du 17 juillet 2003 |
ÉDITO |
Molière en aurait sûrement fait l'une de ses farces dont il avait le
secret pour dénoncer les petits et minables travers de nos semblables. Avec les
'intermittents du spectacle', appellation qui recouvre un système très avantageux
d'assurance chômage au profit exclusif d'une minorité dont l'ardeur à la tâche n'a
jamais été la vertu dominante, notre grand dramaturge aurait concocté une comédie
dramatique en 3 actes intitulée Les fourbes ridicules.
Premier acte : le Grand Argentier (aujourd'hui le contribuable) s'étonne des privilèges
abusifs dont bénéficie le moindre tâcheron qui pose un tréteau par-ci, enfonce un clou
ailleurs, déplace un fauteuil ou repeint un panneau, à l'occasion d'un spectacle, bien
sûr. Le tout fondé sur l'imparable raison du 'rayonnement culturel' dont notre pays est
si fier. Comme il faut bien, à un moment ou un autre, mettre de l'ordre dans ce système
insensé, le Grand Argentier formule des propositions susceptibles de convenir au plus
grand nombre. Bien entendu, la gente festivalière se rebiffe à la perspective d'être
obligée de travailler davantage (si peu néanmoins) pour continuer à profiter de ses
très longues vacances.
Deuxième acte : autour des représentants des 'intermittents du spectacle', qui l'eut
cru, les professionnels de l'agitation permanente, dinosaures de l'extrémisme,
spécialistes de la désinformation, songe-creux de la révolution permanente dont on
avait mesuré la capacité de nuisance en même temps que la vacuité intellectuelle lors
de la dernière élection suprême, se ruent sur une aussi belle occasion de
réapparaître, l'embastillement de l'un des leurs déguisé en faux paysan du Larzac
n'ayant guère ému les foules.
Cet acte de la pièce est le nud du drame : tout est bon pour affirmer les
contrevérités les plus énormes (et ça marche, hélas), manipuler les esprits faibles
fort nombreux apparemment dans le métier, 'l'intermittence', on le conçoit, n'aiguisant
guère le sens critique. Opération réussie aux yeux d'une foule aveugle : La Rochelle,
Montpellier, Aix-en-Provence, et aussi Avignon annulent leurs festivals dans une ambiance
de 'grand soir' digne des plus mauvais épisodes de la glaciation totalitaire.
Troisième acte : le calme est retombé sur les amphithéâtres et les arènes... Dans les
rues vides, les metteurs en scène ont depuis longtemps tiré le rideau, les bistrots et
les restos ont fermé leurs portes, les spectateurs ont déserté les hôtels où ils
avaient réservé.
Quant aux fameux 'intermittents', ils ne méritent plus leur appellation : ils sont
devenus des 'permanents' du chômage. Et avec eux, sans doute tous ceux qui, depuis des
années, ont uvré pour le développement de cette 'exception culturelle' qui
faisait partie de notre art de vivre.
Mauvaise farce, certes, mais aussi triste réalité d'un pays où une poignée
d'irresponsables peut ainsi mettre en péril l'économie de régions entières. Sans
risque pour eux d'en subir la moindre conséquence, partis qu'ils sont vers d'autres
fronts de la contestation répandre leur poison et leur venin.
L.H. zzz80
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L'Hôtellerie Restauration n° 2830 Hebdo 17 Juillet 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE