Rubrique animée par Pascale Carbillet et
Tiphaine Beausseron.
Exclusivement réservée aux établissements abonnés.
pcarbillet@lhotellerie-restauration.fr
Précision de la rédaction Il est toujours très instructif de comprendre comment réagissent les salariés quand on est employeur et tout aussi instructif, quand on est employé, de comprendre les préoccupations des employeurs. Parce que L'Hôtellerie est 'au cur' de ces métiers, elle se doit de donner la parole à tous, en toute liberté. Le débat est ouvert, il n'est d'échange que de point de vue. |
Suite à l'arrêt de la Cour de justice européenne qui est venu remettre en cause
l'exonération de TVA sur le pourcentage service, et la non-publication du décret sur les
réductions de cotisations pour les avantages en nature nourriture, les conseils
d'administration du Syndicat national des restaurateurs, limonadiers et hôteliers (SNRLH)
et du Syndicat français de l'hôtellerie (SFH) ont soumis au vote la poursuite ou non de
la signature de l'accord de branche tel que prévu à l'issue de la dernière commission
plénière du 30 mars dernier.
Si c'est le 'oui' qui l'a largement emporté, la signature de ces deux organisations
patronales reste malgré tout subordonnée à la publication au Journal officiel du
décret portant l'exonération des charges sur les avantages en nature nourriture à 100 %
avec rétroactivité à 50 et 75 % respectivement pour 1999 et 2000.
Il s'agit pour ces deux organisations patronales d'amener progressivement le secteur
des CHR dans la modernité en donnant la possibilité économique aux entreprises à forte
intensité de main d'uvre de bénéficier d'allégements de charges patronales
spécifiques et aider les plus petites entreprises en leur donnant les moyens d'une
organisation appropriée à leur activité.
A l'heure actuelle, le projet d'accord sur la RTT dans les CHR a été transmis au
ministère du Travail pour signature. Tous les partenaires sociaux, c'est-à-dire
syndicats patronaux et salariés ont jusqu'au 31 mai pour signer ou non cet accord.
C'est avec beaucoup de colère que je viens de terminer la lecture de l'article "Ça
va mieux en le disant" paru cette semaine dans votre hebdo.
Comment un employeur, qui a été lui-même employé, ose penser et en plus écrire que ce
métier se pratique sans trop forcer et sans se salir... L'aspect humain a été
complètement évincé dans cet article mais peut-être est-il célibataire ?
L'histoire de notre vie (mon mari et moi-même) est bien banale, mais je souhaite
néanmoins vous en exposer quelques 'morceaux choisis'.
Nous avons été tous les deux salariés dans l'hôtellerie pendant plus de 10 ans. Nous
avons choisi cette branche d'activité par passion (surtout en ce qui me concerne, puisque
je me destinais au départ à une carrière commerciale DUT Techniques de
commercialisation), nous avons occupé tour à tour tous les postes de
l'hôtellerie-restauration pour terminer tous les deux comme maîtres d'hôtel.
Je ne crois pas que nous avons fait preuve d'irresponsabilité, ni de passivité. Si nous
avons obtenu ces deux postes, c'est par passion, par courage, parce que travailler 45
heures par semaine ne nous faisait pas peur, et surtout au détriment de la vie familiale.
Les aléas malheureux de la vie nous ont amenés à constater et surtout à renoncer à ce
pari fou : être heureux et épanouis complètement dans ce métier. Mais il était trop
tard : perte d'un enfant, décès d'un parent, rendez-vous manqués avec la famille
(fêtes de fin d'année en particulier) pendant des années.
De plus, nous n'aurions jamais renoncé à ce métier si nous avions eu le soutien de
notre employeur pour qui nous avons été dévoués pendant des années pour la bonne
marche de l'entreprise et pour son renom. Hélas, après avoir mené cette affaire comme
si c'était la nôtre et après avoir demandé un peu plus de reconnaissance dans notre
travail, la direction nous a effectivement répondu, comme l'auteur de l'article, que nous
n'étions ni indispensables, ni irremplaçables. Pourtant depuis 3 ans, cet établissement
reste à la recherche d'une nouvelle équipe puisque notre départ avait motivé
l'ensemble du personnel dont nous avions la responsabilité.
Ecurés par ce comportement qui n'est pas isolé, nous avons tous les deux quitté
ce métier et choisi de privilégier notre équilibre familial. Aujourd'hui, nous
réalisons encore plus chaque jour que nous appartenions à un engrenage dangereux qui ne
méritait pas un tel dévouement.
Notre seul manque : les clients qui ont toujours été notre priorité.
Enfin, je ne vais pas entamer la discussion sur l'installation à notre propre compte qui,
contrairement à ce qui est notifié par l'article, n'est en rien une question de courage
mais plutôt de capacité financière.
N'oubliez pas Messieurs et Mesdames que ce métier, même s'il est extraordinaire et
magique, ne reste pas moins un sacrifice de la vie personnelle et qu'il demande une
reconnaissance de la part des employeurs.
Nous ne sommes pas convaincus que l'application des 35 heures soit une solution,
néanmoins nous souhaitons que cette loi permette d'écouter et d'entendre un peu plus le
message des employés de la restauration qui, eux, n'ont pas le loisir de faire grève,
surtout quand il s'agit de petites structures.
Merci de votre écoute et sachez que ce ne sont pas des propos tels qu'ils sont tenus dans
l'article qui motiveront les jeunes et les plus aguerris à persévérer dans cette
activité professionnelle et qui participeront à la crédibilité et au respect du
patronat de l'hôtellerie.
