C’est en 2012 que tout a changé pour Robin Sheppard, cofondateur et président du groupe hôtelier britannique Bespoke Hotels. Temporairement paralysé, il prend soudain conscience de la difficulté de voyager en fauteuil roulant, les hôtels étant (très) peu souvent adaptés. Une fois rétabli, il co-crée le Blue Badge Access Award, une compétition récompensant les initiatives combinant accessibilité et design dans l’hôtellerie.
Il s’attaque aussi à rendre son portefeuille hôtelier plus accessible. Dans ses établissements anciens, les choses avancent peu à peu ; dans les nouveaux en revanche, ils sont accessibles en tout point. “Notre dernier boutique-hôtel à Manchester, l’Hotel Brooklyn, dispose de 18 chambres conçues pour accueillir les personnes à mobilité réduite. Deux d’entre elles sont équipées de lève-personne, avec mécanisme pouvant être caché dans le plafond, pour ménager l’esthétique. Neuf chambres sont aptes à accueillir des personnes en fauteuil. Des chambres sont également prévues pour les accompagnants. Enfin, nous avons créé des suites accessibles. Quant au site internet de l’hôtel, il comporte un onglet dédié à l’accessibilité, où trouver des images détaillées et légendées, permettant au client de visualiser sa venue pièce par pièce.”
Donner des informations précises
Du côté d’Handiscover, un site de réservations répertoriant les hôtels accessibles, on retrouve un même souci de fournir au client un état des lieux le plus fiable possible. “Suite à une étude que nous avons menée, il apparaît que non seulement beaucoup de personnes à mobilité réduite ne sont pas satisfaites des hôtels où elles ont séjourné, mais qu’en plus, elles ont été confrontées à un vrai manque de communication en amont sur l’accessibilité des hôtels en question”, relate Sébastien Archambeaud, PDG d’Handiscover. D’où l’intérêt du site : “On y partage des données exactes. Nous ne sommes là ni pour noter, ni pour juger les hôtels ; mais pour donner une information précise.”
Son fils étant en fauteuil roulant, Sébastien Archambeaud sait de quoi il parle ; il a eu son lot de mauvaises surprises en voyage. En plus de la non-adéquation entre les données fournies et de l’état réel des lieux, il a pu constater que ”souvent, le personnel est dépassé. Ou bien, il n’ose pas toujours accepter une réservation de ce type, de peur de mal accueillir la personne, et de s’attirer ensuite une critique négative sur internet“, explique-t-il. “Il est donc important d’informer et d’éduquer le personnel. Voiturier, majordome, réceptionniste, serveur, femme de chambre : tous doivent penser aux détails. Ne pas accrocher le pommeau de douche trop haut, par exemple…”
Un business à part entière
Au nouvel hôtel The Londoner du groupe Edwardian Hotels, situé en plein Londres, on retrouve ce même effort d’inclusivité. Dix-huit chambres accessibles y allient l'infrastructure nécessaire et l'esthétique. Elles sont adaptées à différents types de handicap (troubles de la vue, de l’ouïe, etc.), d’où les murs aux couleurs contrastées, l’éclairage spécial et le design acoustique. Chaque étage de l’hôtel est aussi équipé de WC adaptées aux personnes handicapées, et un vestiaire dédié dispose d’un banc ajustable et d’un bassin. Enfin, le staff dans son ensemble a été formé à aider les personnes en situation de handicap.
Si la dimension humaine est essentielle, l’aspect économique n’est pas négligeable pour autant. Pour Sébastien Archambeaud, on peut tout à fait faire de ces chambres accessibles “un business, qui permettra d’attirer de gros événements, du type rencontres sportives. Il y a une clientèle bien réelle en attente de chambres accessibles. Quand on sait que presque 20 % de la population est concernée par le handicap et que ces personnes voyagent rarement seules, cela représente un vrai chiffre d’affaires - que l’on peut estimer entre 10 et 15 %.”
Publié par Anastasia CHELINI