Il n'a pas attendu 2015 pour fêter les vingt ans de L'Univers, l'une des références de Nice (1 étoile Michelin), posté sur la rive de la Coulée verte, le nouvel espace paysager de la ville. À 54 ans, Christian Plumail a fait le bilan de quarante ans de métier, jalonné de quelques temps forts : ouverture de son premier restaurant à vingt ans - L'Auberge de l'Esterel à Juan-les-Pins (06), très vite étoilée -, une étoile à L'Univers dès 1999, deux émissions de radio sur France Bleu Azur chaque matin, dont une sur les marchés de la région, un consulting en Turquie depuis dix ans dans une brasserie de luxe des rives du Bosphore…
"Je ne renie pas ce parcours, explique le chef niçois, mais je ne voulais pas faire la saison de trop, me lamenter sur la crise jusqu'à la fin de ma carrière et continuer à consacrer 10 % de mon temps à la cuisine avec plus de contraintes que de satisfactions : poids des charges, médiatisation, veille des réseaux sociaux, masse salariale équivalant à 50 % de mon chiffre d'affaires, plus quelques déboires juridiques et financiers… Aussi j'ai accepté l'offre d'un investisseur russe, déjà acquéreur de plusieurs restaurants de la ville et j'ai vendu les murs au moment où je souhaitais changer de vie professionnelle, travailler autrement, retrouver ma liberté et ma passion de toujours, la cuisine"."
Une table d'hôte au coeur de Nice
L'Univers, qui fermera le 18 septembre, a employé jusqu'à 17 personnes et réalise 1,3 M€ de chiffre d'affaires HT, et sert 40 à 50 couverts midi et soir en moyenne. Mais après avoir investi 400 000 € en 2012 pour rénover la salle, Christian Plumail ne veut pas surenchérir. "Je n'éprouvais plus de plaisir et mieux vaut arrêter avant que le vent ne tourne. Le 28 septembre à Paris, je rendrai symboliquement l'étoile au Michelin, expliquerai ma démarche et remercierai le guide pour sa confiance. En décembre, avec Betty, mon épouse, j'ouvrirai une table d'hôte dans mon appartement au premier étage, où je donnerai aussi des cours de cuisine. Je veux un lieu inédit, exclusif mais chaleureux, comme un atelier pour 8 à 10 personnes, où, trois à quatre fois par semaine, seul aux fourneaux, j'offrirai une vraie cuisine ménagère, choisirai mes hôtes et le thème du jour, avec un fil conducteur, le marché d'ici, et un impératif, maîtriser le temps et me recentrer sur mon métier."
Nice-Istanbul à vélo
Retrouver l'esprit du marché sans la pression du résultat est la feuille de route de ce triathlonien au grand coeur qu'une épreuve a frappé en 2006, une spondylarthrite ankylosante touchant le bassin et la colonne vertébrale, pouvant entraîner une paralysie totale. "Je suis encore en rémission mais j'ai vaincu la maladie grâce au sport. Je m'entraîne quotidiennement et je participerai à l'Iron man de Nice en 2015 avant de réaliser mon grand projet : relier Nice et Istanbul à vélo. Seul et à ma manière, en cuisinant à chaque étape, dans un village, un restaurant, une école ou chez l'habitant et en recueillant des fonds pour aider apprentis et jeunes cuisiniers avec mon association Vira la Roda. J'ai toujours le feu sacré, celui que m'a transmis Bruno Cirino, grand cuisinier, à l'égal d'un 3 étoiles. Je suis un artisan, j'aime former et transmettre et j'ai désormais le temps pour aider Cyrille Billa, mon second depuis quinze ans, à créer son restaurant à Nice. Mon enthousiasme est intact et l'aventure continue !"
Publié par Jacques GANTIÉ