A quelques enjambées de la Sorbonne, à Paris, le Soufflot Café reflète l'esprit du quartier, entre livre et débat littéraire. Il ne s'agit pas ici de concept, mais de choix stratégique. A méditer.
Sylvie Soubes
A l'intérieur du Soufflot Café : bois foncé, tons ocre, banquettes
confortables... Plusieurs étagères encastrées rappellent la personalité littéraire du
quartier.
Il est à peine 16 heures. Le Soufflot Café se remplit doucement. En terrasse, un couple feuillette des revues devant une boisson chaude, un autre, un peu plus loin, discute. Trois garçons, des étudiants sans doute, entrent côté bar et se dirigent d'emblée vers le fond. Ils sont attendus par deux jeunes femmes, déjà installées en salle. Ils les embrassent rapidement, posent leur veste et s'asseyent à leur tour. L'un d'entre eux sort de sa sacoche quelques documents, des photocopies, des imprimés. Il les entasse au centre de la table, visiblement satisfait du butin qu'il livre à l'encan. Le serveur s'est entre-temps approché pour prendre la commande : un crème, un vin chaud, deux cafés, une bière... Chacun sait ce qu'il veut. La formalité passée, le petit groupe, mené par le gaillard à la sacoche, entreprend une lecture de texte. Malgré la musique d'ambiance, plus forte en fin d'après-midi, les voici qui débattent. Quelques brides parviennent : "Le bourgeois littéraire s'encanaille", "le départ de Martignac n'y fera rien", "il lui aura fallu seulement 20 jours pour écrire Hernani"... La discussion s'agite autour de Victor Hugo. Un léger sourire traverse le visage du serveur alors qu'il apporte les boissons. Bien sûr, il connaît Victor Hugo. Et comment ferait-on en cette fin de février 2002 pour échapper à l'actualité qui commémore tous azimuts le bicentenaire de la naissance du grand auteur français ? "Il n'y a pas que les jeunes qui nous rabâchent les oreilles avec Victor Hugo, sourit une nouvelle fois le serveur. N'oubliez pas que nous sommes à deux pas de la Sorbonne et que nous sommes entourés de maisons d'édition."
"Notre objectif a été d'offrir un cadre littéraire, confortable, tout
public, qui ne soit pas une bibliothèque...", explique Michel Portier.
Thématique
Le Soufflot Café a en effet pour voisin immédiat les éditions Maisonneuve et Larose,
Odile Jacob ou encore Dalloz Etudiants. Il puise l'essentiel de sa clientèle dans le
monde de la littérature. Racheté en 1993 par Dominique Moinaux et Michel Portier,
l'établissement a entièrement été refait en 1999 sur le thème du livre. "Lorsque
nous avons pris la décision de le rénover, nous avons réfléchi à la manière de nous
distinguer tout en nous inscrivant dans la logique du quartier. La difficulté était de
séduire une clientèle qui va de l'étudiant au professeur, en passant par des patrons
d'édition. Notre objectif a été d'offrir un cadre littéraire, confortable, tout
public, qui ne soit pas une bibliothèque. Les livres sont des éléments de décoration
uniquement. En revanche, nous mettons à disposition plusieurs quotidiens."
Sans doute le serveur aura-t-il une troisième fois marqué son amusement lorsque Michel
Portier est interrogé à propos des réunions de Jean Laulon. "Cet ancien
professeur à la Sorbonne cherchait un cadre littéraire dans le quartier pour organiser
des réunions autour de Victor Hugo. Il fait venir des auteurs, des gens de lettres, des
étudiants. Ces réunions ont lieu en fin de journée et attirent pas mal de monde. C'est
une bonne chose qu'il nous ait choisi. Cela veut dire qu'on ne s'est pas trompé dans
notre démarche." Le 26 février dernier, date anniversaire de la naissance de
Victor Hugo, la salle du Soufflot Café était entièrement dédiée à l'auteur des
Misérables.
Le logo du Soufflot Café, repris sur les murs de l'établissement.
Terrasse
Les premiers rayons de soleil, qui ont réchauffé la capitale à cette période, ont
éclairé également le nouvel aménagement de la terrasse couverte du Soufflot Café.
L'endroit, définitivement rajeuni, conserve toutefois une politique de prix sage et des
prestations adaptées au pouvoir d'achat des étudiants. "Nous passons à midi
beaucoup de salades, de sandwiches, de croques...", explique Michel Portier. Au
programme : des croque-monsieur, croque-poulet, croque-pays (de 5,03 à 7,62 e), des
salades niçoise, norvégienne, mexicaine, fromage (de 5,49 à 8,23 e). Mais aussi de
grandes 'planches' auvergnate, océane, du boucher et des plats classiques de brasserie.
Autre atout du Soufflot Café : la régularité et la qualité des produits utilisés.
La stratégie de Michel Portier et de son associé, Dominique Moinaux, fait aussi mouche
dans un autre établissement, Le Pasteur, situé près de l'Institut Pasteur. Récemment
rénové, le décor fait la part belle aux plantes médicinales. Une visite s'impose. n zzz24
Soufflot Café 16, rue Soufflot 75005 Paris Tél. : 01 43 26 57 56 |
Article précédent - Article suivant
Vos commentaires : cliquez sur le Forum de L'Hôtellerie
Rechercher un article : Cliquez ici
L'Hôtellerie n° 2767 Magazine 2 Mai 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE