du 18 mars 2004 |
PETITE RESTAURATION |
35 h, DVD, écrans plats et pizzas livrées
Oh !.. Poivrier ! c'est le spécialiste des tartines. Plus 10 % de chiffre d'affaires l'an dernier. Un concept né en 1985, qui s'inscrit résolument dans la tendance du midi. Didier Chenet, dirigeant de la chaîne depuis 1993, revient pour nous sur ses forces
et ses remises en question. Interview.
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L'Hôtellerie : Comment
situez-vous votre concept aujourd'hui ? Comment évolue-t-il ?
Didier Chenet : Sur l'assiette, sur le produit
servi, on est complètement dans la tendance. Tout ce qui est sandwichs ou tartines
fonctionne parfaitement à midi. En ce qui concerne le design, il doit évoluer. En 1985,
le côté épuré, métallique était formidablement moderne et adapté à l'époque.
Aujourd'hui, je cherche à donner plus de chaleur aux établissements, avec une approche
différente le midi et le soir. Au déjeuner, le client veut le bon rapport
rapidité/qualité. Je veux qu'il soit satisfait dans une formule qu'il connaisse et qu'il
sache rapide. Sachant que les gens arrivent de plus en plus tard et avec un temps
extrêmement compté, on est confrontés à un véritable rush. Le créneau, c'est 12 h
45/14 heures. On ne fait plus deux services mais un et demi. Le soir, je demande à mes
équipes de s'occuper davantage de la clientèle. On essaie d'accentuer l'aspect
cocooning. On met par exemple des napperons et des photophores sur les tables.
L'Hôtellerie : Quelle
est la bonne fourchette de prix, selon vous ?
Didier Chenet : L'équation qu'il faut résoudre
est la suivante : il faut des produits de qualité, une certaine quantité et des prix
raisonnables. Le client sait très bien combien il veut mettre. Chez moi, de 15 à 17 e.
Il ne veut pas aller au-delà. Si c'est plus, même s'il en a eu pour son argent, il ne
sera pas content. Car ce sera décalé par rapport au produit. Aujourd'hui, compte tenu
des marges très réduites, il faut faire du volume. Je n'ai pas augmenté mes prix depuis
18 mois. Mes clients ne suivraient pas.
L'Hôtellerie : La
clientèle parisienne sort-elle le soir ?
Didier Chenet : Avant, tout ce qui était loisir
marchait très fort. Et j'en bénéficiais. Actuellement, les gens sortent moins. Mes plus
gros concurrents, ce sont les DVD et les écrans plats. Suivis par les pizzas livrées et
les surgelés. C'est un changement important. Avant, le mercredi, c'était fort parce
qu'il y avait la sortie des films. Le vendredi soir, les gens se lâchaient. Maintenant,
les départs en week-end et les rythmes scolaires ont été exacerbés par les 35 heures.
Aujourd'hui, aller au cinéma, manger au restaurant, sans oublier le coût de la
baby-sitter, ça chiffre aussi. Ceux qui habitent la banlieue n'ont pas non plus envie de
revenir sur Paris. Il faut être conscient de ces tendances. La clientèle de 30 ans sort,
mais quand elle sort deux fois, la clientèle étudiante sort quatre fois. C'est un
marché que j'ai décidé de travailler. Pour capter les étudiants, c'est une question de
prix adapté. Attention, il ne s'agit pas de rogner sur la quantité. Il faut au contraire
qu'ils aient plus que le menu traditionnel. J'ai lancé le menu étudiant dans cet esprit.
C'est un menu servi à partir de 21 heures et sur présentation de la carte d'étudiant.
Il est fixé à 10 e.
L'Hôtellerie : Quelle
image souhaitez-vous donner ?
Didier Chenet : Oh !.. Poivrier ! a plutôt bien
résisté au changement culturel. On est toujours profitable. Néanmoins, la remise en
question est perpétuelle. J'ai une petite activité traiteur. Nous ne copions pas les
autres traiteurs, nous faisons ce que nous savons faire. C'est-à-dire toutes sortes de
tartines découpées. Cette activité est un moyen de nous faire connaître, de dire qu'on
existe. Je n'ai pas les possibilités de faire une campagne publicitaire grand public.
Sinon, nous développons les assiettes et les plats à emporter. Une certitude, je ne
ferais pas de livraison. Ce n'est pas le même métier. Quant au concept, je vous l'ai
dit, je veux que la clientèle trouve chez moi quelque chose de chaleureux, une offre plus
variée et encore plus de liberté. Il faut qu'elle puisse changer les ingrédients dans
les assiettes. Il faut qu'il y ait plus de sourires. Le service ne doit pas être un acte
mécanique. Il ne faut pas que le client ait l'impression que tout est prédigéré. En
fait, il ne faut pas forcer les ventes. Aujourd'hui, un groupe de
20 personnes arrive sans réservation. Ce ne doit pas non plus être un problème. Il ne
doit pas y avoir de refus de notre part. Nous devons faire tout ce qui est inhabituel à
une chaîne. L'enseigne doit rassurer. On est le restaurant de bureau à midi. Le soir, le
client ne doit pas retrouver le bureau. Nous devons nous adapter et bouger en fonction de
la demande.
L'Hôtellerie : Choisissez-vous
du personnel étudiant ou qualifié ? Et dans quelles proportions ?
Didier Chenet : J'ai pas mal d'étudiants.
Toutefois, je le répète, travailler dans la restauration n'est pas, contrairement à ce
qu'on dit, un petit boulot. C'est un vrai boulot. Les étudiants aussi ont changé. En
1985, ils venaient travailler pour se payer des voyages, pour s'offrir un peu de luxe.
Maintenant, ils viennent parce qu'ils ont besoin d'argent pour payer leur loyer, leurs
études... Ils ont déjà les soucis des gens installés. On les fait mûrir avant l'âge.
Ce n'est pas facile de leur demander d'être souriants et détendus quand ils ont fait des
heures de transport. Le problème du logement est un phénomène aussi parisien. Les gens
sont crevés par les transports. Ce n'est pas facile à gérer. En salle, ce sont des gens
que je professionnalise. En cuisine, c'est stable. J'ai des personnes qui ont 15 ans de
maison. En ce qui concerne l'encadrement, j'essaie d'assurer un équilibre entre des
personnes issues des écoles hôtelières et des actions commerciales. La restauration est
un métier de vente et de prescription. Je n'aime pas parler de pénibilité. En revanche,
c'est vrai qu'il y a des contraintes. Plus les gens font la fête, plus on travaille.
Evidemment, il faut être disponible. Mais c'est un métier formidable, qui permet de
voyager, d'être en contact avec des gens très différents.
L'Hôtellerie : Pourriez-vous
revenir sur la réactivité nécessaire à la profession ?
Didier Chenet : Quand je parle de réactivité,
c'est savoir faire des choix. J'avais un établissement rue Pierre Charron qui
fonctionnait parfaitement le midi et qui n'était pas rentable le soir. J'ai pris la
décision de le vendre. Grâce à cette vente, je vais pouvoir investir dans la
rénovation d'autres sites. Les deux gros chantiers à venir concernent les sites de
Montparnasse et du boulevard Malesherbes. Nous ne sommes plus dans une période
d'abondance. Il faut voir les choses autrement. Au CNIT-La Défense, nous faisons des
volumes suffisants en journée pour fermer le soir. En fait, j'envisage de m'installer en
propre dans des zones où je sais qu'on ne travaillera que de 9 heures à 15 heures.
J'étudie ce type de développement. Je pense aussi à tout ce qui est centre commercial,
gare, aéroport... L'étranger est également un axe de développement auquel je
réfléchis, sous forme de franchise, cette fois.zzz36c
Oh !.. Poivrier ! c'est...
a Un premier site à Paris en
1985
a 17 restaurants en France, dont
6 sous franchise et 1 restaurant aux Emirats Arabes Unis depuis le 1er janvier 2004
a Plus de 1 400 000 clients par
an
a 22 Me de chiffre d'affaires en
2003 (en augmentation de 10 % par rapport à 2002)
a Un ticket moyen de 15,50 e (TVA
19,6 % incluse)
a 425 employés dont 50 % en
temps partiel
www.ohpoivrier.com
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L'Hôtellerie Restauration n° 2864 Hebdo 18 mars 2004 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE