Les événements du 11 septembre dernier aux Etats-Unis, ou ceux survenus 10 jours plus tard à Toulouse, ont eu des conséquences sur votre activité commerciale ? Vous pouvez peut-être utiliser le chômage partiel, mécanisme qui vient justement d'être réformé par un décret du 28 juin 2001. Marche à suivre.
Le
chômage partiel est une période pendant laquelle l'employeur est contraint de cesser
temporairement l'activité de son établissement ou de réduire les horaires de travail de
ses salariés. Pendant cette période - temporaire et exceptionnelle -, l'employeur ne
peut pas licencier, mais il est dans l'impossibilité de fournir du travail à ses
salariés, qui ne peuvent pas pointer au chômage, et il doit malgré tout les payer.
Pendant le chômage partiel, l'employeur indemnise le salarié, et l'Etat rembourse à
l'employeur une partie de l'indemnité versée au salarié.
Les cas de recours au chômage partiel
Le recours au chômage partiel n'est possible que dans certains cas, limitativement
énumérés par l'article R.351-50 du Code du travail.
Selon ce texte, pour pouvoir mettre vos salariés au chômage partiel, il faut que la
réduction d'horaires, ou la fermeture provisoire de votre établissement, soit imputable
à :
- la conjoncture économique ;
- des difficultés d'approvisionnement en matières premières ou énergie (eau,
électricité...) ;
- un sinistre (par exemple, un dégât des eaux ou un incendie vous obligeant à stopper
votre activité) ;
- des intempéries de caractère exceptionnel (tempêtes, inondations) ;
- une transformation, restructuration ou modernisation de l'entreprise ;
- toute autre circonstance de caractère exceptionnel (explosion de l'usine AZF de
Toulouse, attentats du 11 septembre dernier aux Etats-Unis...).
Attention ! Il ne suffit pas d'invoquer l'une de ces situations pour bénéficier du
chômage partiel. Vous devez démontrer en quoi l'événement a eu des répercussions sur
votre activité. L'inspection du travail vérifiera non seulement que vous invoquez l'une
des situations autorisées, mais elle vérifiera aussi la réalité des répercussions sur
votre établissement, sachant qu'elle appréciera au cas par cas. Au besoin, l'inspecteur
du travail se déplacera pour venir vérifier lui-même (ce qui explique d'ailleurs que,
parfois, le traitement de votre demande prend un peu de temps).
Par exemple : les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis pourraient être à l'origine
d'une réduction d'horaires pour un restaurant situé dans un aéroport ou un hôtel
situé à proximité. Par contre, un restaurant ou un hôtel du Limousin à clientèle
principalement française ne pourrait en aucun cas invoquer les attentats du 11 septembre
pour justifier une réduction d'horaires.
Les situations exclues
Dans certains cas, vous ne pourrez jamais bénéficier du chômage partiel. Ainsi, il est
totalement impossible d'utiliser le chômage partiel dans les situations suivantes :
- travaux d'entretien ou d'embellissement tels que peinture, revêtements de murs ou de
sols, etc. ;
- travaux de mise en conformité des locaux ou des installations, notamment à la suite
d'injonction de l'administration ;
- fermeture de l'établissement à la suite d'une décision administrative ou judiciaire ;
- chômage résultant d'un différent collectif ;
- suspension de l'activité se prolongeant au-delà de 28 jours.
Les cas particuliers
w Les salariés dont le salaire hebdomadaire habituel est
inférieur à 18 fois le Smic horaire n'ont pas droit au chômage partiel.
w Le saisonnier ne bénéficie pas du chômage partiel, sauf
s'il s'agit d'une suspension ou d'une réduction d'activité exceptionnelle, et à
condition que le saisonnier ait travaillé dans l'établissement pendant les 2 années
précédentes.
w Les cadres employés sous convention de forfait en heures
ou en jours sur l'année n'ont pas droit au chômage partiel en cas de réduction
d'horaires. Par contre, ils en bénéficient en cas d'arrêt temporaire d'activité.
w Les gérants de sociétés et mandataires sociaux n'ont
pas droit au chômage partiel même s'ils ont un contrat de travail.
Consultez le représentant du personnel
C'est l'employeur qui dépose une demande de chômage partiel pour ses salariés.
S'il y a des représentants du personnel, n'oubliez pas de les consulter avant de déposer
votre demande. En effet, le non-respect de cette formalité est susceptible de constituer
un délit d'entrave au fonctionnement régulier de cette institution (Cass. soc du 8 juin
1999).
Apurez les congés payés
Sachez également que l'administration n'indemnisera l'employeur que si le chômage
partiel est l'ultime moyen pour l'entreprise de survivre dans des circonstances
exceptionnelles et temporaires. Vous devez démontrer que vous avez tout fait pour éviter
de recourir au chômage partiel. C'est pourquoi vous devez apurer les congés payés
déjà acquis par les salariés avant de les mettre au chômage partiel.
