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Jean-Michel Wilmotte: "L'hôtel est une poésie fonctionnelle"

Hôtellerie - mercredi 12 octobre 2011 16:15
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Il est des rencontres qui se méritent. Un rendez-vous avec Jean-Michel Wilmotte en fait partie. Voyageur invétéré, architecte internationalement reconnu, nommé récemment membre du jury de la distinction palace par Atout France, l'homme est peu disponible pour la presse. Son caractère introverti le place rarement sur le devant de la scène. Toutefois, il a été encensé à l'occasion de l'ouverture du Mandarin Oriental, pour l'architecture élégante du bâtiment et son jardin intérieur. Le célèbre architecte nous a fait part de sa conception de l'hôtellerie, et de ses projets.



L'Hôtellerie Restauration : Avec l'ouverture du Mandarin Oriental, vous êtes apparu comme l'un des grands architectes d'hôtels de ces dernières années. Pensez-vous poursuivre et vous affirmer sur ce créneau ?

Jean Michel Wilmotte : L'hôtellerie est un secteur qui nous intéresse. J'aime les hôtels. Ce sont des lieux de rencontres, de croisement, d'accueil mais aussi d'évasion et de dépaysement. Ils peuvent refléter l'humeur, satisfaire le besoin ou provoquer le rejet du visiteur qui s'y trouve. On apprécie d'autant plus une ville que l'on se sent bien dans l'hôtel où l'on est descendu. De la même façon, on peut passer un très mauvais séjour si l'on se sent mal dans un hôtel. Je pense que les hôtels doivent être à l'image du lieu où ils se trouvent.

Vous travaillez sur des projets très variés. Que trouvez-vous de différent dans la construction d'un hôtel ?
Ce sont des endroits où se marient la fonctionnalité et le rêve. Un hôtel est une poésie fonctionnelle. On est également dans un schéma cartésien car tout projet d'hôtel doit respecter un budget. Il faut donc jouer sur la qualité de l'espace, et faire en sorte que la fonctionnalité ne soit pas trop visible, tout en apportant une qualité de confort optimale. Les matières - en particulier le bois, la pierre, le métal, le verre, les textiles - jouent un rôle important.

 

Quels sont, parmi les hôtels que vous avez réalisés, ceux que vous aimez particulièrement ?

Nous ne sommes qu'au début de notre travail dans l'hôtellerie. Chaque projet est une histoire unique. La Réserve de Ramatuelle était un bâtiment existant dans un site intéressant. Nous avons décidé de garder une partie de l'architecture, et nous avons fait de notre mieux pour la sublimer et l'intégrer dans un paysage entièrement repensé. De nombreux murs et cloisons ont été abattus afin d'agrandir l'espace et libérer les vues.

Le Mandarin Oriental est tout à fait différent. Nous avons démoli deux bâtiments pour n'en construire qu'un, mais dégager ainsi un formidable espace vert intérieur, devenu le plus grand jardin d'hôtel à Paris.

 

Dans un hôtel, quels sont les éléments qui marquent votre différence ?

Quand il s'agit d'un hôtel urbain, nous travaillons beaucoup les façades car ce sont des éléments répétitifs. Il faut les rendre attrayantes. On essaye de trouver des astuces pour les animer. Tout est question de rapport entre le vide et le plein, un jeu de lumières et de proportions. Dans un hôtel avec un terrain hors contexte urbain, on va davantage travailler l'intégration au paysage.

 

Vous considérez-vous plutôt comme un architecte ou comme un architecte d'intérieur ?

Nous avons les deux activités et c'est ce que nous souhaitons continuer à développer. Au Mandarin Oriental nous n'étions chargés que de l'architecture. Nous avons également défini tous les espaces intérieurs, dont la décoration a été confiée à Sybille de Margerie et Patrick Jouin. Dans d'autres projets nous nous occupons de l'ensemble de la mission qui inclut l'architecture et l'architecture d'intérieur. Nous sommes structurés pour pouvoir réaliser la mission complète.

 

L'hôtellerie est sous l'influence de tendances. Les suivez-vous ?

Nous sommes hors tendances, nous créons nos propres tendances. Ce que nous privilégions, c'est l'intégration soit en milieu urbain soit dans un site naturel, mais toujours avec le souci de créer des événements uniques. Cela doit plaire car la Réserve à Ramatuelle est un hôtel qui ne désemplit pas. Dans la même veine, nous réalisons actuellement pour une petite chaîne, des hôtels totalement en unisson avec leur environnement.

Nous travaillons aussi sur deux projets à Courchevel dont l'un pour Four Seasons. Nous menons aussi d'autres études, pour des investisseurs privés, dans le sud de la France notamment.

Dans tous les cas, en ce qui concerne les équipements, nous privilégions la simplicité. Nous ne sommes pas des adeptes du technologique à outrance.

 

Vous semblez ne travailler que pour des hôtels 5 étoiles. Êtes-vous opposé aux hôtels de moindre catégorie ?

Absolument pas. D'ailleurs le luxe peut aussi exister dans des 2 étoiles, même avec des petites surfaces. Actuellement nous avons plusieurs projets, dont un à La Défense pour une chaîne scandinave. La contrainte financière y est très importante.

 

Vous avez participé à la rénovation de nombreux musées. Or on voit s'ouvrir beaucoup d'hôtels qui utilisent le patrimoine artistique ou historique de la ville, voire qui font de la scénographie dans leurs locaux. Envisagez-vous de créer l'un de ces 'hôtels culture' ?

Nous avons travaillé sur un projet de ce type à Bahreïn. Il s'agissait de raconter la culture islamique au sein d'un hôtel situé dans un quartier historique en mélangeant art traditionnel, coutumes et vision contemporaine. Ce projet est pour le moment en suspens, mais j'espère qu'il y en aura d'autres.

 

Comment imaginez-vous l'hôtel de vos rêves ?

J'ai des goûts très éclectiques et je ne crois pas que l'hôtel parfait existe. Quand je voyage, je descends, par exemple, au Raphaël à Rome parce que je lui trouve un charme étonnant, tout comme au Bairro Alto à Lisbonne, l'hotel Pietrasanta à Pietrasanta, en Italie, même, qui fait rentrer l'art dans le quotidien. Ce sont des hôtels généreux avec beaucoup de mémoire, et parfois un peu chargés, alors que j'aime en principe surtout les endroits totalement épurés.

Un hôtel, ce sont aussi des rituels, des chambres qu'on retrouve avec plaisir, un service impeccable, un personnel accueillant. Je crois que le succès d'un hôtel réside dans le rapport qui existe entre l'espace public et l'espace privé. Il faut trouver à chaque fois le juste rapport.

 

On sent que vous êtes passionné d'hôtels. Quels sont les moyens que vous vous donnez pour vous développer sur ce créneau ?

Une équipe dans l'agence est détachée sur ce secteur. Elle compte une dizaine de personnes pour le moment. Son seul objectif est le suivant : créer des lieux exceptionnels, être efficace, faire plaisir tout en faisant plaisir à notre client. Nous mettons aussi la touche finale à une nouvelle ligne de mobilier dédié à l'hôtellerie. Nous maîtriserions ainsi toute la chaîne d'intervention.
Propos recueillis par Évelyne de Bast

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