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Marketing & Nouvelles technologies
Les relations entre hôteliers et agences de voyages en ligne (OTA) sont de plus en plus tendues. Et pour contrer l’envahissement de
ces OTA, certains professionnels tentent le tout pour le tout et ont décidé de récupérer leur clientèle en passant au-dessus des règles
imposées par le contrat.
Une question ?
Blog des Experts ‘Idées simples pour doper les recettes de
votre restaurant’ sur
BERNARD
BOUTBOUL
Ces hôteliers qui
truquent le jeu de la distribution
L
es hébergeurs, dumoins ceux qui réalisent un gros
volume d’affaires par les agences de voyages en
ligne (OTA), ont peur de devenir dépendants. Ils
réalisent qu’ils sont en train de perdre le principal, c’est-
à-dire la relation avec leur clientèle. Il est normal d’avoir
ce sentiment et il faut encourager les professionnels
à mieux maîtriser les outils web pour gagner en
indépendance et mieux équilibrer la distribution. Il
n’est pas envisageable de se passer des OTA dans la
mesure où elles permettent, notamment aux hôteliers
indépendants, d’acquérir une clientèle qu’ils n’auraient
pas sans elles. Dans ce cas, il y a une vraie valeur ajoutée
à travers cette collaboration. Gagner en indépendance
n’est pas chose aisée, il faut actionner les bons leviers
webmarketing, se remettre en question, faire évoluer
son offre, son produit, c’est une stratégie à moyen et long
termes.
Certains se disent alors que le plus simple est de
récupérer le client qui a été envoyé par une OTA.
Rien de plus facile : tout le travail de communication,
de visibilité, de réassurance, de garantie a déjà été
effectué. La vente a même été réalisée, donc le client
est acquis. Ces hôteliers se permettent
alors de recontacter le client en direct et
de lui faire une contreproposition : s’il
annule sa réservation initiale pour une
faite en direct, l’établissement lui offre des
conditions plus favorables (surclassement,
petit déjeuner gratuit, réduction sur le
prix). Autant on ne peut qu’encourager les
hôteliers à différencier leurs offres pour
justement essayer d’être plus attractifs en
ligne, autant on ne peut que condamner
le fait de demander à un client d’annuler
sa réservation pour en passer une autre.
Le principal reproche fait à certaines OTA est ce qu’on
appelle le brandjacking, c’est-à-dire le fait d’acheter
le nom commercial de l’établissement dans Google,
souvent considéré comme du vol de clientèle. On ne peut
pas infliger aux OTA ce qu’on leur reproche, il y a un
problème de cohérence.
Un client pris en otage
Le client n’a pas à être pris en otage par l’une des parties.
Il est désagréable de se voir démarcher par un acteur
demandant de faire telle ou telle action pour bénéficier
de tel ou tel avantage. Quant au client qui appelle
l’établissement et qui se voit répondre que sa demande
n’est envisageable que s’il réserve en direct (sous-entendu :
annulez chez l’OTA et vous aurez ce que vous voulez),
que va-t-il penser de l’établissement ? On ne traite pas ses
clients selon la manière dont ils ont réservé. Et que dire au
client qui est fidèle à son OTA pour de multiples raisons ?
Outrepasser le contrat
La relation entre hébergeurs et OTA est encadrée par
un contrat, qui décrit les règles de collaboration et les
impératifs de chacun. Il y est souvent fait référence
à des conditions générales d’utilisation, le contrat ne
faisant lui-même que quelques lignes. Il est clairement
explicité dans ces documents que le client appartient
à l’OTA et non à l’hôtel, et que celui-ci s’interdit tout
contact à des fins de marketing direct (article 2.9 des
conditions de Booking.com, par exemple).
Lorsqu’un client annule auprès d’une OTA, la première
question qu’elle lui pose est souvent :
“Est-ce que
l’hôtelier vous a demandé d’annuler votre réservation ?”
Il y a donc un risque réel à voler le client d’une OTA.
Il n’y a pas de barème de pénalité, mais cela peut aller
de l’avertissement à l’arrêt immédiat et définitif de la
distribution en passant par la fermeture temporaire
des ventes. Les hébergeurs passent un contrat avec un
distributeur, le minimum est de le respecter, même
si on se rend compte après coup que le contrat est
déséquilibré. On ne peut pas, dans une collaboration,
ne prendre que ce qui nous intéresse.
P
aris regorge d’établissements de restauration en
tout genre, le développement et la création de
restaurants y étant plus importants que sur le reste
du territoire. De par son dynamisme et son brassage
culturel, la capitale est plus encline au fleurissement
de nouveaux concepts. L’opportunité est ainsi donnée
aux Parisiens de découvrir de nouvelles tendances
et d’être donc souvent des précurseurs en matière
de restauration. Depuis une dizaine d’années, de
nombreux blogs ont été créés.
On y décrit, analyse, commente les tables parisiennes
et conseille les internautes à la recherche d’un
restaurant. Professionnels ou anonymes, épicuriens
ou passionnés, ces blogueurs, dont certains sont très
influents, font et défont la réputation des restaurants.
VOS COMMENTAIRES SUR
MARIE
Depuis quand peut-on parler
de ‘voler des clients’ ? S’ils ne viennent
plus en direct chez les hôteliers, c’est
que les OTA, par des manœuvres
souvent loin de la légalité, se sont emparé des circuits
de distribution. Contrairement à l’idée reçue, les
OTAne font venir personne vers un hôtel. Ils
s’immiscent entre le client lambda qui doit se
déplacer vers un point P et les hôtels de la place.
Si les hôteliers en sont venus à ‘ne prendre que ce
qui les intéresse’, c’est tout simplement que les OTA
ont largement dépassé les limites. Comme afficher
qu’un hôtel est complet alors que des chambres
sont encore disponibles... Et que dire des conditions
coercitives appliquées à certains indépendants,
lesquelles les obligent à ‘remonter’ leur taux de
commission pour être visibles ou encore à leur
donner des allotements ? Ne demandons pas aux
hôteliers de respecter les OTAquand ces derniers
n’ont jamais respecté les hôteliers. Chacun ses
armes : n’oublions pas que si les OTApossèdent
l’e-visibilité, les hôteliers possèdent les hôtels.
Encore pour le moment...
Une question ?
Blog des Experts ‘Web marketing :
maîtrise commerciale et développement des ventes’
sur
THOMAS
YUNG
Les Parisiens,
des clients à part
Le mode de vie dans la capitale est différent des autres villes françaises. La population
vit à un autre rythme et consomme autrement.
Cela vaut également pour la restauration.
Paris capitale de la mode, mais aussi de la gastronomie
française, compte une part importante de personnes
‘branchées’ correspondant à la cible de ces blogueurs.
Ceux que l’on surnomme les ‘bobos’ seraient, paraît-il,
plus attentifs aux tendances et aux modes que le reste
de la population. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir
certains Parisiens faire la queue devant un nouveau
concept, qui aurait été désigné comme le restaurant
du moment, alors qu’ils sont d’ordinaire plutôt
impatients.
L’ouverture d’un nouveau concept à Paris - ici le premier Chipotle,
enmai 2012 - s’accompagne souvent de très longues files
d’attente.
Un conseil
Pour regagner en indépendance, la solution n’est
probablement pas de voler le client à l’OTA, mais
de faire un lourd et long travail sur son marketing :
prix, produit, communication et distribution.