homme découvre l'Auberge du Port, alors un petit restaurant. "J'ai senti que je
serais bien ici et pas ailleurs. J'ai su que l'affaire ne marchait pas très bien. Et,
avec la folie de la jeunesse, je me suis dit 'il faut que tu diriges ce truc'. On
m'a dit que le propriétaire était celui de l'Hôtel Ile Rousse. Pour rencontrer ce
richissime entrepreneur varois, je me suis fait engager en salle. Et un jour, j'y suis
allé au culot. Le propriétaire me l'a loué pour 5 000 francs par mois. Nous étions
deux, ma femme en cuisine, et moi, faisant l'aller-retour en salle." L'affaire
démarre, puis décolle, grâce notamment à de bonnes critiques dans les guides
gastronomiques. 'Quand l'affaire a commencé à être très rentable, le propriétaire
m'a dit : j'ai des offres très intéressantes. Ou tu me rachètes, ou je te fouts
dehors'. Nous avons dû convaincre les banquiers et nous avons acheté en 1974." L'Auberge
du Port devient un des établissements les plus en vue de la station balnéaire. Il
s'agrandit en 1986. Entre-temps, l'Hôtel Ile Rousse périclite. "L'hôtel avait
été conçu un peu comme le jouet du propriétaire. Un palace pour ses amis, où il
pouvait s'afficher avec des célébrités. Par contre, la gestion avait été confiée à
des groupes successifs. Dernier en date, le groupe Pullmann. Une catastrophe."
Plusieurs fois mis en redressement judiciaire, l'hôtel est finalement repris par l'ancien
employé en 1993. "Il y avait une grosse part d'inconscience. Nous étions à
l'époque de l'effondrement du marché hôtelier. Les banquiers ne voulaient pas suivre...
Pendant deux ans, nous avons été en location-gérance avec obligation d'achat à la fin.
Mais nous sommes arrivés dans un hôtel à l'abandon." L'établissement garde
pourtant de nombreux points forts : une plage privée, la proximité immédiate du
centre-ville, des chambres vastes et une clientèle d'habitués encore adeptes des longs
séjours. La clientèle de l'Auberge du Port vient s'y ajouter.
Une équipe jeune et dynamique
Après des travaux
importants, le nouveau propriétaire met en place une véritable politique commerciale. "J'ai
eu de gros problèmes avec les 17 employés présents quand je suis arrivé. Les
redressements successifs les avaient découragés. Ils n'ont pas voulu croire en mon
projet et se sont éliminés eux-mêmes..." Jean-Pierre Ghiribelli reconstitue
une équipe avec, aux postes-clés, des hommes jeunes issus du système des chaînes. "Le
système Ghiribelli me plaît : il y a un seul interlocuteur. Les décisions sont
prises en commun, mais elles sont rapides, pragmatiques, assure Stéphane de Robien,
directeur commercial. Nous évoluons plus vite que si nous étions dans un groupe. De
l'autre côté, mon expérience des chaînes m'a permis d'introduire ici une meilleure
organisation, notamment en ce qui concerne la négociation de contrats avec les
fournisseurs." Arrivé il y a un peu plus d'un an du groupe Accor, Jean Marcelli,
directeur d'exploitation, a rendu systématique la pratique des questionnaires
d'évaluation post-séjours : "La diversité des cultures est un plus, à partir
du moment où les compétences sont là, juge-t-il. Jean-Pierre Ghiribelli a su
s'entourer de gens très différents de lui en les motivant vers le même objectif."
A suivre. n
Jean-Pierre Ghiribelli (2e à partir de la droite) et son équipe.
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L'HÔTELLERIE n° 2716 Magazine 3 Mai 2001