Secondé par Brigitte, son épouse, Jean-Michel Lorain prend un nouvel essor avec un outil, reflet de sa personnalité : La Côte Saint-Jacques nouvelle génération. Visite.
m Cécile Junod - Photos Ludovic Maisant
© Eliophot
Jean-Michel et Brigitte Lorain, sereins. Les premiers résultats leur donnent
raison.
C'est un matin, alors qu'il
est en train de se raser dans sa salle de bains, que Jean-Michel Lorain apprend par la
radio la perte de sa 3e étoile. Meurtri, choqué, le chef ne se laisse pas pour autant
abattre. Il est désormais à la tête de la nouvelle Côte Saint-Jacques qui vient de
subir une phase de gigantesques travaux de rénovation et d'agrandissement. Fragilisante,
épuisante, voire déstabilisante, cette période de refonte complète de l'établissement
n'est certainement pas étrangère à la rétrogradation au Guide Rouge. Mais, ce
qu'il y a de sûr, c'est qu'elle est à l'origine d'un nouveau départ pour Jean-Michel et
Brigitte qui, désormais, sont dans "leurs murs". Dans un lieu à leur
image.
Cela faisait déjà longtemps que le projet de transférer le restaurant de l'autre côté
de la route, en bordure de l'Yonne, tournoyait dans la tête des uns et des autres. Pour
diverses raisons, il avait toujours été ajourné. Mais, il y a 2 ans, il ressurgit, plus
fort encore. Les emprunts pour les précédentes réalisations arrivant à leur terme, il
était possible d'envisager à nouveau une phase d'investissements.
Une année d'études, une année de
travaux, 25 millions de francs
En 1999, une consultation
est lancée. Le Cabinet d'Architectes Associés, dont les trois têtes dirigeantes sont
Jean-Marc Catonné, Alain Bories et Christophe Daguin, remporte le concours. Débute alors
la phase préparatoire qui fut l'occasion d'échanges fructueux entre Jean-Michel Lorain,
sa famille et les architectes. L'objectif : conceptualiser le projet de sorte que la
réalisation architecturale devienne l'expression formelle du style de sa cuisine. Pour
mener à bien l'opération, les architectes durent s'imprégner de l'esprit des lieux pour
qu'une harmonie s'installe entre le goût, le terroir, le bâti existant, l'urbanisme et
les contraintes techniques et financières.
Il fallut une année entière d'études, une année de travaux et 25 millions de francs
pour mener à bien le projet. Mais le résultat est là : un nouveau bâtiment de près de
2 000 m2 accueillant salles de restaurant et salons de réception, locaux de production
(cuisines, réserves, préparations, etc.) et 7 chambres en complément des 25 déjà
existantes. "Nous souhaitions une décoration qui nous ressemble, commente
Jean-Michel Lorain. Nous ne voulions pas d'un architecte d'intérieur qui nous aurait
imposé son style sans que nous ne puissions jamais changer un vase ou un quelconque objet
décoratif. Ce nouveau cadre devait être le reflet et l'expression de notre personnalité
et de notre cuisine."
La cuisine de Jean-Michel Lorain est recherchée et d'une grande richesse créative.
Empreinte de tradition familiale, respec-tueuse des saveurs de sa région et de ses
produits, elle est aussi en prise avec son temps et intègre un certain mo-dernisme qu'il
convenait de reproduire dans le projet architectural. L'enveloppe de la construction,
proche du secteur protégé du centre-ville, est de facture régionale traditionnelle afin
de s'intégrer à l'urbanisme de Joigny. Côté rue, la façade s'élève sur un
rez-de-chaussée et un étage surmonté d'une toiture propre au style de la région. Le
public est accueilli dans des salons de réception qui s'ouvrent largement sur les jardins
et la rivière, et laissent déjà entrevoir des perspectives vers les salles de
restaurant.
Sobre, la décoration reste empreinte d'une grande distinction.
Les volumes ont été étudiés pour transmettre noblesse aux lieux. Le choix des
matériaux s'est porté naturellement sur de belles choses, simples, mais sophistiquées
dans leur mise en uvre et leur association, comme le bois et la terre cuite pour les
sols, les enduits à la chaux pour les murs, la pierre de Bourgogne pour les escaliers ou
le dallage en marbre vieilli à cabochons dans le restaurant.
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Une déco rythmée par des clins
d'il culinaires
Le fil conducteur de
la décoration repose sur la création d'un cheminement gourmand qui mène des pièces
d'accueil à la table, en suscitant un intérêt et des découvertes progressives,
rythmés par une évocation du maître des lieux. Dès l'entrée, une trémie vitrée
permet d'avoir un aperçu sur la cuisine où s'affaire la brigade composée d'une
vingtaine de personnes, et sur la salle à manger privée de Jean-Michel Lorain.
Réalisée spécialement, une ferronnerie est inspirée des plats illustrés dans le livre
Cuisine, Emotion écrit par le chef (aux éditions Minerva). Sur les murs de
l'escalier enduits à la chaux sont calligraphiés les textes tirés de ses recettes de
cuisine. Le cuivre de la cage d'escalier est un clin d'il aux beaux ustensiles des
cuisiniers. Dans des niches sont exposés des vestiges anciens de pierre sculptée,
propriété depuis longtemps de la famille Lorain. Des encadrements de feuilles de divers
végétaux ornent les murs et forment une sorte d'herbier naturel. Aux décors
différents, les deux salles de restaurant offrent une jolie vue sur l'Yonne. De
plain-pied avec les salles, les cuisines communiquent avec un niveau inférieur où sont
situés les locaux de préparation et les réserves dont les accès se trouvent sur le
quai bordant l'Yonne. La contrainte est ici exploitée pour respecter le principe de la
marche en avant. Des caméras situées au poste d'envoi permettent de garder le contact
avec ces zones excentrées. Agé seulement de 5 ans, le piano Charvet de l'ancienne
cuisine a retrouvé dans ce nouveau cadre une place centrale. Spacieuse, rationnelle, la
cuisine répond aux aspirations du chef, résolument tourné vers l'avenir et le devenir
de sa nouvelle Côte Saint-Jacques.
La nouvelle cuisine avec, au centre, le piano Charvet.
Jean-Michel et Brigitte Lorain n'ont pas hésité à se projeter dans l'avenir, dans leur avenir, et aussi dans celui de leurs clients. Les besoins des enfants ont été pris en compte d'une manière exceptionnelle : ils ont aménagé une pièce rien que pour eux. Là, ils peuvent regarder des cassettes vidéo, jouer sur une console ou un PC, colorier des dessins ou cajoler les innombrables peluches mises à leur disposition. Cet espace de jeux remporte un vrai succès, tant auprès des jeunes convives que de leurs parents. De toute évidence, Brigitte et Jean-Michel ont tenu à faire en sorte que, pour leurs clients, se rendre à La Côte Saint-Jacques soit, aujourd'hui encore plus qu'hier, un grand moment de bonheur pour toute la famille. n zzz22v zzz40r
Le salon : ambiance chaleureuse avec cheminée.
En chiffres |
Chiffre d'affaires (En évolution de 8,23 %) Taux d'occupation 53 % Nombre de couverts/jour 70 (+ 6 % en 2000) |
Cours de gastronomie ©
Eliophot |
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L'Hôtellerie n° 2742 Magazine 1er Novembre 2001