du 28 avril 2005 |
L'ÉVÉNEMENT |
BAISSE DE LA TVA EN RESTAURATION
C'EST PAS ENCORE GAGNÉ
Si l'échéance du 31 décembre 2005 arrive à grands pas, la route des négociations pour parvenir à un accord européen en matière de taux de TVA réduit est encore longue et semée d'embûches. Jacques Borel, président du Club TVA, n'a pas fini de voyager pour convaincre les 24 partenaires de la France.
Les taux de TVA applicables dans la Communauté
européenne sont à l'heure actuelle très disparates et se caractérisent par une grande
complexité, alors que les règles de base sont pourtant simples : un taux normal qui doit
être fixé au minimum à 15 % et qui s'applique en principe aux livraisons de biens et
aux prestations de services soumises à la TVA. Les États membres ont la faculté
d'appliquer un ou deux taux réduits de TVA avec un minimum fixé à 5 %, mais uniquement
pour les biens et les services repris dans une annexe H, qui énumère limitativement les
biens et services qui peuvent être soumis à un taux de TVA réduit.
Toutefois, ces règles simples font l'objet de
nombreuses dérogations, qui ont été accordées à certains États membres - parfois
pour une majorité d'entre eux, dans le cadre de la négociation de la directive de 1992
ou dans les traités d'adhésion - mais qui sont refusées à d'autres.
En outre, une directive européenne de 1999 a autorisé l'application d'un taux de TVA
réduit pour certains services à forte densité de main-d'oeuvre, c'est-à-dire pour les
5 secteurs suivants : petits services de réparation (bicyclettes, chaussures et articles
de cuir, vêtements et linge de maison), rénovations et réparations de logements
privés, lavage de vitres, soins à domicile et coiffure. Ces activités ont alors été
regroupées dans ce que l'on appelle 'l'annexe K'. Prévue pour une période initiale de 3
ans afin d'évaluer les effets d'une baisse de TVA en termes de créations d'emploi et de
lutte contre le travail au noir, l'expérience sera finalement prolongée plusieurs fois
dans l'attente d'une proposition plus générale concernant les taux réduits de TVA.
Cette annexe K doit prendre fin le 31 décembre 2005 mais, depuis l'entrée des 10
nouveaux États membres dans la Communauté
européenne en juin 2004, la réglementation relative aux taux de TVA réduits ne
constituait pas un dossier prioritaire pour les instances européennes et ce, malgré la
date butoir du 31 décembre de cette année. Jusqu'à la présidence luxembourgeoise : en
effet, du 1er janvier au 30 juin 2005, la présidence du Conseil européen des
chefs d'État est assurée par Jean-Claude Juncker qui a décidé de prendre ce dossier à
bras-le-corps. Position partagée par le futur président de l'Union pour le second
semestre de l'année, Gordon Brown. Tous deux ont fait part de leur volonté de débloquer
le dossier de l'extension de l'annexe H.
Vers
un compromis
Depuis sa prise de fonctions au
début de l'année, Jean-Claude Juncker a organisé plus de 24 réunions bilatérales sur
ce dossier afin de connaître la position de chacun. À l'issue de ces réunions,
Jean-Claude Juncker a rédigé un projet de compromis qu'il a transmis aux différentes
délégations de Bruxelles et à tous les gouvernements. Pour Jacques Borel, le grand
mérite de Jean-Claude Juncker est d'avoir mis sur table un projet écrit qui permette à
chacun de réfléchir, de discuter, de modifier pour permettre de décider. Ce compromis
est un point d'équilibre entre les initiatives de la Commission, les demandes
supplémentaires des États membres et les exigences d'équivalence de traitement par les
nouveaux États membres.
Dans son projet, le président actuel d'Ecofin propose de résoudre les problèmes les
plus urgents de l'annexe K, telles la modernisation des logements et l'assistance à
domicile, en les intégrant dans l'annexe H. Il prévoit aussi la création d'un système
plus souple qui permettrait aux États membres qui en feront la demande avant le 31
décembre 2005 d'appliquer un taux réduit de TVA pendant une période de 10 ans pour le
secteur de la restauration, ainsi que pour les petits services de réparation, lavage de
vitres, nettoyage de logement privé, coiffure. Il propose de maintenir le taux normal à
15 % pendant les 10 prochaines années, ce taux venant à échéance le 31 décembre 2005.
Pour analyser l'impact des ces mesures, il est prévu que la Commission remette un rapport
en décembre 2010 et 2015.
Ce projet sera soumis à la réunion informelle
d'Ecofin le jeudi 12 mai prochain, mais aucune décision ne pourra être prise. Chacun
pourra notifier sa position et probablement déterminer la base d'un compromis n° 2 qui
pourrait faire l'objet d'une adoption lors des prochains conseils d'Ecofin fixés les 7
juin, 13 septembre et 12 octobre 2005.
Le
'oui mais' de l'Allemagne
Le 18 février 2004, le chancelier
Gerhard Schröder avait donné son accord au président Jacques Chirac pour un vote en
faveur de la baisse de la TVA pour la restauration française. Mais, selon Jacques Borel,
il semblerait que, dans l'esprit des Allemands, le taux réduit de TVA ne s'appliquerait
que pour la restauration française, ce qui n'est pas possible au vu des règles
européennes. Il est impossible que la France ait droit à un avantage à l'exclusion des
autres pays de la Communauté. En outre, dans son projet de directive du 23 juillet 2003,
la Commission avait proposé d'inclure la restauration dans la liste des activités
pouvant bénéficier d'un taux de TVA réduit, mais elle avait aussi ajouté 4 autres
secteurs d'activité : la modernisation des logements, l'assistance à domicile, les
fleurs coupées et la location de compteurs de gaz et d'électricité. En outre, une
majorité de pays de l'Union européenne, à l'instar de la Commission, souhaite que les 5
secteurs prévus soient retenus, et non pas le seul secteur de la restauration.
Cette position a été confirmée vendredi 22 avril dernier
lors de la réunion qui s'est tenue au ministère des Finances allemand, à Berlin, avec
Dehoga (Deutscher Hotel und GaststättenVerband) et le Club TVA de Jacques Borel, lié par
un contrat de collaboration avec cette association. Un haut fonctionnaire du ministère a
rappelé la position très ferme de son gouvernement : l'Allemagne ne tolérera aucune
nouvelle exception en matière de taux de TVA réduit, sauf pour la restauration
française. Le compromis de Jean-Claude Juncker est inacceptable pour l'Allemagne.
Pascale Carbillet zzz66f
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L'Hôtellerie Restauration n° 2922 Hebdo 28 avril 2005 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE