du 6 septembre 2007 |
HÔTELS |
ENTRETIEN AVEC GILLES PÉLISSON, DIRECTEUR GÉNÉRAL ET ADMINISTRATEUR D'ACCOR
"SOFITEL SERA LE PORTE-DRA PEAU D'UNE HÔTELLERIE DE LUXE 'À LA FRANÇAISE', PULLMAN NOTRE FER DE LANCE SUR LE HAUT DE GAMME"
Gilles Pélisson suit sa ligne stratégique sans faillir, utilisant au mieux le temps qui lui est imparti. Après avoir recentré la compagnie sur ses deux grands métiers - l'hôtellerie et les services - depuis début 2006, il a non seulement accéléré la politique d'externalisation ou de cession de ses actifs immobiliers, mais également engagé la revue approfondie de ses marques hôtelières. Une stratégie qui porte d'ores et déjà ses fruits au niveau financier, tandis que le portefeuille d'enseignes du groupe s'étoffe : All Seasons, Pullman et le label Mercure Gallery. Le tout mise sur la complémentarité des produits face à une clientèle aux attentes de plus en plus pointues. Explications détaillées.
Propos recueillis par Claire Cosson
L'Hôtellerie Restauration
:
Alors finalement, il n'y a pas que le segment économique qui vous intéresse
?
Gilles Pélisson
:
Soyons clairs : notre premier objectif vise à devenir le leader mondial
de l'hôtellerie économique et milieu de gamme sur les cinq continents.
Compte tenu de notre taille actuelle sur ces créneaux, nous avons tous les
moyens nécessaires pour y parvenir. D'autant plus rapidement que nous avons
étoffé notre portefeuille de marques économiques (Ibis, Formule 1
et Etap Hotel) avec All Seasons, positionné sur le 2 étoiles non standardisé.
Ce choix stratégique ne
nous empêche pas de nourrir d'autres ambitions. Nous voulons aussi être
un acteur majeur dans le luxe et l'hôtellerie haut de gamme, sachant que sur
ces segments, notre développement s'effectue avant tout en mandat de gestion.
Après dix-huit mois de réflexion et de travail intense, nous avons remis
en ordre de bataille nos enseignes dites haut de gamme. Sofitel va devenir le véritable
porte-drapeau d'une hôtellerie de luxe 'à la française'. Parallèlement,
Pullman sera notre fer de lance sur le haut de gamme, et nous créons le label
Mercure Gallery regroupant notamment des hôtels 'boutique' haut de gamme.
Avant d'entrer dans le vif du sujet de l'avenir
du luxe chez Accor, pouvez-vous nous donner votre analyse quant à
All Seasons ?
Le lancement de All Seasons - marque dont nous
étions déjà propriétaires et qui est présente dans la
zone Asie-Pacifique - est issu d'un certain nombre de constats. Produit extrêmement
performant, Ibis a connu ces dernières années un essor phénoménal
avec quelque 750 établissements dans le monde dont près de 500 en Europe.
Dans les pays matures tels la France, la Grande-Bretagne, la Belgique, la Suisse
ou bien encore les Pays-Bas, le développement de cette chaîne 2 étoiles
devient moins facile.
Les solutions qui s'offraient à
nous étaient les suivantes : diluer la cohérence du réseau en faisant
des compromis sur les critères d'adhésion (ce qui revenait à perdre
ce pour quoi nos aînés s'étaient battus) ou s'interdire de grandir
au profit de nos concurrents. En examinant dans le détail le marché européen
du 2 étoiles, nous avons constaté qu'il y avait encore énormément
d'hôtels indépendants à séduire, et une place à saisir.
Par ailleurs, si l'on se positionne du côté client, il nous a semblé
que lorsqu'il y avait dans une même ville 2 ou 3 Ibis, celui-ci pouvait aspirer
à autre chose.
Forts de
ces éléments, nous avons choisi de lancer All Seasons, initialement en
France, mais avec des ambitions paneuropéennes tablant sur 10 000 chambres
d'ici à 2010. Aujourd'hui, 3 concepts-room ont été dessinés
par des designers. Le 1er All Seasons français ouvrira en septembre
à Évry (ancien Mercure Cathédrale). D'autres suivront comme le
Mercure Bercy ou bien encore le Mercure de Mérignac. 14 filiales Accor (Ibis
et Mercure) seront converties d'ici à juin 2008. Nous attaquerons ensuite
l'Allemagne et le Royaume-Uni. Puis, viendront la Belgique et l'Italie en 2009.
Ce qui est intéressant avec All Seasons,
c'est que pour la première fois dans l'histoire d'Accor, le moteur de croissance
d'une chaîne est la franchise. À ce jour d'ailleurs, 31 contrats de
franchise sont engagés.
Passons au segment haut de gamme. Pourquoi relancer Pullman,
propriété à l'origine de la Compagnie Internationale des Wagons-Lits
et du Tourisme, tombée dans votre escarcelle en 1991 ainsi que les autres marques
telles Altea, Arcade et PLM Azur ?
La relance de la marque Pullman résulte du
repositionnement de Sofitel sur le segment luxe. Dans ces conditions, il nous fallait
disposer d'une marque 4 étoiles, à forte personnalité, de grande
capacité, spécialiste du marché Mice (Meeting, Incentive, Convention
et Exhibition) et implantée dans toutes les grandes villes du monde. Une marque
capable de rivaliser avec Hilton, Holiday Inn ou bien encore Crowne Plaza.
Le choix de Pullman s'est rapidement
imposé. D'autant plus que nous disposions de ce nom qui bénéficie,
aujourd'hui encore, d'une image évoquant le voyage et le confort. Nous estimons
le potentiel de Pullman à quelque 300 hôtels d'ici à 2015. Un
développement rapide qui se fera principalement par contrats de gestion et
franchise.
Pullman intégrera dans un premier
temps 45 établissements Sofitel ou Grand Mercure (voués à disparaître)
dans 23 pays. En France, où le réseau comptera rapidement une dizaine
d'unités, les conversions du Sofitel Sèvres, Versailles, Grande Arche
La Défense et Roissy sont d'ores et déjà programmées. Idem
pour les Grand Mercure de Dortmund, Shanghai et le Sofitel Timi Ama en Sardaigne.
Des
résultats semestriels meilleurs que prévus
Tous
les indicateurs sont au vert fluo chez Accor. Les résultats du premier semestre
ont dépassé les attentes des analystes financiers avec un résultat
avant impôt et éléments non récurrents de 379 ME ; en hausse
de 31,5 % à périmètre comparable. En incluant les plus-values
de cessions - Go Voyages, ventes d'immobiliers et provision pour dépréciation
de 173 ME relative à Red Roof - le résultat net grimpe de 147 % à
596 ME. De quoi satisfaire les actionnaires et le patron du groupe. "Il faut
notamment souligner la progression des marges dans chacun de nos métiers, a
indiqué Gilles Pélisson. Et d'ajouter, celle-ci atteint 27,3 % du chiffre
d'affaires, soit un point de base supplémentaire." Une amélioration
qui provient de plusieurs facteurs dont "l'activité soutenue des services",
la remontée du cycle hôtelier en Europe et l'application du nouveau modèle
économique hôtelier. |
Quelle raison vous pousse à abandonner la
marque Grand Hotel Mercure ?
Dans le cadre du repositionnement de l'enseigne
Mercure et du lancement de Pullman, cette appellation devenait inutile, voire brouillait
l'image auprès des clients. Nous clarifions donc la donne au sein de Mercure
en conservant un seul label : Mercure Gallery. Celui-ci rassemblera sous ses couleurs
des hôtels 'boutique', haut de gamme, à la personnalité marquée
et de petite capacité. Ce label se déclinera partout dans le monde. Pour
vous donner une idée du type d'établissements qui seront baptisés
Mercure Gallery : le Grand Hôtel Cabourg, le Sofitel de Genève, le Mercure
Marseille Beauvau…
Deux nouveaux logos à l'identité visuelle modernisée. |
Certains de vos concurrents ont souvent clamé
qu'Accor n'avait jamais véritablement eu une culture du luxe. Le nouveau
visage de Sofitel va-t-il leur prouver le contraire ?
C'est certain ! Le déploiement du nouveau
visage de Sofitel en tant que véritable porte-drapeau d'une hôtellerie
de luxe à la française - qui devrait prendre entre deux ou trois ans
- va nous permettre de rivaliser sérieusement avec Hyatt, Westin ou InterContinental.
Dans un secteur en pleine croissance
marqué par l'apparition de nouvelles clientèles à fort pouvoir
d'achat (Chine, font>Inde, Brésil…),
Accor se devait d'ancrer Sofitel sur le créneau du luxe. D'autant que nous
disposons d'armes efficaces en la matière, à l'instar de Lenôtre
dont le restaurant Le Pré Catelan a décroché la troisième étoile.
À noter du reste que notre nouveau Sofitel à Pékin bénéficie
d'un restaurant baptisé Le Pré Lenôtre.
Pour réussir ce repositionnement, un certain
nombre d'établissements Sofitel (40) va sortir du périmètre actuel,
mais la chaîne devrait compter environ 170 établissements à l'horizon
2010 dont 8 en France. La nouvelle identité visuelle sera lancée en octobre
prochain. De nouveaux standards de qualité ont également été
définis. À terme, deux labels seront développés aux côtés
du coeur de la marque. Le premier rassemblera les fleurons historiques du réseau,
comme le Winter Palace et le Old Cataract en Égypte, le Palais Jamaï
à Fès au Maroc, le Grand à Amsterdam… Le second regroupera
des unités plus 'trendy' - So by Sofitel - incarnant davantage des lieux branchés.
Cette nouvelle stratégie haut de gamme s'accompagne-t-elle
d'une nouvelle organisation ?
Pour réussir le repositionnement de Sofitel
et créer une nouvelle culture du luxe à l'intérieur d'Accor, nous
avons décidé de constituer un business unit à part entière
qui pourra s'appuyer évidemment sur les 8 plates-formes communes à Accor.
Cette structure de direction sera créée sur les cinq continents et pilotée
par Yann Caillère. Un patron Sofitel Monde
- en provenance de l'univers du luxe -, sera également nommé.
Création d'une direction générale
de la distribution Selon nos informations, Accor vient de créer une direction générale de la distribution. Cette entité regroupera les grandes fonctions liées à la vente et à la distribution des activités hôtelières. C'est Jean-Luc Chrétien - loin d'être un inconnu chez Accor où il travailla de 1986 à 1992 - qui dirigera cette nouvelle direction. Ancien collaborateur de Disneyland Paris, de Pierre & Vacances et de la SNCF, Jean-Luc Chrétien sera entouré de : Christine Pouletty (réservations et revenue management), Denis Sappey (ventes internationales), Paul Andrei (centre d'appels), Paulo Salvador (fidélisation et web) et Jean-Louis Dubrule (partenariats distribution). |
Pourriez-vous encore élargir votre portefeuille
de marques dans l'avenir ?
Je crois que le chantier engagé avec ses
trois marques va occuper nos collaborateurs pour un bon moment.
Il y a toutefois certaines de vos autres marques
qui doivent évoluer significativement dans l'avenir ?
C'est exact ! Rien n'est jamais définitivement
acquis. S'agissant de Formule 1, une nouvelle chambre a été validée
et le déploiement va débuter dès la fin septembre. D'ici à
vingt mois, la rénovation du réseau français sera terminée.
Notre objectif est de rester le low cost du secteur.
Pour Motel 6 aux États-Unis,
nous travaillons sur un nouveau prototype de chambre et d'hôtel. Une nouvelle
chambre est également en phase de finalisation pour Ibis.
Dès 2008, nous allons sortir une
nouvelle chambre pour Etap Hotel. La seconde génération des Suitehotel
est en marche. Quant à Novotel, notre chambre est actuellement en cours de
test. zzz36v
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L'Hôtellerie Restauration n° 3045 Hebdo 6 septembre 2007 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE