A compter du 1er octobre 2001, les entreprises devront soumettre à la TVA le pourcentage service perçu pour leurs salariés. Cette mesure ne sera pas sans conséquences sur les finances des entreprises des CHR, qui pourraient être tentées de modifier les règles de calcul de cette forme de rémunération, voire de la faire disparaître. Marche à suivre.
La rémunération
des salariés au pourcentage service dans les CHR est réglementée par la loi Godart du
19 juillet 1933 et son règlement d'administration publique du 4 juin 1936.
Elle consiste en la rémunération du personnel affecté au service à la clientèle par
le prélèvement d'un pourcentage sur le chiffre d'affaires réalisé par l'établissement
et réparti entre les ayants droit. Elle offrait jusqu'au 1er octobre 2001 plusieurs
avantages : une exonération sous condition de TVA sur la masse du pourcentage service,
une motivation du personnel ainsi rétribué, une indexation de la masse salariale du
personnel de salle sur le chiffre d'affaires de la société.
Malheureusement, cette exonération de TVA vient d'être supprimée par une instruction
fiscale du 15 juin 2001 faisant suite à un arrêt de la Cour de justice des Communautés
européennes du 23 mars 2001.
Certains chefs d'entreprise envisagent aujourd'hui une redéfinition du mode de calcul du
pourcentage service, voire même de son abandon au profit d'une rémunération au fixe.
Comment, et dans quelles conditions, une modification du mode de calcul de rémunération
peut-elle intervenir ?
Les modifications possibles
La modification du mode de calcul au pourcentage service peut consister :
w soit en la modification du taux du pourcentage service
(ex. : passage de 15 à 12 %) ;
w soit en la modification de l'assiette de calcul du
pourcentage service (ex. : passage d'un pourcentage service assis sur le chiffre
d'affaires TTC à un pourcentage assis sur le chiffre d'affaires HT). La modification du
mode de rémunération peut consister également en l'abandon du pourcentage service pour
une rémunération au fixe.
Elle constitue, en tout état de cause, une modification substantielle du contrat de
travail que l'employeur ne saurait imposer aux salariés concernés.
L'employeur doit respecter une procédure de mise en uvre au cours de laquelle il
proposera aux salariés une modification du mode de calcul du pourcentage service (ou de
son abandon), et tirera les conséquences d'un refus de ces derniers.
Justifier d'un motif réel et sérieux
Le licenciement économique notifié par l'employeur à la suite du refus de modification
du mode de calcul du pourcentage service (ou de son abandon) par le salarié doit reposer
sur un motif réel et sérieux.
Ceci implique que la modification du pourcentage service refusée soit elle-même
justifiée par un tel motif.
L'employeur ne peut donc modifier (ou abandonner) le mode de calcul du pourcentage service
que si la situation financière de l'entreprise, eu égard au chiffre d'affaires réalisé
et aux charges d'exploitation supportées, l'exige (ex. : résultats déficitaires).
A défaut d'un tel motif, le salarié pourrait prétendre à des dommages et intérêts
pour 'licenciement abusif'.
La modification du mode de calcul du pourcentage service, ou même son abandon, devrait
donc être une mesure réfléchie, indispensable à l'entreprise.
Comment mettre en uvre la modification du mode de calcul
a) L'employeur doit consulter les représentants du
personnel.
L'employeur qui entend modifier les conditions de rémunération du personnel doit
consulter le comité d'entreprise. En cas de carence de celui-ci dans les entreprises de
plus de 50 salariés, les délégués du personnel doivent être consultés.
Dans les entreprises de moins de 50 salariés, les délégués du personnel ne sont pas
obligatoirement consultés. L'employeur n'est pas lié par l'avis du comité d'entreprise
ou des délégués du personnel.
b) L'employeur n'est pas tenu d'informer l'inspecteur du travail.
c) L'employeur doit notifier individuellement à chaque salarié concerné son projet de modification.
Il s'agit d'une formalité indispensable et obligatoire. La notification doit
impérativement intervenir avant la mise en uvre de la modification.
Il convient de notifier la modification envisagée par lettre recommandée avec accusé de
réception en accordant aux salariés un délai de réflexion minimum de 1 mois, et en
leur précisant qu'à défaut de réponse dans le délai imparti, ils seront réputés
avoir accepté la modification proposée (Art. L-321-1-2 du Code du travail). Voir modèle
ci-contre.
En cas de refus, l'employeur peut licencier les salariés
En cas d'acceptation du salarié, celui-ci reste dans ses fonctions avec application du
nouveau mode de calcul du pourcentage service (ou application d'une rémunération au
fixe). Cet accord peut être formulé par écrit ou être tacite (à défaut de réponse
au terme du délai imparti).
Un avenant au contrat de travail confirmant le nouveau mode de rémunération du salarié
devra être établi au plus tard 1 mois après sa mise en application.
En cas de refus d'une modification substantielle du contrat de travail par le salarié, il
incombe à l'employeur "soit de maintenir les conditions contractuellement
convenues, soit de tirer les conséquences du refus opposé par l'opposé" (cass.
soc. 8 octobre 1987).
Confronté au refus du salarié, l'employeur doit donc soit renoncer à la modification
envisagée, soit procéder au licenciement du salarié.
La nature du licenciement
Depuis la loi du 2 août 1989, le licenciement est économique s'il est prononcé "pour
un ou plusieurs motifs non-inhérents à la personne du salarié, résultant d'une
suppression ou transformation d'emploi, ou d'une modification substantielle du contrat de
travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations
technologiques". (Art. L-321-1 du Code du travail).
Compte tenu de cette définition, le ou les licenciements des salariés opposant à la
modification seront des licenciements économiques.
w Si le refus ne concerne qu'un salarié, la procédure
de licenciement économique individuel s'applique.
w Si le refus concerne plusieurs salariés, la procédure de
licenciement économique collectif avec consultation des représentants du personnel
s'applique.
S'il n'existe pas de représentants du personnel dans l'entreprise, la procédure de
licenciement économique individuel s'applique à chaque salarié. Ceux-ci ont droit à un
préavis et à une indemnité de licenciement.
F. Trouet SNRLH zzz60r
Modèle de lettre |
(pour une modification substantielle d'origine économique) Société..........
A..............., le.............. 20.. M......... Comme vous en avez pu être informé lors de notre entretien en date du........................, nous prévoyons la réorganisation de notre établissement à compter du.......................... (1). Aussi, nous sommes amenés à modifier votre contrat de travail. Nous vous proposons d'être rémunéré au..... pourcentage service calculé sur le chiffre d'affaires hors taxes (et non plus sur le chiffre d'affaires toutes taxes comprises) réparti conformément aux usages de l'établissement. Vous continuerez à bénéficier des avantages en nature nourriture. En tout état de cause, un salaire minimal de base (hors avantages en nature) vous sera garanti à hauteur de.................. F. Cette modification de votre mode de rémunération interviendra à compter du...................... (2). Nous vous demandons de bien vouloir nous notifier votre accord ou votre refus de cette modification par écrit avant le........................ (3). Nous vous signalons qu'à défaut de réponse de votre part au terme du délai imparti, vous serez réputé avoir accepté la modification proposée, conformément aux termes de l'article L-321-1-2 du Code du travail. Enfin, nous vous précisons qu'en cas de refus de votre part, nous serons amenés à envisager votre licenciement. Veuillez agréer................................ (1) La modification ne peut être mise en uvre qu'après l'acceptation ou le
refus des salariés. |
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L'Hôtellerie n° 2737 Hebdo 27 Septembre 2001