du 18 mars 2004 |
ÉDITO |
La communication, c'est un métier, et difficile de
surcroît. Presque autant que celui de restaurateur, qui présente l'avantage de n'avoir
pour seul juge que son client, qui sait s'il en a pour son argent ou pas.
Tandis que l'art des plateaux de télé et des interviews, c'est un autre sport, où
la moindre erreur ne pardonne pas. Pour reprendre une métaphore sportive, la plus mince
faute de carre et c'est le gadin assuré !
Et ces derniers jours, malgré une actualité hélas autrement dramatique, la
profession a eu l'occasion d'occuper plus que de coutume les tréteaux de l'information.
D'abord, et c'est un fait qu'il serait dangereux d'occulter, le dernier conseil des
ministres de l'Economie de l'Union européenne a complètement 'oublié' de finaliser le
lancinant dossier de la baisse de la TVA en restauration. Il va dorénavant falloir
négocier à 25, et des voix, et non des moindres, s'élèvent déjà pour exprimer leur
scepticisme sur une solution rapide et favorable à la profession.
D'autant que des commentateurs de haut niveau ne se privent pas pour tirer à boulets
rouges sur le dispositif transitoire d'allégement des charges obtenu auprès du
gouvernement, et dont vous pouvez lire tous les détails dans ce numéro. Contentons-nous
des propos habituellement plus mesurés de l'économiste Nicolas Baverez (l'auteur du trop
fameux
La France qui tombe), qui se livre dans la dernière livraison du Point à
une attaque en règle contre les restaurateurs qui n'ont certainement pas mérité cette
indignité. Sous le titre provocateur 'La république des maîtres chanteurs',
l'éditorialiste de l'hebdomadaire ne mâche pas ses mots : "Les restaurateurs
viennent de mettre à profit la campagne électorale des élections régionales pour
réaliser le hold-up du siècle sur les finances publiques françaises" ou encore
: "Les restaurateurs ont créé un sinistre précédent en recourant de manière
explicite à la menace du vote en faveur du Front national pour faire pression avec
succès sur le président de la République et le gouvernement."
En fait, sans répondre à de telles attaques (les mots 'hold-up du siècle',
'prise en otage', 'sinistre précédent' laissent entendre que les
aubergistes de ce pays seraient de fieffés malfaiteurs), il faut essayer d'analyser la
source d'un tel déchaînement : pas besoin d'être un sociologue confirmé pour
comprendre que le mal vient en grande partie d'un excès de communication. Obtenir un
avantage spécifique nécessite un minimum de discrétion. Avez-vous lu dans Le Point
une critique aussi virulente des négociations conduites par le gouvernement français
avec les autorités judiciaires de Californie à propos de l'affaire Executive Life, qui
coûtera au contribuable français 475 millions de dollars, ce qui fait, par contribuable,
une ardoise salée par rapport aux allégements de charges consentis aux restaurateurs ?
Il serait évidemment de mauvais goût de rappeler qu'Executive Life appartient au
propriétaire du Point, qui sait rester discret lorsque nécessaire...
Enfin, saluons le courage d'André Daguin, qui s'est véritablement dévoué dimanche
dernier pour défendre la profession sur le plateau de 'On ne peut pas plaire à tout
le monde', authentique entreprise de lynchage médiatique. Le président de l'Umih
faisait face à un 'critique' courageusement masqué et à l'inévitable Coffe, qui, comme
chacun sait, est le mieux placé pour donner des leçons aux restaurateurs. Là encore,
faut-il céder à l'appel des sirènes cathodiques, lorsque d'autres 'stars' du métier
ont poliment décliné l'invitation afin de ne pas tomber dans un piège inévitable ?
La profession n'a besoin que d'elle-même pour mener les combats que ses dirigeants
jugent utiles à engager. Et ses réussites ne doivent pas l'aveugler : les pièges en
tout genre ne manquent pas, y compris chez certains soutiens moins désintéressés qu'il
n'y paraît.
L. H. zzz80
L'Hôtellerie Restauration n° 2864 Hebdo 18 mars 2004 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE