L’article L141-1 du code de commerce obligeait, sous peine de nullité de la vente, à énoncer dans l’acte de cession un certain nombre d’informations : nom du précédent vendeur et prix d'acquisition, état des privilèges et nantissements, chiffre d’affaires et résultats d’exploitation réalisés durant les 3 exercices comptables précédents, date et durée du bail, nom et adresse du bailleur. La loi du 19 juillet 2019 dite de simplification, de clarification et d’actualisation du droit des sociétés (Soilihi) abroge purement et simplement cet article. “Sous prétexte de simplification, le législateur a supprimé un formalisme qui existait depuis 1935, sur lequel on avait du recul, qui servait de garde-fou juridique et qui n’empêchait en rien les transactions de fonds de commerce. Ceci ouvre la voie à de nouvelles possibilités de contestation et risque d’accentuer le fossé entre les parties dotées d’un conseil juridique expérimenté en la matière et les autres”, réagit maître Julien Ayoun, avocat au barreau de Marseille, spécialisé en droit des affaires et cession de fonds de commerce.
“Aucun avocat ne s’affranchira de faire apparaître ces informations”
“Ce n’est pas parce qu’un acte de cession sans ces mentions obligatoires n’est plus frappé de nullité qu’elles ne sont pas utiles et que l’on peut s’en passer”, prévient quant à elle Marie-Charlotte Touzet, avocat au barreau de Paris spécialisée en droit immobilier et commercial. En effet, le vendeur devra continuer à délivrer tous les éléments permettant à l’acquéreur d’avoir une image fidèle et complète du fonds sur la base de l’obligation générale d’information précontracuelle (art. L1112-1 du code civil).
“La suppression de la sanction de nullité conduira peut-être à alléger la précision des informations comptables dans certains cas, comme dans l’hypothèse de la vente d’une seule entité par un propriétaire de plusieurs établissements formant un groupe. Mais aucun avocat ne s’affranchira de faire apparaître les informations telles que listées par feu l’article L141-1, car elles sont essentielles pour sécuriser une vente de fonds de commerce”, reconnaît Alexandra Marinakis, avocat au barreau de Paris spécialisée en droit commercial et fonds de commerce. En effet, ces informations sont primordiales pour déterminer l’objet de la vente et son prix. “Se contenter de ne mentionner que celles-ci est largement insuffisant pour qu’un acte de vente soit valablement conclu. S’en passer pourrait engager la responsabilité de son rédacteur”, relève par ailleurs Grégory Cousin, président du Cabinet Cousin, spécialiste de la transaction de fonds de commerce CHR à Cherbourg.
Pour l’heure, donc, cette nouveauté juridique n’allégera ni les compromis ni les actes de vente. De plus, les informations listées par l’article L141-1 informent aussi sur la valeur du fonds. Or, quelle banque se risquera à financer la reprise d’un fonds de commerce si le compromis de vente ne mentionne plus les éléments justifiant de sa valeur ? Au final, acquéreurs et vendeurs devront veiller, plus que jamais, à se faire accompagner par un rédacteur compétent et spécialisé dans la cession de fonds de commerce.
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Publié par Tiphaine BEAUSSERON