Installé au cur de la Ville rose chère à Nougaro, depuis 17 ans, Dominique Toulousy défend avec passion sa définition de la cuisine malgré la perte douloureuse d'une deuxième étoile au Guide Rouge 2000.
Maryse et Dominique Toulousy ont retrouvé l'énergie de leur jeunesse.
Il vient rarement
en salle, et lorsqu'il apparaît, c'est avec une instinctive retenue. Sa place est aux
fourneaux, aux achats ou encore avec les membres de sa brigade... Cette évidence se lit
dans l'expression de son visage. Il sourit, mais les traits anguleux se figent dans un
moment d'hésitation. Derrière des lunettes aux branches multicolores - seule touche de
fantaisie dans l'apparence résolument classique qu'il donne au premier abord -, deux yeux
vifs et bruns observent, sondent, interrogent, s'interrogent. L'angoisse de l'imperfection
l'a toujours tenaillé. Pourtant, le MOF a fait ses preuves et sa recette de Raviolis de
foie gras au jus de truffe, créée dans le Gers il y a plus de 20 ans, est entrée dans
l'histoire de la gastronomie. C'est en 1984 que Dominique Toulousy et son épouse, Maryse,
décident de s'installer à Toulouse sur la place du Capitole. Le pari est audacieux, mais
le couple, qui a obtenu 1 étoile au Guide Rouge à Auch, se donne les moyens
d'aller plus loin. Elle en salle, lui en cuisine, du matin au soir, 7 jours sur 7. Ils
savent faire. A l'époque, l'établissement présente seulement quelques tables. L'année
suivant son installation, Dominique Toulousy, dont la carte s'est enrichie de Cassoulet
aux fèves ou de Figues rôties au banyuls, retrouve avec bonheur l'étoile au Guide
Rouge. Par étape, la maison va s'agrandir. "Les gens ont besoin d'espace et
nous avons créé la rotonde. L'été, les clients sont au cur de la ville, mais
bénéficient d'un endroit privilégié, loin du bruit et sous les parasols",
commente alors Maryse.
La 2e étoile au Michelin arrive en 1987. "Ça fait toujours peur, une
deuxième étoile. C'est aussi extrêmement motivant", confie Maryse. La maison
élargit sa brigade pour atteindre une vingtaine de personnes. Les Jardins de l'Opéra
deviennent une étape incontournable dans la région. En 1996, l'établissement qui fait
cour commune avec la brasserie Le Grand Café et l'Hôtel de l'Opéra subit le contrecoup
des incendies criminels qui ont touché à 6 mois d'écart les deux affaires. Image
négative, gravats, enquête.
Nouvelles exigences
Dans le même temps, les Toulousy doivent se plier aux nouvelles tendances et tentent, le
midi, un menu déjeuner d'affaires. Malheureusement, à Toulouse, les entreprises sont
davantage en périphérie et rechignent à se fourvoyer dans les embouteillages du centre.
Et puis, lance un client à Dominique Toulousy, "quand on vient chez vous, on n'a
pas envie de regarder l'heure. C'est frustrant de ne pas prendre son temps...".
Joli compliment qui va à l'encontre toutefois de la démarche. La fin des années 90 est
aussi marquée par un fort turn-over du personnel. Les Jardins de l'Opéra n'échappent
pas au phénomène. Alors que Dominique Toulousy perpétue un savoir-faire, un couperet
tombe. Les Jardins de l'Opéra perd sa 2e étoile dans l'édition 2000 du Guide Rouge.
Tous les restaurateurs qui ont vécu l'épreuve en connaissent la dureté, la douleur, les
conséquences.
C'est le risque du métier, accepte aujourd'hui Dominique Toulousy. 2000 a été une
mauvaise année. Elle va pourtant se terminer sur un nouveau constat. Les Jardins de
l'Opéra a conservé ses habitués. Cette fidélité renforce l'état d'esprit de
Dominique Toulousy. "J'ai des principes. En cuisine, il y a des choses que j'aime
et que je ne pourrai jamais transgresser. Je ne peux pas faire de concession sur la
marchandise. Je refuse par exemple d'aller acheter dans les cashs. Le contact avec le
fournisseur demeure pour moi essentiel. Je suis un artisan et je veux continuer de
travailler avec ces artisans qui vendent sur le marché leurs propres productions."
Une profession de foi qui sonne comme les premiers rayons de lumière après un long
tunnel. Les Toulousy ont, semble-t-il, retrouvé l'énergie de leur jeunesse. Ce dernier
trimestre 2001 sera consacré en partie à la rénovation du restaurant. Quant au
cuisinier, peu bavard habituellement, nous l'avons écouté longuement parler de la
qualité et de l'authenticité des produits. Le visage animé maintenant d'une volonté à
toute épreuve. A nous aussi, buveurs de sensations, il était en train de transmettre sa
passion.
S. Soubes zzz18p
En dates Juillet 1984 |
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L'Hôtellerie n° 2745 Hebdo 22 Novembre 2001