(Un couple de professionnels)
Je me permets de réagir suite au courrier de Monsieur Christian S. paru dans votre
journal n° 2714 du 19 avril 2001.
Quelle expérience professionnelle désastreuse a-t-il vécu pour tenir de tels propos,
aussi durs et injurieux, et de quel droit se permet-il de les tenir.
Cher Monsieur S., consultez la liste des métiers par ordre alphabétique et trouvez m'en
un qui soit idéal, sans problème et sans contrainte, sans souci et bien payé, je suis
preneur.
De plus, je ne comprends pas L'Hôtellerie qui publie ce courrier, insultant pour
la profession. Pour ma part, je travaille depuis l'âge de 14 ans en restauration, j'en ai
42, j'ai été employé en cuisine comme commis et je n'ai jamais eu l'impression d'avoir
été exploité comme 'esclave' et je ne pense pas être le 'négrier' cité par Monsieur
S. envers mon personnel composé de 4 salariés plus 2 apprentis et moi-même. Par contre,
j'ai une idée : que Monsieur S. s'installe à son compte et qu'il essaye d'être le
patron idéal, après on en reparlera.
(A.C. de Beaufort)
Réponse à L.R. restaurateur
Après avoir lu votre lettre dans le dernier hebdomadaire, vos propos me semblent un peu
excessifs. On ne peut se contenter de réagir à l'affectif sur cette question. Que les
mécontents en tout genre changent d'établissement, voire de travail, pourquoi pas, si
c'est leur choix ! Mais pourquoi reprocher quoi que ce soit aux personnes qui veulent
simplement faire évoluer les choses ?
On peut aimer son métier, vouloir le faire au mieux, tout en aspirant à une vie plus
équilibrée (je parle de la vie privée évidemment). Il n'y a franchement rien
d'insoutenable là-dedans. Et c'est malheureusement vrai que, dans la restauration,
nombreux sont ceux qui ne respectent pas la convention collective.
Les 35 heures paraissent pour l'instant le moyen le plus approprié. Essayons donc de les
appliquer au mieux. Ce n'est pas en continuant à travailler 60 heures et plus par semaine
que nous attirerons des personnes voulant se lancer dans la profession. C'est en imaginant
le futur que l'on avance.
(Bruno Roland)
Merci de votre soutien
Avant tout, je tiens à présenter mes excuses les plus sincères à L.R. si, comme il le
semble, il respecte à la fois son personnel, le Code du travail et la convention
collective. Par contre, je ne retire rien à mes propos que je ne considère en rien
outranciers pour tous ces patrons qui se croient encore au XIXe siècle en faisant
travailler 12 ou 13 heures par jour leur personnel, qui ne respectent pas le repos
quotidien de 11 heures obligatoires par des horaires de 'coupure' qui vous font terminer
à 3 heures du matin pour recommencer à 11 heures, qui vous donnent comme vestiaire des
placards à balais ou des locaux où je ne mettrais pas mon chien, qui vous nourrissent au
lance-pierre avec des repas qui font passer les cantines militaires pour des restaurants
étoilés, qui oublient de tenir les registres obligatoires d'horaires effectués et de
droit au repos compensateur et qui font un tel chantage à l'emploi qu'ils passent le plus
souvent à travers les contrôles de l'inspection du travail.
Non, L.R., être au chaud n'est pas la seule garantie d'une bonne qualité de vie au
travail et notre situation n'est pas avantageuse. Ceci explique sûrement pourquoi depuis
plusieurs années les jeunes diplômés des écoles hôtelières préfèrent (ils sont
sûrement moins idiots que nous à leur âge) s'expatrier ou se réfugier dans de grands
groupes de restauration collective, quand ils n'abandonnent pas tout simplement ce
merveilleux métier pour des secteurs qui vivent au XXIe siècle.
Enfin non, mon cher L.R., je ne suis pas couard, et si je ne me suis jamais mis à mon
compte, c'est qu'être patron n'est pas pour moi l'archétype de la réussite d'une vie au
détriment de tout le reste (ce qui est souvent le cas) mais la solution intermédiaire
que j'ai choisi : accéder à des postes à responsabilité tout en préservant son couple
et en participant à la société qui m'entoure me semble plus humain et plus
enrichissant.
Cher Bruno Roland, je vous remercie de votre témoignage car je commençais à croire que
je cauchemardais et que je devenais parano : cela me fait plaisir de voir que l'on est au
moins 2 à faire des semaines de 60 heures et plus et surtout à le dire. Il serait temps
que cela se sache.
(Christian S.)
Image et conseil
Il n'y a rien de plus irritant que d'avoir affaire à des gens qui n'en finissent plus de
se plaindre. Ex : Ça va mal, il pleut ! Ce n'est pas pour autant qu'il va arrêter de
pleuvoir, mais par contre, tu peux partir dans le désert et là c'est sûr, pas une
goutte.
Dans la vie, c'est pareil, et sur le forum, je partage l'avis que si l'on n'est pas
heureux avec un patron, on le quitte et basta.
Ce n'est pas le boulot qui manque dans ce métier. Et pour vous retourner contre les
mauvais patrons, vous avez tout à disposition, les syndicats, les inspecteurs du travail,
les DP, les prud'hommes, le journal L'Hôtellerie et j'en passe, alors pour l'amour
du ciel, ne pourrissez pas ce forum de vos plaintes éternelles et réagissez en personnes
responsables sans chercher indéfiniment le soutien de gens aussi amers que vous et qui,
de toute façon, ne feront rien avancer. Aide-toi et le ciel t'aidera. (De Zen)
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L'HÔTELLERIE n° 2718 Hebdo 17 Mai 2001