de février 2004 |
DÉCOR |
Il faut peu de temps pour humer la douce ordonnance du Château de Mirambeau, et s'y sentir accueilli comme en visite chez des amis de goût, retirés des tumultes de la ville. Sans proposer une image surannée, mais au contraire fraîche, les décorateurs ont su donner à cet établissement l'âme d'une maison de famille authentique. Visite.
Cécile Junod
Le Château de Mirambeau et son parc enchanteur au calme provincial.
Cet hiver 2002, lorsque
Roberto Polito et son épouse, propriétaires de plusieurs hôtels en Italie, séjournent
à la Villa Gallici à Aix-en-Provence, c'est le coup de foudre pour cet établissement
décoré par Daniel Jouve, Gil d'Ez et Charles Montemarco. Le trio d'artistes-
décorateurs, qui compte à son palmarès plusieurs réalisations très personnelles,
possédait cet hôtel depuis déjà une dizaine d'années et n'avaient nullement
l'intention de s'en séparer, à moins de le laisser aux bons soins d'amoureux du lieu qui
le conserveraient sans le dénaturer. Amateurs d'art, d'antiquités et de raffinement, les
Polito sont de ceux-là. L'affaire se conclut donc, mais à une condition : que les
décorateurs acceptent de créer une atmosphère aussi savoureuse que celle de la Villa
Gallici, dans un autre établissement que les Polito venaient d'acquérir : le Château de
Mirambeau, en Charente-Maritime.
C'est donc au prix de 3,8 Me que cet austère et poussiéreux château de campagne du
XVIIe siècle se transforma en bel hôtel de luxe qui comptera à la fin de ses
transformations 35 chambres. Les décorateurs se sont attachés à faire triompher
l'élégance et la gaieté en imaginant une vaste maison de famille, dans un esprit du
XVIIIe et du XIXe siècles. Le lieu se serait doucement patiné avec le temps et enrichi
d'objets, souvenirs de Chine, d'Asie, d'Orient ou de voyages en Europe.
Dotée d'un joli bureau et de deux confortables bergères, l'entrée est accueillante.
Elle se situe sous le grand escalier de bois sculpté menant aux étages. Une tapisserie
d'Aubusson invite au chemin des chambres. Les hauts et beaux volumes du salon sont
encadrés d'un bois sombre qui contraste avec la soie rayée jaune et blanc tendue sur les
murs. De grandes fenêtres et deux alcôves de belle hauteur ouvrent sur le jardin. Une
vaste cheminée à haut trumeau sculpté réchauffe la pièce l'hiver. Le plafond est
patiné à la feuille d'or, et retient un monumental lustre en cristal de Baccarat.
Plusieurs bergères retapissées dans divers coloris et motifs partagent l'espace avec des
guéridons et une exubérante console baroque.
Des tables de différents niveaux pour se restaurer à sa
façon
Dans un esprit printanier, une enfilade de deux salons séparés par un large couloir sert
de restaurant. Une soie précieuse aux motifs fleuris est tendue aux murs, des boiseries
jusqu'aux corniches en stuc patinées dans un effet bronze pistache. Les couleurs sont
très fraîches : ivoire, vert d'eau, rose... De grands miroirs anciens travaillés
s'accrochent sur toute la hauteur des pans de mur. Posées dessus, des frises peintes à
la feuille d'or. D'une capacité de 60 couverts, la salle à manger est meublée de tables
de différents niveaux et de diverses tailles afin que chacun puisse consommer un repas à
sa façon. D'ailleurs, l'une des caractéristiques du Château de Mirambeau, c'est que
l'on peut prendre une consommation dans n'importe quelle pièce commune : grand salon,
bibliothèque, cognathèque, terrasse ou autres. Ce pour renouer avec un usage du XVIIIe
siècle où aucun lieu n'était réellement prédestiné aux repas. Ceux-ci pouvaient
être pris partout.
Espace voûté aux murs en pierres, le fumoir est également baptisé cognathèque. On y
sert les breuvages des meilleures maisons de cognac voisines : Camus, Hennessy, Martell,
Otard, Rémy Martin... ainsi que d'autres alcools. Le lieu offre également une cave à
cigares.
Le salon. Ses hauts volumes s'encadrent d'un bois sombre qui contraste avec les
soieries tendues.
Des kilomètres de tissus réédités spécialement
Tout participe à la création d'une atmosphère hors du temps et pourtant très vivante.
A commencer par les kilomètres de tissus fabriqués en Italie, France et Grande-Bretagne,
qui habillent chaleureusement, de bas en haut, toute la maison : des murs aux fenêtres,
en passant par les ciels de lit, les baldaquins et les bergères... Canovas, Braquenié,
Burger, Nobilis, Rubelli, Prelle, Frey, Colony, Comoglio... ont mis tout leur art dans la
réédition de textiles du XVIIIe, d'après des documents anciens. La modernité vient en
partie du mélange osé, mais très sûr, des tissus et de l'audacieuse absence de
coordonnés. Les décorateurs se sont amusés avec les étoffes et les coloris avec
beaucoup de fantaisie : chaque chambre est unique sur un thème ou une couleur différente
(bucolique, chinoise, orientale...). Et si certaines restent sages (toile de Jouy, thème
papillons ou encore la réédition du tissu 'Galopin'), d'autres se risquent à des motifs
plus denses de bouquets encadrés de losanges, dans des tonalités intenses. Claires ou
plus sombres, toutes arborent de voluptueuses étoffes d'une grande richesse. Les
fenêtres se drapent de rideaux et de sous-rideaux en soie, velours de soie et tissus
brochés doublés. Derrière un tissu à dessins anciens, soutenu par un jeu d'embrasses
et de passementerie, se trouve une doublure à rayures bicolores d'allure plus
contemporaine, qui rajeunit et dynamise ce bel ensemble. <
Château
de Mirambeau 1, avenue Comtes Duchatel 17150 Mirambeau Tél. : 05 46 04 91 20 |
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Les grandes lignes de la déco a Esprit XVIIIe et XIXe siècles a Des rééditions de meubles anciens dans tous les coins et recoins a Une présence très forte de voluptueuses étoffes non coordonnées, mariées avec audace et fantaisie a Un grand mélange de thèmes décoratifs pour casser tout risque de monotonie a De nombreux portraits de famille et objets chinés en France et en Italie pour créer un climat délicieusement nostalgique, et apporter une touche personnelle et intimiste a Pléthore de petites lampes d'appoint aux abat-jour plissés et doublés d'or pour adoucir l'éclairage a Au sol, des parquets travaillés, des tapis précieux et des moquettes épaisses à grands ramages très meublantes a Et partout des brassées de fleurs champêtres |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2858 Magazine 5 Février 2004 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE