C'est une crise économique et non une crise d'ordre sanitaire qui a poussé la filière produits de la pêche à se remettre en cause en 1994. Transparence, traçabilité, identification et hygiène font désormais partie des priorités de cette filière. zzz44s
Objectif de la filière pêche et aquaculture : harmoniser les appellations, les
grilles de calibrages et les critères de fraîcheur.
Le rapport demandé par le gouvernement suite à la crise économique de la filière produits de la pêche en 1994, appelé rapport Guérin, a démontré qu'une des causes de cette situation était une insuffisance de transparence à l'intérieur même de la filière, due à un défaut de langage commun. Chaque région fonctionnait en effet selon ses propres traditions. Par exemple, on avait l'habitude d'appeler la Raie fleurie, Raie saint-pierre à Lorient et Raie vache à Royan ; à Lorient, où le merlan est pêché en grande quantité et fileté, le calibrage était depuis toujours réalisé avec précision et la taille 2, par exemple, correspondait bien à des poissons de 350 à 500 g, alors qu'au Guilvinec, où le merlan n'est pas une espèce traditionnelle, le calibrage était réalisé avec moins de rigueur, et dans un lot de taille 2, on pouvait trouver 30 % de poissons de taille 3 (250 à 350 g), et 10 à 20 % de taille 1 (500 g et plus). Pour résoudre ces incohérences au niveau des appellations et des tailles, l'Ofimer (Office national interprofessionnel des produits de la mer et de l'aquaculture) a été chargé de mettre en place les outils nécessaires.
Pour la transparence : 2 guides de normalisation
"Suite aux conclusions du rapport Guérin, commente Valérie Guth, responsable
des dossiers qualité à l'Ofimer, l'office a entrepris l'élaboration d'outils
conformes à la réglementation européenne en étroite collaboration avec les opérateurs
de la filière. Pour leur permettre de participer à la conception et à la mise en
application de ces outils sur le terrain, nous avons incité ces opérateurs, il y a 6 ou
7 ans, à se regrouper en quatre organisations interprofessionnelles régionales (lire
carnet d'adresses p. 90)." Grâce à cette collaboration, le premier outil mis à
la disposition de la filière est le Guide de classification des produits de la mer concernant
les principales espèces débarquées sur le littoral français. Ce guide comprend un
dictionnaire des appellations, et présente les grilles de calibrages à appliquer dans
tous les ports français et européens. Il s'appuie sur la réglementation communautaire
pour les calibres, et la réglementation française pour les dénominations officielles
françaises. Il indique pour chaque espèce de poisson pêché par les professionnels
français l'appellation officielle en latin et en français, mais également les
appellations régionales. Depuis janvier 2002, tous les acteurs de la filière doivent
indiquer sur l'étiquette l'appellation officielle. Le deuxième outil sur lequel
travaille l'Ofimer avec les opérateurs en amont de la filière (producteurs, criées et
organisations régionales) et l'administration (Direction générale de l'alimentation,
Direction des pêches maritimes et de l'aquaculture) est un Guide national
d'évaluation de la fraîcheur des produits de la mer sous criée. Il est destiné aux
opérateurs impliqués dans la première vente des produits de la mer frais, les
associations engagées dans la normalisation du tri et les centres de formation. Il
s'appuie sur la réglementation communautaire 2406/96 qui fixe les normes communes de
commercialisation pour certains produits de la pêche et qui définit trois niveaux de
fraîcheur : E (extra), A (1er choix), B (second choix) ; le troisième choix - C - a
été retiré de la consommation humaine par les vétérinaires. "L'évaluation de
la fraîcheur des produits débarqués, explique Valérie Guth, est basée sur
l'appréciation de critères organoleptiques : l'aspect de la pigmentation de la peau, du
mucus, de l'il, des branchies, du péritoine (pour les poissons éviscérés),
l'odeur des branchies et de la cavité abdominale, la consistance de la chair."
Le guide présentera les critères d'évaluation les plus pertinents et les plus
rapidement appréciables à l'aide de descriptions et de photos. "Ce guide, dont
les travaux ont débuté fin 2000, poursuit Valérie Guth, concernera les 25
espèces les plus commercialisées. A chaque espèce correspondent 4 pages : une page de
présentation du poisson entier et les parties à examiner pour évaluer le degré de
fraîcheur (yeux, ouïes...), et trois pages de gros plans des parties à examiner et leur
évolution au fil des jours." Ce travail a été initié par Normapêche Bretagne. "Pour
que ce document soit précis et cohérent, explique Isabelle Letellier, directrice de
Normapêche Bretagne, les photos ont été prises sur un même poisson à différentes
étapes de sa dégradation." Ce guide, véritable outil pédagogique, devrait
être terminé au cours du premier semestre 2002, et servira de référence. La France est
en effet le pays le plus avancé dans ce domaine. Et comme la qualité d'un poisson ou
d'un coquillage commence au niveau de la pêche, depuis le début de cette année,
l'Ofimer travaille avec les organisations régionales sur un Guide commun des bonnes
pratiques de pêche, synthèse des guides de bonnes pratiques déjà élaborés ou en
cours d'élaboration par les organisations interprofessionnelles régionales.
Fiche technique présentant les dénominations de vente, caractéristiques et
grilles de calibrages.
Pour la traçabilité : un véritable étiquetage
La filière produits de la pêche et de l'aquaculture, comme toutes les autres filières,
se doit de mettre en place une bonne traçabilité. Depuis le 1er janvier 2002, les
produits de la pêche et de l'aquaculture doivent être étiquetés conformément à la
nouvelle réglementation d'étiquetage et de traçabilité. Sur les étiquettes des
emballages ou sur l'étal du poissonnier, mais aussi sur les factures, doivent désormais
apparaître :
Pour tous les produits de la pêche et de l'aquaculture
w la dénomination officielle de l'espèce, en français ou
en latin.
Pour les produits pêchés en pleine mer
w la mention 'pêché'
w la zone de capture : Atlantique nord-ouest, Atlantique
nord-est, Atlantique centre-est, Atlantique centre-ouest, Atlantique sud-ouest, mer
Méditerranée, Océan Indien, mer Baltique, Mer Noire, Océan Pacifique, Antarctique.
Pour les produits pêchés en eau douce
w la mention 'pêché en eau douce' suivie du nom de l'Etat
ou du pays d'origine.
Pour les produits d'aquaculture
w la mention 'élevé' qui doit être suivie par le nom du
pays où a eu lieu la phase finale d'élevage.
Les restaurateurs et les clients du poissonnier détaillant savent désormais si le
poisson qui leur est proposé est sauvage ou d'élevage. La réglementation n'impose pas
à ce jour aux restaurateurs de préciser ces mentions.
Une facture conforme aux nouvelles règles
d'étiquetage.
Pour l'hygiène : des guides de bonnes pratiques hygiéniques
Pour maintenir la qualité hygiénique des poissons, les 42 criées françaises se sont
toutes mises aux normes CEE et sont agréées. Celles de Dieppe, Granville et Cherbourg
sont aux normes ISO et celle de Lorient est certifiée. Les mareyeurs et les
grossistes-distributeurs sont également agréés CEE. Pour aider tous les acteurs de la
filière à se mettre en conformité avec la réglementation européenne relative à
l'hygiène des denrées alimentaires, des guides de bonnes pratiques hygiéniques ont
déjà été réalisés, d'autres sont en cours. Celui des poissonniers détaillants est
sorti en juin 2001. Les guides de bonnes pratiques concernant les secteurs du mareyage et
de la conchyliculture sont en cours de validation. Les mareyeurs travaillent également
sur un cahier des charges de certification de service.
La coquille Saint-Jacques Normandie Fraîcheur va prochainement obtenir le Label
Rouge.
Pour l'identification : marques et labels
La filière produits de la pêche et de l'aquaculture est donc en train de mettre en place
un socle de bonnes pratiques relatives aux appellations, aux calibres, à la fraîcheur et
à l'hygiène qui lui permettra de commercialiser des produits frais et sains en toute
cohérence et transparence. Grâce à ce socle de base, déjà bien élaboré et qui
permettra d'améliorer la qualité standard, les professionnels peuvent désormais faire
émerger leurs produits de qualité supérieure. "L'Ofimer, poursuit Valérie
Guth, est prête à aider les professionnels qui veulent identifier leurs meilleurs
produits, mais à condition qu'ils s'engagent sur un cahier des charges précis et qu'ils
acceptent des contrôles par un organisme extérieur. Ainsi on trouve aujourd'hui des bars
de ligne de la pointe de Bretagne, de Poitou-Charentes ou de Vendée. Chaque région a
défini son cahier des charges. Plusieurs démarches d'identification du bar de ligne
existent sur le littoral français. L'Ofimer soutient, pour valoriser et protéger la
dénomination de ce produit de haute qualité, une démarche nationale qui s'oriente vers
la mise en place d'un signe officiel de qualité." Par ailleurs, les 4
organisations professionnelles régionales travaillent d'arrache-pied pour améliorer les
habitudes de chacun et valoriser le haut du panier de leurs spécialités. Pour identifier
et valoriser ces produits, elles ont créé des marques collectives, entreprennent des
démarches pour obtenir le Label Rouge ou une certification de conformité. Ainsi,
l'organisation professionnelle bretonne, Normapêche, a créé deux marques collectives :
Poissons de Bretagne et Bretagne Qualité Mer. Ces produits sont distribués par Pomona et
Metro, par exemple. L'organisation professionnelle de Normandie a créé la marque
collective Normandie Fraîcheur
Mer. L'organisation méditerranéenne a défini la marque Golfe du Lion Qualité
Producteurs. Enfin, l'organisation de Boulogne vient tout juste de lancer la marque
Filière Opale. "C'est la réglementation sur l'étiquetage et la traçabilité,
explique Isabelle Letellier, qui a incité les organisations interprofessionnelles
régionales à créer des marques collectives pour valoriser les produits de leur région.
Les zones de pêche définies par la réglementation sont trop larges et par conséquent
non valorisantes. Il vaut mieux vendre du poisson signé Poissons de Bretagne que du
poisson Pêché en zone Atlantique nord-est. Après avoir formé pêcheurs et mareyeurs,
défini nos cahiers des charges et vérifié leur bonne application par des contrôles et
audits, nous sommes sûrs de la qualité de nos produits et nous commençons à
communiquer pour les faire connaître aux consommateurs." Alors restaurateurs,
suivez de près les démarches de la filière produits de la pêche et de l'aquaculture.
Vous pourrez d'ici peu être véritablement certains de la qualité et de l'origine de vos
achats. n
Bretagnew
Bretagne Qualité Mer : Produits qualité E/A w
Poissons de Bretagne : |
Normandiew
Normandie Fraîcheur Mer |
Boulognew Filière Opale |
Méditerranée* Golfe du Lion - Qualité producteurs |
La nouvelle
réglementation relative à l'étiquetage et à la traçabilité impose aux pisciculteurs
d'indiquer sur l'étiquette et la facture la mention 'élevé' et le nom du pays
d'origine. Afin de permettre aux consommateurs et aux restaurateurs de bien identifier
leurs productions, la filière piscicole française a travaillé à l'élaboration d'une
charte de qualité.
Les poissons produits dans le respect du cahier des charges mis au point par cette charte
sont désormais identifiés par le logo Qualité - Aquaculture de France. Sont concernés
le bar, la daurade royale, le turbot, le maigre et l'esturgeon. Le cahier des charges
s'applique à toutes les étapes de la production et de la mise en marché : écloseries,
fermes de grossissement, pêche, abattage, tri, calibrage, conditionnement et étiquetage
des caisses.
Voici quelques points importants spécifiés dans ce cahier des charges. Les aliments
donnés aux poissons sont exempts d'ingrédients issus d'animaux terrestres et d'OGM. Les
poissons doivent avoir jeûné au moins 12 heures avant la pêche afin de vider les
viscères, condition indispensable pour la qualité du produit. Le délai de livraison
entre la ferme et le premier acheteur ne doit pas dépasser 72 heures maximum. Le respect
de ce cahier des charges est contrôlé par un organisme indépendant. En dehors des
poissons d'élevage garantis par le logo Qualité-Aquaculture de France, certains
pisciculteurs produisent du bar Label Rouge. La truite et le turbot sont en cours
d'obtention d'un Label Rouge.
Poissons de chalutier et poissons de petit bateau |
Pour le consommateur ou le restaurateur, l'expression 'poissons de petit
bateau' est synonyme de fraîcheur. Quant à l'expression 'poisson de chalutier', elle
évoque des poissons de moins bonne fraîcheur et de moins bonne qualité. Ceci n'est pas
toujours vrai. Un poisson de petit bateau mal manipulé et mal stocké peut perdre de sa
fraîcheur et être classé en catégorie de fraîcheur B. Un poisson de chalutier
hauturier pêché, stocké, calibré, éviscéré dans de bonnes conditions, peut se voir
classé en catégorie de fraîcheur E ou éventuellement A* en arrivant à la criée. Les
chalutiers hauturiers, pour redorer l'image de leur production, ont en effet décidé de
se lancer dans une démarche qualitative. Les chalutiers hauturiers de Boulogne, par
exemple, ont été les premiers à travailler 'en bases avancées'. C'est-à-dire que ces
chalutiers, après 8 jours de pêche en Ecosse, débarquent leurs poissons dans un port écossais puis repartent au large. Les poissons sont ensuite transportés par camions jusqu'à Boulogne. Ainsi, les premiers poissons pêchés sont proposés seulement 10/12 jours après leur capture, alors qu'autrefois, ils l'étaient après 15/20 jours. Par ailleurs, les derniers poissons pêchés arrivent sur la criée 2 à 3 jours seulement après leur capture et peuvent ainsi bénéficier d'un classement de catégorie de fraîcheur E ou éventuellement A*. Ce sont ces poissons que les producteurs de pêche hauturière entendent valoriser par une marque commerciale collective. * Un poisson de fraîcheur E peut être déclassé en A s'il présente des défauts d'aspect (gratté, rougi, décoloré...) . |
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L'Hôtellerie n° 2755 Magazine 7 Février 2002 Copyright ©