Franck Le Maner
A Lespignan, aux portes de Béziers, Franck Le Maner a relancé l'exploitation de l'Hostellerie du Château. A l'ambition d'apprendre a succédé aujourd'hui celle der réussir avec le soutien de toute sa famille. Rencontre.
Lorsque le service lui
accorde quelques secondes de répit, Franck Le Maner peut lever la tête et scruter
l'horizon. A gauche, le massif de La Clape, si célèbre pour ses vins, en face, les
étangs de Vendres, et à droite les collines de Nissan... De sa cuisine, ce Breton de 29
ans savoure la chance de travailler dans un cadre exceptionnel déniché à Lespignan, à
moins de 20 km de Béziers dans l'Hérault. L'Hostellerie du Château était restée
fermée pendant plus de 1 an. Ses exploitants avaient carrément tout laissé en plan au
lendemain du réveillon du 31 décembre 1998. Partis sans laisser d'adresse, ou presque !
"Je sortais à ce moment-là de 4 ans dans les cuisines de L'Agathé Tyché, à
Agde, et j'aspirais à entreprendre. Avec mes parents, nous avions étudié un projet de
complexe hôtelier entre Béziers et Carcassonne, mais faute de boucler le financement,
nous avions dû abandonner." Franck Le Maner et Dominique, son père, ont donc
orienté autrement leurs recherches jusqu'à ce qu'ils trouvent cet établissement
quasiment en l'état depuis le fameux départ précipité.
Ambition et tour de France
Ils y ont vu l'occasion de franchir un nouveau palier pour un jeune cuisinier qui n'a
jamais caché une certaine ambition. La preuve ? "A la fin de mes études à
l'école hôtelière de Nantes, j'ai ciblé les établissements où je souhaitais
poursuivre ma formation dans un premier temps. J'ai répertorié ceux qui sont titulaires
d'au moins 1 macaron au Guide Rouge et ceux qui ont au moins 16/20 au GaultMillau.
J'ai envoyé 450 CV en France et dans les pays voisins et j'ai reçu toutes sortes de
réponses..."
Le garçon aux idées ainsi bien arrêtées va alors entreprendre une sorte de tour de
France qui le conduira, au fil des ans, du château de Rochevilaine près de Vannes, au
Jardin des Sens à Montpellier. Des étapes qui lui ont permis de progresser et, surtout,
de mieux maîtriser divers aspects du métier de cuisinier. Il a approfondi sa
connaissance du gibier au Pays basque, celle des poissons en Bretagne, celle du vin en
Anjou et celle des légumes ensoleillés et des herbes en Provence. Sans oublier une
expérience originale, dans une table d'hôte du Périgord, où le canard, élevé et
gavé sur place, était roi du début à la fin du repas.
"Si je me sentais prêt au niveau professionnel, j'avais par contre
l'appréhension de la gestion. La tenue d'une affaire qui, comme celle-ci, demandait un
investissement important représentait une aventure. En fait, si mes parents ne m'avaient
pas soutenu, j'aurais fait le choix d'une gérance plutôt que celui du rachat d'un fonds
de commerce."
Conquête locale et petits prix
L'acquisition réalisée en février dernier, la famille Le Maner s'est engagée dans une
campagne de travaux. En particulier en cuisine, où la mise aux normes était plus
qu'indispensable. "Près de 700 000 F ont été nécessaires pour assurer l'achat
et les aménagements", explique Dominique, le père, qui apporte un soutien sans
faille à son fils en assurant notamment le relationnel au niveau du restaurant. C'est lui
qui a réalisé les 30 000 dépliants destinés à faire connaître cette maison, mais qui
a aussi défini la stratégie de communication. "Pour l'inauguration, le 1er
avril, nous avons invité nos relations professionnelles lors d'un premier cocktail avant
de toucher, le lendemain, les habitants de Lespignan à l'occasion du second cocktail.
Visiblement, ces derniers y ont été sensibles, tout comme ils apprécient la cuisine de
Franck. La clientèle locale constituait à la fin du premier trimestre 30 % de notre
activité."
Franck Le Maner a, à ce titre, le sentiment d'avoir vu juste. "Ici, on n'a jamais
voulu parler de restaurant gastronomique. La connotation est trop négative. Les gens y
voient des petites portions et des prix élevés. Notre image est différente. Du premier
menu à 95 F jusqu'à celui à 250 F, tout le monde a droit à un amuse-bouche et ne doit
pas choisir entre fromage et dessert à la fin du repas : il a les deux, tout simplement."
Si, qualitativement, ce cuisinier inventif place la barre haute, il fait preuve d'une
grande sagesse tarifaire qui témoigne d'un sens aigu de la gestion des ratios.
Un choix stratégique qui ne l'empêchait pas, après 3 mois d'exploitation, d'être
légèrement en avance sur son chiffre d'affaires prévisionnel. Et surtout, de recevoir
des signes d'encouragement de la part de ceux qui viennent à sa rencontre dans ce qui
reste du château féodal, notamment demeure du Cardinal de Fleury, sous Louis XV. Mais
ça, c'est une autre histoire...
J. Bernard zzz18p
En dates 1971 Naissance 1990 |
Franck Le Maner fait preuve d'une grande sagesse tarifaire qui témoigne d'un sens
aigu de la gestion des ratios.
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L'Hôtellerie n° 2732 Hebdo 23 Août 2001