Plus de 3 mois après les inondations dans le Gard
De très nombreux professionnels sinistrés restent en l'attente d'indemnités, d'autorisations d'ouverture. Situation particulièrement inquiétante pour ceux qui se sont vus refuser la réouverture de leur établissement. Leurs maisons vont disparaître. C'est le cas, à Collias, de 3 établissements.
"Je dois attendre mon expropriation pure et simple", explique
Pierre Chamboredon.
Un arrêté
préfectoral en date du 28 novembre a prononcé l'arrêt de l'exploitation de 2
restaurants et d'un hôtel-restaurant. Un coup dur pour des professionnels qui vivaient
avec l'espoir d'effacer les traces de la catastrophe et de relancer leur entreprise au
printemps. Si le propriétaire du restaurant Les Terrasses, exploité sans l'ensemble des
autorisations nécessaires, pouvait s'attendre à pareille décision, pour ses deux
confrères, c'est une autre histoire...
Mais voilà, à Collias, Madame le maire a pris des mesures sévères dont les
particuliers sont également victimes. Ainsi, 43 maisons totalement ou partiellement
détruites ou simplement endommagées par les flots devront disparaître et être
reconstruites ailleurs.
Dans le Gard où plus de 350 établissements à vocation touristique ont été déclarés
sinistrés, d'autres décisions semblables seront prises au cours des semaines à venir et
feront d'autres victimes chez des professionnels qui avaient fait de la proximité de la
rivière un atout commercial. Une situation que Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au
tourisme, viendra découvrir avec un certain recul... le 6 février prochain. Une visite
que certains jugent particulièrement tardive par rapport à la date de la catastrophe.
Pierre Chamboredon face à l'injustice de sa future expropriation
Propriétaire de L'Enclos, cet ancien responsable régional du SNRLH ne comprend pas
pourquoi on veut la disparition de son restaurant. Le 9 septembre dernier, au plus fort de
la crue du Gardon, Pierre Chamboredon a vu son restaurant L'Enclos disparaître sous les
eaux. Une première depuis 17 ans qu'il l'a construit en contrebas du charmant village de
Collias, à quelques kilomètres du pont du Gard. "Lorsqu'on m'a attribué le
permis de construire en 1987, le terrain n'était pas déclaré en zone inondable. 11 ans
plus tard, les choses ont changé et cette parcelle est passée en zone R1 sans que cela
ne remette en cause l'exploitation d'un restaurant qui avait deux issues, un côté
rivière et l'autre côté village, au cas où. De toute façon, au moment de la
construction, j'avais envisagé le pire et la structure était en béton renforcé. Sans
cela, il ne serait plus là aujourd'hui..."
La rivière assagie, Pierre Chamboredon a pu constater qu'il avait fait le bon choix. Les
murs n'avaient pas bougé, et dans leur majorité, les vitres de la véranda ouverte sur
le cours d'eau étaient intactes. "Seul le toit avait subi quelques dégâts
provoqués par les arbres que charriait la rivière. Mais rien de catastrophique. J'en ai
même profité pour enlever les plaques contenant de l'amiante sous les tuiles."
En même temps qu'il entreprenait les démarches auprès de son assureur et des
différentes administrations, le restaurateur entreprenait les travaux de nettoyage.
"Je n'avais que l'idée de la réouverture en tête. L'expert a estimé à 100 000
e le montant des travaux et notre assureur a bien joué le jeu en débloquant une
première avance, et de mon côté, j'ai tout fait pour accélérer les travaux afin
d'être prêt mi-avril." Pourtant, il aurait dû se méfier des premiers
courriers émanant de la mairie et interdisant tout lancement de chantier avant la
décision préfectorale.
Dans l'attente de l'expropriation
"Eliette Galzy, la mairesse, avait pris sa décision dès le début du mois de
novembre et attendait simplement que le préfet l'entérine. Avec un arrêté qui précise
que 'la construction ne peut être réhabilitée ou réoccupée à des fins
d'habitation ou de restaurant', je dois attendre mon expropriation pure et simple. Avec
les conséquences qu'une telle décision peut entraîner et notamment de devoir faire une
croix sur les indemnisations pour perte d'exploitation puisqu'il n'y aura pas de reprise
d'activité." Une somme que Pierre Chamboredon estime à plus de 45 000 e. Le
moral en berne - "c'est maintenant que toute la famille aurait besoin de l'aide
d'une cellule de soutien psychologique" -, il attend la suite des événements.
Le début de négociations pour aboutir à une indemnisation digne de ce nom. "J'ai
51 ans, conclut le restaurateur, et tout notre argent est dans cette affaire que
nous avions créé et qu'aujourd'hui on nous empêche d'exploiter..."
Jean-Louis Jourdain attend de nouvelles solutions
Le Gardon, son hôtel-restaurant inscrit aux Logis de France entièrement dévasté, ne
sera pas réhabilité. Il cherche donc un nouveau terrain pour construire un nouvel hôtel
ou bien une affaire à reprendre. L'arrêté préfectoral qui déclare que son "bâtiment
ne peut être réhabilité à des fins d'habitation, d'hôtel ou de restaurant",
a libéré Jean-Louis Jourdain d'un poids très lourd. "C'est qu'avec ce que nous
avons vécu ici, je me voyais mal reprendre l'activité sur place. Aujourd'hui, nous avons
achevé le nettoyage et nous récupérons tout ce qui peut l'être. Cela réduira d'autant
les investissements à réaliser sur la construction d'un nouvel hôtel."
Car cet hôtelier installé à Collias depuis avril ne s'imagine pas renoncer aussi vite.
Certes, il a perdu beaucoup en même temps que son outil de travail était envahi par
l'eau, mais sa nouvelle région d'adoption lui plaît. Et dans ce cas, deux solutions
s'offrent à lui. "Soit, avec l'aide de la mairie, nous trouvons un terrain plus
en hauteur mais toujours à proximité des gorges du Gardon, et nous construisons un
hôtel, soit nous dénichons une affaire à la vente et nous la reprenons. Dans les deux
cas, notre assureur va nous accompagner financièrement. Mais je ne pense pas que dans le
cas d'une construction, les indemnisations couvriront l'intégralité du montant du
chantier, et j'estime aujourd'hui entre 75 000 et 90 000 e la somme qui sera à
notre charge. Ce sera le prix à payer..."
Jean-Louis Jourdain suit de près l'évolution d'un dossier qu'on lui a promis de traiter
en priorité. Surtout s'il se dirige, solution qui a sa préférence, vers une
construction neuve. Il faudra alors viabiliser le terrain afin de le rendre constructible
au plus vite. "Mais avec un maximum d'optimisme, je ne vois pas cette affaire
réglée avant le mois de mars 2004", conclut-il. zzz36v
J. Bernard
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L'Hôtellerie Restauration n° 2802 Hebdo 02 Janvier 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE