
Dans le Finistère, le marché des fonds de commerce CHR souffre du marasme
économique et politique. Le point avec Philippe Raguénès, directeur des
agences Ouest Commerces.
PROPOS RECUEILLIS PAR TIPHAINE BEAUSSERON
Les bars-tabacs,
une valeur sûre malgré
les difficultés du secteur
D
ans le Finistère, le marché des
fonds de commerce CHR est
citadin à Brest et saisonnier
à Quimper. L’un comme l’autre
souffrent du marasme économique
et politique. Le point avec
Philippe
Raguénès
, directeur des agences
Ouest Commerces, implantées dans le
département depuis 1974.
L’Hôtellerie Restauration
:
Votre cabinet, spécialisé en cessions
de CHR, a développé une expertise
sur les bars-tabacs. Comment
ce segment se caractérise-t-il
aujourd’hui ?
Philippe Raguénès
:
Depuis plusieurs
années, ce secteur souffre d’une baisse
de chiffre d’affaires en raison des
politiques publiques de lutte contre le
tabagisme et la consommation excessive
d’alcool, et de l’apparition de la cigarette
électronique. Cependant, ce segment
représente un quart de nos affaires
en portefeuille. Nous le considérons
comme une valeur sûre dans le Finistère
où nous réalisons de belles ventes.
Comment expliquez-vous
ce paradoxe ?
C’est un secteur encore ouvert aux
primo-accédants car il ne nécessite
pas d’expérience professionnelle
particulière. La création de nouveaux
établissements est très encadrée par
la loi et limite la concurrence. Le côté
multi-produits - qui accompagne
l’exploitation du fonds quand il allie
avec le bar, PMU, Française des jeux
et presse - rassure les acquéreurs et les
banques car il diversifie la clientèle et
les sources de chiffre d’affaires [CA]
potentiel. D’ailleurs, l’activité bar est
devenue une condition indispensable
pour qu’une banque accepte de financer
une reprise. Cette activité a intérêt à
générer au moins 70 % du CA et le
fonds doit dégager un excédent brut
d’exploitation [EBE] minimum de
60 000 € pour être rentable. Lorsque
le fonds de bar-tabac est en perte de
vitesse, sa valorisation diminue en
conséquence et permet alors une reprise
à un prix très raisonnable, ouvrant ainsi
des perspectives de succession réussie
pour des professionnels du bar-tabac ou
des primo-accédants.
L’encadrement légal de l’activité ne
limite-t-il pas le nombre de cessions ?
Les changements de propriétaires sont
limités. Néanmoins, sur 520 tabacs
ou bars-tabacs dans le Finistère,
on estime le taux de rotation à
10 %, dont les rachats de fonds,
les mutations entre époux et les
fermetures définitives. La part des
rachats de fonds nous laisse de belles
opportunités de cessions. Notre
moyenne de prix de cession sur les
deux dernières années s’établit à
422 000 € pour un CA moyen de
294 000 € et un Perf [potentialité de
l’entreprise et rentabilité financière,
équivalent de l’EBE retraité, c’est-
à-dire EBE + économies réalisables
+ amortissement, NDLR] moyen
de 103 000 € soit un ratio de
4,1 fois le Perf, étant précisé que
des transactions de grosses affaires
réalisées en 2014 ont contribué au
niveau élevé de ces chiffres.
Quels sont les prix moyen de vente
des fonds de restauration ?
Nous sectorisons quatre catégories :
le bar-brasserie, le restaurant
traditionnel, la pizzéria-crêperie et la
vente à emporter-restauration rapide.
Sur les années 2013-2014, le prix de
vente moyen d’un fonds pour ce groupe
d’activité est de 271 000 € pour un
chiffre d’affaires moyen de 323 000 €
et un Perf moyen de 75 000 €, soit un
ratio de 3 fois le Perf. Un bar-brasserie
se vend en moyenne 80 % de son CA
HT, tandis que le restaurant-pizzéria
sera plutôt autour de 65 %. Concernant
les restaurants gastronomiques
- plus difficiles à estimer du fait de la
Philippe Raguénès
, directeur des agences Century 21
Ouest Commerces de Brest et Quimper.
6 UIQ
Fonds de commerce
suite page 62