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A Lourdes, la saison est une vocation

Vie professionnelle - mardi 17 février 2009 07:58
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Lourdes (65) « La saisonnalité n’est pas un choix, elle répond à un environnement » affirme à juste titre Focus, Jean-Marie Attard, président de l’Umih des Hautes-Pyrénées et vice-président national des saisonniers de l’Umih. Focus.



15600 habitants mais 5 millions de visiteurs par an. 208 hôtels, soit 26 000 lits, soit la deuxième ville hôtelière de France après Paris… Taux d’occupation : de 50 à 60 %. Capacité totale de l’hébergement : pas loin de 40 000 lits. La semaine du 11 février, date anniversaire de l’apparition de la Vierge à Bernadette Soubirous, Lourdes rouvre pour trois jours. La semaine dernière, malgré les trombes d’eau qui se sont abattus sur la grotte, les fidèles étaient là. La météo, souvent évoquée lorsqu’on parle saisonnalité, n’est pas un facteur déterminant dans cette partie des Hautes-Pyrénées. Lourdes vit au rythme des pèlerinages. Levée de rideau annuelle le dimanche des Rameaux. Dernières célébrations mi-octobre. L’ancien bourg, situé aux portes des Pyrénées, accueille aujourd’hui en majorité des étrangers, se déplaçant essentiellement en cars. Des clients aux ‘besoins humains’ forts et denses. On vient aux sanctuaires pour se recueillir, prier, espérer. Derrière l’émotion, la maladie comme d’autres injustices. Mais aussi un grand besoin de solidarité et de partage. Dans la rue qui mène à la basilique du Rosaire, des échoppes au coude à coude, vendent objets religieux et flacons vides. Revenir avec l’eau bénite est un rituel auxquelles toutes les générations se plient volontiers. Autre spécificité de Lourdes en effet : tous les âges se succèdent devant la statut de la Dame ‘tout habillée de blanc’.


Répondre la demande


Le parc hôtelier va du sans étoile au 4 étoiles luxe, avec, pour les plus récents, des 200 chambres et plus. Pour Jean-Marie Attard, président de l’Umih 65 et propriétaire de l’hôtel des Rosiers, plusieurs challenges. D’abord le développement ‘anarchique’ des résidences hôtelières. "Des lits froids, qui ne correspondent pas aux attentes de la clientèle et ne génèrent quasiment pas d’emplois. Multiplier aussi  l’hébergement sans prendre en compte ce qui existe déjà n’est pas bon" estime ce professionnel dont l’objectif est avant tout de répondre à la demande. "Nous avons une clientèle gentille, qui vient parfois de très loin et qui économise souvent tout au long de l’année pour passer seulement quelques heures ici. Cette clientèle vient en groupe dans sa grosse majorité. La moyenne des séjours est de trois jours mais certains reviennent tous les ans ou tous les deux ans. Ce ne sont pas n’ont plus des gens à pouvoir d’achat important". Rencontré par hasard dans le hall de l’hôtel des Rosiers, François Fouyet, directeur du pèlerinage Voir Ensemble, dédié aux mal et non voyants. La discussion porte très vite sur les normes d’accessibilité. L’homme sourit. "On va imposer des panneaux en braille dans les ascenseurs… Alors que seulement 5% des non voyants lisent le braille… Et la moitié lisent le braille total et l’autre moitié le braille abrégé. Va-t-on vraiment améliorer les choses pour eux ? Je préfèrerais davantage de bon sens : par exemple, un mobilier fixé pour que les aveugles trouvent leurs repères, une chambre sans aspérité." Dans son établissement, Jean-Marie Attard a changé des lustres pour des plafonniers. Un détail pour le confort des non-voyants. L’accessibilité, à Lourdes, on connaît au quotidien. Et pourtant, ici aussi, un certain nombre d’hôtels doivent investir pour entrer dans le prochain cahier des charges sur l’accessibilité. Pour quelques uns, la transmission pose vraiment problème. Vendre, on peut. Mais pour des jeunes repreneurs, le coût des travaux se révèle un obstacle, voire un renoncement. Jean-Marie Attard soupire et revient sur les résidences hôtelières et les chambres d’hôtes "qui bénéficient d’une réglementation beaucoup moins contraignantes alors qu’elles font le même métier que nous." Pour ce responsable syndical, la reconnaissance de la saisonnalité est également un combat aigu. "Etre saisonnier n’est pas un choix. Il correspond à un environnement."

Des saisonniers payés plus chers

L’agence Bignalet est spécialisée dans l’élaboration des fiches de paye, tous types d’entreprises et beaucoup de CHR. Son dirigeant, ancien président de l’Urssaf, rappelle : "Nous avons à Lourdes créé la première convention collective du secteur CHR. C’était en 1986. C’est notion est importante car elle montre la préoccupation des professionnels pour leurs employés. Si on prend la saison dernière, sur 2135 salariés, 1800 viennent du département. Le minima payé en moyenne était de 33,87% au dessus du Smic. Et puis, nos saisonniers font moins d’heures." Qui dit clientèle de groupe, dit pension complète et horaires maîtrisés. "A 21 heures, les gens ont fini de dîner. Et ils se couchent tôt pour assister aux célébrations." Quasiment pas de dossiers aux Prud’hommes. Un constat toutefois : "à une époque, en fin de saison, un saisonnier pouvait s’acheter sa voiture. Maintenant il a tout juste de quoi se payer le permis de conduire. A qui la faute ? En partie, sans doute, à la déréglementation du travail". A trop vouloir bien faire, on fait mal… Les saisonniers de Lourdes ont une moyenne d’âge de 35 à 36 ans et 60% d’entre eux ‘reviennent’. Jean Cazaux, propriétaire de trois établissements dont l’Eliséo, un 4 étoiles luxe, confirme. "En ce moment, j’ai le même personnel que l’an dernier et ils vont revenir pour la saison 2009". Sur l’ensemble de ses affaires, il emploie une centaine de personnes dont 15 permanents. "Nous sommes dans la pure saisonnalité. Ouvrir à l’année ne serait pas rentable" affirme-t-il, à l’instar de tous les professionnels interrogés. Côté employé, deux tendances : les plus âgés restent dans la même entreprise durant la saison. Les plus jeunes zappent entre trois, quatre, cinq établissements durant la même période. Un personnel payé 10% plus cher qu’ailleurs.

 

Sylvie Soubes

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