"Nous n'y serions sûrement jamais arrivés sans acharnement ni accompagnement professionnel", avoue Sandra Brenn, ex-assistante de direction dans une résidence hôtelière, aujourd'hui heureuse propriétaire, avec son époux Jacky, d'un hôtel-restaurant à Aurillac (15). La reconversion du couple était loin d'être gagnée, en raison d'un profil de primo-accédant et un apport financier réduit et atypique. Portant, se mettre à son compte et reprendre une affaire dans le secteur de l'hôtellerie-restauration, c'était un rêve qu'elle et son mari, responsable vidéo-sécurité, tous deux installés à Collonges (01), mûrissaient déjà depuis une dizaine d'années.
"Au départ, on rêvait d'un hôtel-bureau sur la côte d'Azur. Quand on a vu les prix de vente, on a vite déchanté", explique cette quadragénaire originaire d'Alsace. Le couple recentre alors ses recherches vers des régions moins prisées. Ils épluchent les annonces, interrogent des professionnels en activité. "C'est en écoutant les avis des personnes rencontrés que nous avons pris conscience que l'activité de restauration n'avait pas que des inconvénients. Nous avons notamment été sensibles à l'argument selon lequel les recettes de l'activité de restauration pourraient compenser les pertes éventuelles des premiers mois d'exploitation de l'hôtel."
Coup de coeur
Les entrepreneurs réorientent leurs recherches et les élargissent aux hôtels-restaurants. Laurent Maury, consultant du cabinet Michel Simond du Cantal, qui leur a présenté l'Hôtel du Palais, se souvient : "Nous avions sélectionné quelques établissements en zone rurale. Mais, étrangers à la région et avec un enfant scolarisé, les époux Brenn ont réalisé qu'une installation en ville serait plus facile au quotidien." Cet hôtel-restaurant 2 étoiles situé au centre d'Aurillac avait la particularité d'être dirigé par une figure locale à la personnalité charismatique. "C'était l'un des points faibles de l'affaire et cela aurait pu les effrayer", complète le consultant. Mais un coup de coeur des acquéreurs pour l'établissement, mais aussi du vendeur pour le couple de Collonges, l'a emporté. "Le fait que le vendeur nous ait appréciés dès le départ nous a beaucoup aidés", confie Sandra.
Il faut dire que le projet du couple présentait deux points noirs : un apport d'un faible montant constitué uniquement de l'Arce* et une affaire au bilan comptable déficitaire. "L'assistance du cabinet Michel Simond lors de la recherche du crédit a été primordiale. Nous habitions à plus de 400 km d'Aurillac. Il nous était difficile de nous déplacer pour des rendez-vous. Notre agent de recherche nous a présenté des cabinets d'experts-comptables pour constituer notre plan prévisionnel. Il nous a également aidés à monter notre plan de financement, a introduit notre dossier auprès des agences bancaires locales. Nous avons gagné beaucoup de temps", raconte Sandra Brenn.
Une seule banque retient le dossier
Au final, sur six banques consultées, deux reçoivent les entrepreneurs et une seule se montre confiante. Confiante oui, mais prudente. L'établissement bancaire exige notamment des jeunes repreneurs la création immédiate de la société, la mise en place d'une trésorerie de 15 000 € et l'attestation de Pôle emploi certifiant du versement de l'Arce (qui constitue l'apport des emprunteurs). "Nous n'avions aucun fonds pour composer notre trésorerie mais dès la signature du compromis, le cédant avait accepté que je travaille dans l'établissement. Cela nous a non seulement permis de nous familiariser avec l'affaire et son environnement mais nous a aussi servi à épargner. Enfin, cela a certainement contribué, auprès de la banque, des fournisseurs et du personnel en place, à asseoir la crédibilité de notre projet", se souvient la jeune hôtelière.
"Il est rare que les cédants acceptent d'accompagner les acquéreurs pendant aussi longtemps. Sur ce dossier, la collaboration entre cédants et acquéreurs a été exceptionnellement bonne", avoue Laurent Maury. Cette entente, nourrie par l'implication quotidienne de Sandra pendant les mois précédant la cession, permettra aussi aux repreneurs d'obtenir du cédant d'autres concessions, comme, par exemple, un crédit-vendeur. Ce prêt leur a permis notamment de diminuer le montant emprunté à la banque. "L'apport des époux Brenn était non seulement atypique [car constitué en partie de l'Arce, NDLR] mais aussi plus faible que la moyenne pratiquée en matière de crédit professionnel. Le crédit-vendeur était donc particulièrement bienvenu", explique l'agent Michel Simond.
Parallèlement, ils décrochent une aide financière départementale et négocient un prêt brasseur. C'est finalement un an après la première visite, et plus de six mois après la signature du compromis, que la cession de l'hôtel-restaurant a été officialisée. Les époux Brenn sont aujourd'hui à la tête d'un établissement de 19 chambres et 80 couverts. "Mon expérience d'assistante de direction dans différentes résidences hôtelières m'est particulièrement utile pour la gestion courante. Quant à mon mari, il se découvre une passion pour la cuisine, s'enthousiasme Sandra Brenn. Bien sûr, nous comptons fidéliser la clientèle existante et le personnel en place, mais nous espérons aussi développer progressivement l'activité hôtelière sur le segment des courts séjours", planifie la nouvelle gérante.
Publié par Tiphaine BEAUSSERON