Le nouveau maire modifie le plan d'occupation du domaine public
La saison démarrait bien pour les restaurateurs implantés sur le petit port de Marseillan, près de Béziers, avant que tombe la décision de la nouvelle municipalité : la suppression des contre-terrasses.
Bruno Henri fait figure aujourd'hui d'irréductible gaulois face à la souveraineté municipale des nouveaux élus de Marseillan qui ont en effet décidé, fin mai, la suppression des contre-terrasses installées sur le port. Pour comprendre la bataille qui l'oppose désormais au maire (DG) de la commune, Williams Méric, un retour en arrière de 6 ans est nécessaire. A cette époque, le port affiche triste mine, avec, pour seule attraction, quelques chaloupes de pêcheurs à la retraite, rongées par le soleil et le vent. L'ancienne municipalité décide alors de restaurer l'image du site et transforme le béton vieillissant en port de plaisance. Un premier commerce s'empare du lieu et fin 95, dans son sillage, Bruno Henri crée un concept de bar à vins dans les murs de la maison familiale : la Taverne du Port. D'autres commerces suivent, le port s'anime gentiment. En 1997, les trois établissements du quai Antonin Gros demandent à l'ancien maire la possibilité de déployer des contre-terrasses en saison au bord de l'eau. L'idée est accueillie favorablement et adoptée par le conseil municipal, moyennant 40 F le m2. La convention sera reconduite par tacite reconduction chaque année. Si celle-ci devait être cassée, un préavis de deux mois est toutefois prévu par les textes. L'aménagement, tout de fleurs, séduit les touristes. A l'heure du dîner, il faut d'ailleurs réserver si l'on veut apprécier la cuisine et les vins de la Taverne du Port. Les 28 m2 de la contre-terrasse de Bruno Henri sont pris d'assaut par les gourmands.
Nouveau maire, nouvelle donne
En avril dernier, comme de coutume, les établissements du port sortent leurs
contre-terrasses. Pour le confort de ses clients, Bruno Henri a investi dans une structure
de bois démontable, qui permet, par grand vent, de rabattre des bâches de protection. La
région est ventée. L'activité générée par cette contre-terrasse représente
désormais 50 % de son chiffre d'affaires. Grâce à elle, il emploie à l'année un
cuisinier et deux apprentis. Et l'été, l'équipe augmente de deux saisonniers.
Début mai, des rumeurs circulent. Williams Méric voudrait faire retirer les
contre-terrasses. Inquiets, les commerçants du quai Antonin Gros demandent un rendez-vous
avec le maire. "Celui-ci nous a reçus et nous a dit qu'il ne voulait plus voir
ces contre-terrasses. Nous lui avons demandé de reporter sa décision à la fin de
l'été, la saison ayant déjà démarré pour nous", retrace Bruno Henri. "En
ce qui me concerne, j'avais déjà engagé mes deux saisonniers. Deux jours après cette
entrevue, la mairie nous appelle et nous annonce que nous devons tout retirer le 1er juin."
Le 28 mai, les conseillers municipaux sont convoqués et doivent voter, entre autres, la
nouvelle tarification du domaine public. "Le 25 mai, soit trois jours avant le
conseil municipal, souligne Bruno Henri, le maire a fait rédiger une nouvelle
réglementation de l'occupation du domaine public. Celle-ci accompagne la nouvelle
tarification. La procédure va à l'encontre de la législation puisque les conseillers
municipaux doivent recevoir cinq jours avant le conseil la totalité des textes mis au
vote." Le 1er juin, date butoir, Bruno Henri, dont l'établissement n'a jamais
fait l'objet de la moindre plainte, reçoit un coup de téléphone du maire. "J'attendais
un courrier officiel et motivé de sa part. Il a préféré décrocher son combiné. J'ai
été très choqué par le ton et les propos qu'il a tenus. Il m'a carrément menacé, me
disant, si je n'obtempérais pas, qu'il en ferait un cas personnel." Bruno Henri
avait entre-temps mis le haut-parleur et deux personnes, présentes à ce moment-là, ont
confirmé les paroles intimidatrices proférées par le maire. "Ils m'ont signé
un papier et j'ai une photocopie de leur carte d'identité." Ces pièces, comme
les 500 signatures de clients recueillies pour le maintien de la contre-terrasse de la
Taverne du Port, sont aujourd'hui entre les mains des avocats. La municipalité a en effet
entamé une requête en référé auprès du tribunal administratif contre la Taverne du
Port.
Sécurité
Les motifs invoqués par le nouveau maire portent sur la "sécurité et
l'esthétisme". Celui-ci veut aussi "rendre le domaine public aux
Marseillanais", explique le patron de la Taverne. "Ses mesures sont
contradictoires. L'aménagement tel qu'il était a permis de faire vivre le port. Avant,
ce n'était pas du tout un lieu de promenade. Dans sa bonne grâce, celui-ci a toutefois
élargi les surfaces de terrasses octroyées aux restaurants, en tirant à la hausse, bien
sûr, le prix des terrasses." Le prix est passé de 40 F à 120 F le m2. "Ce
qu'aiment les gens, reprend Bruno Henri, c'est manger au bord de l'eau. Il n'y a
aucun danger, les terrasses ont été aménagées en fonction du site. Si on me retire ma
contre-terrasse, c'est mon outil de travail qu'on supprime. Je regrette, en outre, que
cette décision ait été prise sans concertation, sans volonté de dialogue."
Les deux autres établissements concernés se sont pliés aux ordres communaux. Leurs
contre-terrasses ont disparu du quai, soit 20 places en moins pour la Brasserie du Soleil.
Seule demeure celle de la Taverne du Port, qui, il est vrai, donne envie de s'asseoir au
bord de l'eau.
S. Soubes zzz22v
Pour Bruno l'activité générée par sa contre-terrasse représente 50 % de son
chiffre d'affaires.
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L'Hôtellerie n° 2727 Hebdo 19 Juillet 2001