En cas d'événements extérieurs à l'entreprise entraînant la chute du chiffre
d'affaires, certaines compagnies d'assurances prennent en charge les frais fixes de
l'exploitation (loyers, emprunts, salaires et charges diverses). Sachez que si votre
assurance prend en charge les salaires, l'Etat ne vous indemnisera pas au titre du
chômage partiel.
Une demande préalable obligatoire
Pour pouvoir bénéficier du chômage partiel, vous devez demander l'autorisation à la
DDTEFP (Direction départementale du travail, de l'emploi, et de la formation
professionnelle).
En pratique, avant de mettre vos salariés au chômage partiel, vous irez retirer auprès
de l'inspection du travail, ou de la DDTEFP compétente là où se trouve votre
établissement, un formulaire de demande d'indemnisation au titre du chômage partiel.
Le formulaire de demande préalable va permettre à l'administration de vérifier si votre
situation correspond à un cas de recours autorisé, et si vous avez tout fait pour
réduire au maximum le recours au chômage partiel.
C'est pourquoi la demande préalable doit notamment préciser :
- les motifs du recours au chômage partiel et tous les éléments attestant de ceux-ci ;
- la durée prévisible du chômage partiel ;
- les mesures mises en uvre pour réduire le recours au chômage partiel (ex :
congés payés apurés) ;
- le nombre de salariés concernés ;
- la durée de travail, ainsi que les modes d'aménagement du temps de travail applicables
avant et après la mise au chômage partiel.
Après avoir rempli le formulaire et l'avoir complété avec les pièces justificatives, vous le renverrez à la DDTEFP. C'est au vu de cette demande préalable que la DDTEFP va vérifier si le chômage partiel est justifié.
Sinon vous payez les salaires
Attention ! Vous devez absolument faire votre demande avant de mettre vos salariés au
chômage partiel, sinon vous devrez payer l'intégralité des salaires comme si les
salariés avaient travaillé normalement.
De même, si vous envoyez votre demande tardivement, vous serez tenu de payer la totalité
des salaires jusqu'au jour de votre demande.
Sauf si sinistre ou intempérie
En effet, en cas de fermeture de votre établissement suite à un sinistre ou à des
intempéries de caractère exceptionnel (ex : tempête de décembre 1999, inondations dans
la Somme...), l'employeur n'est pas tenu de faire une demande préalable : il peut placer
ses salariés au chômage partiel et adresser sa demande dans un délai de 30 jours.
Le caractère exceptionnel de ces situations doit être incontestable.
Si vous avez un doute sur le caractère exceptionnel de la situation, vous devez contacter
l'inspection du travail ou la DDTEFP pour être sûr de bénéficier du chômage partiel.
Car, si finalement vous n'obtenez pas l'accord de l'administration, vous serez tenu de
payer à vos employés l'intégralité des salaires comme s'ils avaient travaillé.
L'administration a 20 jours pour répondre
A partir du jour où la DDTEFP reçoit votre dossier, elle a 20 jours pour l'étudier et
vous notifier sa réponse. En pratique, toutefois, cela peut prendre davantage de temps
car l'inspecteur du travail va se déplacer sur le terrain pour vérifier la réalité de
la situation. Sachez qu'en général, vous êtes nombreux à être touchés par le même
événement en même temps, ce qui explique que les inspecteurs du travail puissent être
débordés et mettent du temps à se déplacer dans votre établissement.
2 réponses possibles
w L'administration refuse le chômage partiel :
Dans ce cas, vous devez payer vos employés comme s'ils avaient travaillé, c'est-à-dire,
leur verser leur salaire comme s'ils avaient travaillé pendant toute la période de
cessation d'activité ou de diminution d'horaires.
w L'administration autorise le chômage partiel :
Dans ce cas, la période de chômage partiel commence au plus tôt à la date de
réception de votre demande préalable par l'administration. Exemple : vous adressez votre
demande d'indemnisation le 8 octobre. Vous pensez mettre vos salariés au chômage partiel
du 12 au 29 octobre. La DDTEFP reçoit votre demande le 10 octobre. Le 15, elle autorise
le chômage partiel à compter du 10 octobre, date de réception de votre demande.
L'autorisation précise la période de date à date au cours de laquelle le recours au chômage partiel est autorisé, le volume d'heures de chômage partiel accordé, et le nombre de salariés concernés.
L'indemnité de chômage partiel
Le chômage partiel permet à l'employeur de verser une indemnité (et non plus un
salaire) partiellement prise en charge par l'Etat.
Cette indemnité se compose de 3 allocations :
w Une allocation spécifique à la charge de l'Etat.
Les salariés au chômage partiel bénéficient d'une allocation spécifique dont le
versement est effectué par l'Etat. En pratique, celle-ci est versée par l'employeur lors
du paiement du salaire et celui-ci se fait ensuite rembourser par l'administration.
Depuis le 1er juillet 2001, le taux horaire de cette allocation varie selon la taille de
l'entreprise. Il est fixé à :
- 2,44 r (16 FF) pour les entreprises de moins de 251 salariés,
- 2,13 r (14 FF) pour les entreprises de 251 salariés et plus.
Pour les salariés qui travaillent 43 heures par semaine, l'administration applique un
taux d'allocation minoré selon la formule suivante :
Taux d'allocation (14 ou 16 FF selon la taille de l'entreprise) x durée légale du
travail (35 ou 39 heures selon la taille de l'entreprise) : durée appliquée dans
l'entreprise (43 heures dans les CHR).
Ce qui donne, par exemple, pour une entreprise de CHR de moins de 20 salariés et qui
travaille toujours à 43 heures :
16 x 39 : 43 = 14,51 FF, soit 2,21 r
Cette allocation spécifique est exonérée de charges sociales (sauf CSG et RDS).
w Une allocation conventionnelle à la charge de
l'employeur.
Les salariés peuvent aussi percevoir une allocation complémentaire conventionnelle qui
résulte de l'accord national interprofessionnel du 21 février 1968. Cet accord
s'applique aux entreprises relevant d'une branche d'activité représentée au Medef.
Le montant de cette allocation est fonction de l'allocation spécifique : au total,
l'allocation complémentaire + allocation spécifique doit être égal à la moitié du
salaire horaire brut avec un minimum de 4,42 r (29 F). Autrement dit, l'allocation
complémentaire est la somme que l'employeur doit ajouter à l'allocation spécifique pour
atteindre 50 % du salaire brut et au minimum 4,42 r (29 F).
L'employeur verse cette allocation tant que l'allocation, spécifique, est versée. Et,
comme cette dernière, elle est exonérée de charges sociales (sauf CSG et RDS).
w Une allocation complémentaire à la charge de
l'employeur et de l'Etat.
En outre, la loi garantit aux salariés touchés par une réduction d'horaires une
rémunération mensuelle minimale s'ils ont un contrat de travail comportant un horaire au
moins égal à 35 heures pour les entreprises d'au moins 20 salariés, et 39 heures pour
les autres.
Le montant de cette allocation est égal à la différence entre :
- le Smic hôtelier, avantages en nature inclus et déduction faite des charges sociales,
- et le salaire dû pour le travail effectivement accompli + allocations spécifique et
conventionnelle. L'Etat rembourse à l'employeur 50 % de cette allocation.
Ces 3 allocations cumulées sont versées par l'employeur à la date normale de la paie,
donc mensuellement.
A l'occasion du paiement, l'employeur doit remettre aux salariés un document indiquant le
nombre d'heures indemnisées, le taux appliqué, et les sommes versées au titre de la
période considérée. Sachant que ces indications peuvent figurer sur un document
indépendant ou sous forme d'une mention portée sur le bulletin de paie (article R.
351-53 du Code du travail).
Ce n'est qu'ensuite que l'employeur se fera rembourser par l'Etat le montant des
allocations spécifique et complémentaire.
L'employeur se fait rembourser l'allocation spécifique
A la fin du mois au cours duquel les heures de travail ont été réellement chômées, et
après avoir versé aux salariés l'indemnité de chômage partiel, l'employeur demandera
à la DDTEFP le remboursement des allocations spécifique et complémentaire.
Pour cela, il envoie un état nominatif de remboursement qui mentionne pour chaque
salarié placé en chômage partiel :
- sa durée de travail,
- la forme d'aménagement de son temps de travail,
- le nombre d'heures réellement travaillées par rapport au nombre d'heures normalement
prévues, ainsi que le nombre d'heures chômées au cours du ou des mois considérés.
Le nombre maximum d'heures indemnisables est fixé à 600 heures par an et par salarié.
Le chômage partiel ne peut être supérieur à 28 jours
Si l'arrêt momentané de l'activité dure plus de 28 jours, l'employeur et l'Etat cessent
de verser les allocations.
C'est l'Assedic qui prend alors le relais pour une durée maximum de 182 jours.
Pour percevoir une indemnisation de la part de l'Assedic, le salarié doit s'y inscrire en
tant que demandeur d'emploi et remplir les mêmes conditions que celles exigées pour
avoir droit au chômage.
Des allocations chômage à partir du 29e jour
Après 28 jours de chômage partiel, l'Assedic indemnisera le salarié après avoir
vérifié que l'employeur a obtenu une autorisation de chômage partiel. Le salarié sera
indemnisé dans les mêmes conditions que s'il avait été licencié alors qu'il ne l'est
pas.
T. Beausseron zzz60t zzz60r
Pour bénéficier du chômage partiel, vous devez obligatoirement retirer ce
formulaire de demande préalable auprès de l'inspection du travail ou de la DDTEFP, et le
renvoyer à la DDTEFP.
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L'Hôtellerie n° 2741 Hebdo 25 Octobre 2001