Le Bull Dog à Viroflay (78)
L'Académie de billard de Virginie et Dafydd Hughes dérange. L'établissement, tenu pourtant avec rigueur, fait l'objet d'une véritable cabale de la part de la copropriété. Récit d'un harcèlement ordinaire.
Lors de son entrevue avec le maire, et malgré le soutien des fidèles du
Bull Dog, Virginie Hughes n'a rien obtenu.
Traits tirés, joues creusées, Virginie Hughes rabâche depuis des semaines la même litanie. Mauvaise foi du voisinage, arrêté arbitraire, perte d'exploitation. La propriétaire du Bull Dog en a gros sur le cur et pour cause. Son joli regard triste n'a pas ému le maire de Viroflay, qui l'a reçu le samedi 25 janvier au matin alors qu'une cinquantaine de manifestants criait leur soutien au Bull Dog devant l'hôtel de ville. L'affaire remonte à 1996. Virginie Hughes et son mari, Dafydd, solide Gallois, ancien rugbyman de 1re division et passionné de billard, décident de se lancer dans la création d'une académie de billard. Jusque-là, tout va bien. Le couple parvient à convaincre les banques et trouve le local "idéal" : une ancienne menuiserie, au rez-de-chaussée d'un immeuble récent, dans la banlieue Ouest. Le couple, prudent de nature, rencontre le maire de Viroflay avant la signature du bail. Le premier magistrat est séduit par le projet, leur avouant qu'il fut lui-même, dans sa jeunesse, un joueur assidu de billard. "Nous avons aussi rencontré trois représentants de la copropriété qui étaient ravis", se souvient Virginie. Mais le temps se gâte très vite. Le permis de construire déposé, les hostilités commencent. Des voisins traitent le futur établissement de "bar à tapin" dans lequel vont se retrouver "une multitude de drogués". Alors que le couple s'est engagé sur ses deniers personnels, a pris des crédits, que le bail est en règle, la copropriété s'oppose subitement, toutes griffes dehors, à la création de l'établissement. Or, sans l'autorisation de la copropriété, pas d'ouverture possible. Le couple porte l'affaire devant le tribunal administratif. Recours, appels, le dossier va jusqu'en cassation. Les Hughes obtiennent gain de cause, mais après 4 ans et 8 mois de procédure. Les copropriétaires récalcitrants n'ont pas dit leur dernier mot.
Grille et digicode
Dès les premiers jours d'exploitation, pétitions et plaintes vont bon train. Cette fois,
le Bull Dog est accusé de nuisances sonores, malgré un limiteur de bruit fixant le seuil
de saturation à 68 décibels (largement en dessous de la barre imposée par la loi).
Experts, huissiers, les tracasseries continuent. Tout est bon pour déloger les amateurs
de billard. La copropriété va même jusqu'à installer une grille à digicode devant
l'entrée principale du Bull Dog, interdisant le libre accès à la clientèle. Les Hughes
partent de nouveau en croisade et gagnent la procédure. "Le même mois, nous
avons eu droit à un contrôle de sécurité organisé par la commission communale de
sécurité, avec, comme intervenants, l'adjoint au maire, les pompiers et la police.
Contrôle effectué à la demande du président du syndic", relate Virginie. Tout
est aux normes. Un seul tampon sur une facture fait défaut. Les Hughes sont menacés de
fermeture s'ils ne rentrent pas dans la légalité dans les 2 jours qui suivent...
Parallèlement, l'Académie trouve son rythme. C'est la seule salle de pool de la région
parisienne. Parmi les fidèles, le champion du monde 2002 classe B. Des professionnels y
donnent des cours. Les Hughes sont des gens sérieux et le billard n'est pas un jeu de
perdition. Qu'importe. La pression continue. En août 2002, Gilles Martin, par décret,
impose au Bull Dog de fermer ses portes à minuit au lieu de 2 heures. "Un vrai
désastre pour nous, car l'essentiel de notre activité a lieu entre 22 heures et 2 heures
du matin. Les joueurs viennent très souvent après dîner et ont besoin de temps pour
jouer." Les Hughes montent une nouvelle fois au créneau. Le tribunal
administratif de Versailles casse l'arrêté pour vice de forme. Le maire aurait dû
convoquer les Hughes avant de prendre l'arrêté. Ce qu'il fait le 13 décembre dernier.
Un nouvel arrêté tombe. Et pas question de bénéficier d'une extension d'horaire le
week-end. Le préjudice est sévère : 40 % de chiffre d'affaires en moins. Lors de son
entrevue avec le maire, et malgré le soutien des fidèles du Bull Dog, Virginie Hughes
n'a rien obtenu. En attendant les résultats des expertises, qui n'interviendront qu'avec
l'arrivée de l'été. Les experts mandatés par la copropriété estimant qu'ils ne
peuvent mesurer les nuisances extérieures en hiver, saison durant laquelle les
consommateurs, à cause du froid, s'empressent de rentrer chez eux...
S. Soubes zzz24
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L'Hôtellerie Restauration n° 2808 Hebdo 13 Février 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE