Aix-en-Provence
Les cafetiers et restaurateurs aixois ont suspendu l'opération ville morte et la manifestation prévue devant la mairie. A l'arraché, ils ont obtenu gain de cause.
Les cafetiers et restaurateurs entendent négocier une charte avec la mairie.
C'est le monde à
l'envers ! La très bourgeoise cité vient d'être le témoin d'une partie de cartes qu'on
s'attendait plutôt à trouver sur les quais de Marseille, sa voisine. C'est ainsi.
L'ambiance est chaude sur le Cours Mirabeau et le centre-ville depuis que la dernière
tranche de travaux, démarrée en janvier, handicape à ce point les commerces : les
chiffres d'affaires auraient chuté de 30 % depuis le début d'année. Entre le bruit, le
chantier condamnant des terrasses durant plusieurs semaines, la suppression de dizaines de
places de parking, la mise à sens unique du Cours et les difficultés d'accéder au
centre-ville, les professionnels sont excédés. Exemple, M. Bégué, directeur du Bistro
Romain : "Je n'ai plus de terrasse depuis début janvier. La mairie s'était
engagée à me la rendre le 22 mars et je ne vois rien venir. Je suis sinistré. Si je ne
faisais pas partie d'un groupe, j'aurais dû tirer le rideau."
Tout aurait pu rentrer dans l'ordre, une fois le chantier terminé, si le premier adjoint,
Jean Chorro, n'avait commis un impair "en voulant imposer une charte de qualité
sans concertation préalable". La citation est de Pierre Alfonsi, président des
cafetiers pour le CHR 13. Cette 'bourde' politique, à quelques jours des élections, a
été la goutte qui a fait déborder le 'verre'. Si on y ajoute la manière "peu
concertante" dont a fait preuve la nouvelle municipalité en indiquant qu'elle
souhaitait piétonniser le centre-ville, changer le sens de circulation, réduire les
terrasses... on imagine que les conditions étaient réunies pour que le conflit éclate.
Une bataille qui, en pleines élections législatives (la maire, Maryse Joissains-Masini,
candidate UMP, a été élue dès le premier tour), fait désordre dans un scrutin ouvert.
La charte de qualité met le feu aux poudres
Retour en arrière. Jean Chorro, premier adjoint, chargé des grands travaux, pond une
charte de qualité de 40 pages dont l'objectif est de donner une unité au mobilier urbain
et aux couleurs. En même temps, la municipalité souhaite que les
cafetiers-restaurateurs, dont les terrasses avaient débordé de leurs limites pendant les
travaux, reviennent à la situation antérieure. Elle parle aussi de piétonniser le
centre-ville, de maintenir le Cours Mirabeau à sens unique.
La question de la charte met le feu aux poudres alors qu'elle est réclamée depuis
longtemps par Pierre Alfonsi "pour tranquilliser ses adhérents" et
éviter que les changements politiques ne remettent tout en question du jour au lendemain.
Ce qu'il conteste avec ses adhérents, c'est la manière dont elle a été élaborée.
Pierre Chorro et la mairie affirment "qu'elle a fait l'objet d'une très large
concertation", et annoncent 38 réunions sur le sujet.
Les professionnels maintiennent, lettres et fax à l'appui, qu'ils n'y ont jamais
participé. Ils dénoncent la façon dont on traite ceux qui créent des emplois et paient
des impôts. Pierre Alfonsi : "On ne sait jamais à qui s'adresser. On n'a jamais
le même interlocuteur. Les rumeurs et leur contraire circulent. Cela fait des semaines
que notre syndicat demande un rendez-vous au maire, et on nous ignore. On nous traite
comme des malfrats." M. Bohet, hôtelier et président de Cegis, l'association
des commerçants de la ville, explique : "La municipalité se conduit comme son
prédécesseur, sans concertation. On veut que les chefs d'entreprise soient enfin
considérés comme force de proposition."
L'époux dans le rôle du maire
A l'approche des élections, la tension est montée jusqu'à ce que Pierre Alfonsi et le
CHR 13 annoncent une manifestation devant la mairie le 3 juin, ainsi qu'une opération
'rideaux baissés'.
Jeudi 30 mai, tout le monde, associations de commerçants, CIQ, CHR 13... était convoqué
pour une réunion à la mairie. Signe de l'importance du sujet, les cafetiers et les
restaurateurs s'étaient déplacés en masse pour appuyer Pierre Alfonsi. Sans entrer dans
le détail d'une réunion d'anthologie politique, on notera que Maryse Joissains était
représentée par M. Joissains, son époux - directeur de cabinet -, ancien maire
lui-même. Jean Chorro étant passé à la trappe de la négociation, M. Joissains était
accompagné par M. Zazoun, ancien patron de restaurant devenu adjoint chargé des
emplacements publics. Il fut curieusement muet lors des débats.
Pour Pierre Alfonsi et ses adhérents, "cette réunion était une mascarade où M.
Joissains a tenté de noyer le poisson en faisant venir des gens qui n'avaient rien à
faire". Il est vrai que l'ancien avocat manie assez bien la rhétorique, et a
l'art de régler une situation en la décortiquant. Il est vrai aussi que celui-ci a mis
en avant la menace d'un référendum qui trancherait entre des points de vue
contradictoires. Commencée à 16 h 30 en séance publique, dans une atmosphère "difficile"
où, lassé, le CHR 13 a fini par partir dans le couloir, la réunion s'est achevée vers
22 heures dans le cabinet de M. Joissains. Au final, Pierre Alfonsi et ses adhérents ont
obtenu que rien ne se fasse désormais sans concertation, notamment en ce qui concerne la
piétonisation, le changement des sens de circulation et la superficie des terrasses.
Quant à la charte de qualité, le CHR 13 maintient sa position. "Nous ne pouvons
plus accepter l'abus de pouvoir de certains nouveaux élus, ni leur épée de Damoclès
suspendue au-dessus de quiconque n'est pas de leur côté. Par ailleurs, nous ne savons
toujours pas quel est notre interlocuteur."
A Aix comme à Marseille, les chefs d'entreprise veulent être considérés comme des
acteurs économiques, et non comme des quantités négligeables. Le message aura-t-il
été entendu ? A suivre.
D. Fonsèque-Nathan zzz74v
Le coup de gueule de Pierre AlfonsiC'est
l'établissement, début mai, d'une charte des terrasses concernant le Cours Mirabeau,
dont les termes n'ont pas été discutés avec l'Union CHR 13 d'Aix, qui a fait bondir le
président du syndicat. Qui ne décolère pas depuis. |
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L'Hôtellerie n° 2773 Hebdo13 Juin 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE