Moins d'une semaine après la catastrophe qui a secoué la Ville rose, les hôteliers et restaurateurs toulousains pansent leurs plaies. Il va leur falloir beaucoup de courage pour remonter une pente déjà mise à mal par les attentats américains.
Un accident lourd de conséquences pour les professionnels.
Vendredi 21
septembre, 10 h 25 à l'hôtel Crowne Plaza : dans le grand hall d'entrée et dans les
couloirs, les signaux d'alarme viennent de se déclencher. Clients et direction craignent
le pire. Comme toute la population toulousaine, chacun a encore à l'esprit les attentats
américains. D'autant que les explosions, semble-t-il, se succèdent les unes après les
autres. Les 80 occupants de l'hôtel viennent tous de ressentir l'onde de choc de la
déflagration. Trois chambres situées au 6e étage - et heureusement inoccupées -
viennent de perdre leur faux plafond. Il ne faudra pas plus de 10 minutes à un personnel
habitué à pratiquer des exercices en simulation pour procéder à l'évacuation totale
de l'établissement. "Tout le monde s'était regroupé sur la place du Capitole,
j'étais seul dans l'hôtel, les lignes étaient saturées, je ne parvenais pas à joindre
la direction du groupe, évoque Didier Vincent, directeur du Crowne Plaza. Je suis
resté proche de la radio. Parmi notre clientèle, il y avait des Américains qui étaient
paniqués. Certains ont voulu rejoindre l'aéroport, mais ils ont vite été refoulés par
les forces de police."
Lorsque le lieu de l'accident a été circonscrit au pôle industriel d'AZF, et lorsque la
préfecture a mis en place les mesures de confinement, les hôtels ont appliqué les
consignes rapatriant le personnel et la clientèle à l'intérieur des établissements.
Plus proche de la zone du sinistre, la vision est plus violente. A quelques pas du
périmètre de sécurité, dont l'accès est interdit au public, l'hôtel-restaurant Le
Pic, situé sur la route d'Espagne, présente un intérieur entièrement dévasté. Seuls
les murs semblent avoir résisté à l'onde de choc. A quelques pas de là, Bernard Moreau
tient le Bar de Muret sur l'avenue qui porte le même nom. Après la destruction de sa
vitrine, il n'ose pas s'attarder sur la devanture de son magasin. "Lorsque l'on
voit ce qu'il reste du Pic, on se sent privilégié. Hormis deux ou trois fissures sur les
murs, je m'estime heureux. Au moment de l'explosion, on a fait partir les clients pour ne
pas prendre de risques."
Certains ont orienté leur clientèle vers d'autres établissements.
Des établissements proches du périmètre de sécurité
Sur la zone industrielle Thibault, le restaurant Le Chapitre, qui avait déjà subi des
dégâts à la suite d'un incendie, a dû refaire sa toiture. Pour faire face à
d'éventuelles intempéries, le cuisinier de l'établissement, Jean-François Gueston,
ancien adjudant-chef des pompiers de Paris, a dû remplacer près d'une centaine de
tuiles. "Après l'incendie, nous disposions d'un stock de tuiles, j'ai donc pu
tout recouvrir. Nous avons provisoirement remplacé la porte d'entrée dont les montants
ont été littéralement arrachés. Par chance, l'électricité et le gaz ont pu être
rétablis rapidement. Nous avons rouvert dès lundi, mais avec seulement deux salles au
lieu de quatre ; les faux plafonds et l'isolation ont été arrachés. En attendant
l'expert, nous fonctionnerons sur 90 couverts au lieu de 180", précise
Jean-François Gueston. Plus inquiets pour leur activité, qui avait enregistré une bonne
progression cette année, Pierre et Nicole Audabram, de l'hôtel-restaurant Le Trèfle à
Portet-sur-Garonne, ont dû faire face à la situation et réorienter leur clientèle sur
deux établissements qui ont été moins touchés, l'Hotan et le Thib'hôtel. Pierre
Audabram travaille dans l'établissement depuis 1992 après avoir exercé les fonctions de
directeur, gérant, puis aujourd'hui propriétaire. Des techniciens d'entreprises
sous-traitantes d'AZF venaient régulièrement séjourner à l'hôtel. En 1998, un
dimanche matin, deux petites explosions avaient mis en émoi la population de
Portet-sur-Garonne, mais selon Pierre et Nicole Audabram, "le fait a été
étouffé". Chaque premier mercredi du mois, ils avaient pris l'habitude
d'entendre retentir l'alarme déclenchée à titre d'exercice pour signaler les
émanations de gaz toxique. "Nous savions qu'il y avait des produits dangereux à
proximité, mais en même temps, des mesures de sécurité draconiennes étaient
prises", souligne Pierre Audabram. Le soir de la catastrophe, après avoir
constaté les dégâts dans la salle de restaurant et dans les couloirs de l'hôtel, le
couple a pu contacter un électricien afin d'isoler les câbles électriques qui avaient
été éjectés des panneaux de placoplâtre lors de l'explosion. Un miroitier a pu
disposer provisoirement des panneaux de contreplaqué pour parer aux éventuels actes de
vandalisme, mais l'alimentation en gaz a été coupée sur tout leur secteur par mesure de
sécurité. Les policiers municipaux et les gendarmes de Portet-sur-Garonne ont été mis
en alerte afin d'effectuer quelques rondes nocturnes et prévenir tout acte malveillant.
La priorité reste, pour les professionnels touchés, de tout remettre en état pour
accueillir au plus vite la clientèle, en oubliant l'angoisse de cette journée et en
attendant l'indemnisation des assurances. Mais ils sont tous bien conscients que cet
accident sera lourd financièrement pour eux : annulation de l'Open de Tennis, du Salon
d'Automne sur l'Habitat et la Décoration, déprogrammation des congrès et séminaires,
comme celui qui devait mobiliser les pharmaciens français. Indépendamment des
réparations matérielles, la ville, lourdement atteinte dans ses infrastructures, n'est
pas encore prête à accueillir à nouveau touristes, séminaristes ou autres
manifestations sur lesquelles comptent les professionnels pour assurer leur chiffre
d'affaires quotidien. zzz16 zzz36v zzz22v
Secours exceptionnel |
Afin d'aider les hôteliers et restaurateurs sinistrés de Toulouse,
la caisse de retraite Organic Professionnelle met une partie de son budget d'action sociale à leur secours. Si votre établissement a été fermé, si vous déplorez des dégâts matériels ou de grosses difficultés de fonctionnement, un secours financier vous sera accordé sur simple demande. Laurence Guilcher, au 02 97 24 30 06, vous aidera à constituer votre dossier. zzz16 zzz36v zzz22v |
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L'Hôtellerie n° 2737 Hebdo 27 Septembre 2001