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du 18 novembre 2004
L'ÉVÉNEMENT

EN ATTENDANT L'ARRIVÉE DU TGV À STRASBOURG

LA PROFESSION CONFRONTÉE À LA SURCAPACITÉ HÔTELIÈRE

L'Umih a choisi Strasbourg pour son congrès national qui se déroule du 24 au 26 novembre prochain. L'occasion pour L'Hôtellerie Restauration de faire le point, avec les principaux responsables régionaux de la profession, sur une conjoncture déprimée mais aussi sur des projets porteurs d'espoir comme l'arrivée du TGV-Est dans la capitale alsacienne.

Jean-Louis Clauss,
président du
Groupement des cafetiers-hôteliers-
restaurateurs du Bas-Rhin.
Marie-Claude Ouvrard, responsable du pôle tourisme à la CCI du Bas-Rhin. Roger Sengel, vice-président des restaurateurs du Bas-Rhin.

En 30 ans de carrière, Marie-Claude Ouvrard, responsable du pôle tourisme à la CCI du Bas-Rhin, n'a jamais vu une chute aussi vertigineuse de la fréquentation dans les hôtels du département. Selon l'observatoire de l'hôtellerie, qui a fait réaliser par ses services une étude auprès d'un échantillon représentatif de 45 hôtels (soit 3 500 chambres), les résultats du mois de septembre s'avèrent tous assez mauvais. La communauté urbaine de Strasbourg a ainsi enregistré une baisse de ses taux d'occupation de 7 à 16 % suivant les catégories. Un bilan négatif d'autant plus surprenant que septembre coïncide d'ordinaire avec un redémarrage de l'activité à Strasbourg. "Traditionnellement, la rentrée marque un nouveau départ dans l'activité économique, et là, visiblement, ce n'est pas le cas", indique Marie-Claude Ouvrard.
À deux pas de la cathédrale, dans le hall d'accueil du Sofitel Strasbourg Centre - le premier au monde ouvert en 1964 -, Jean-Michel Lathuillière, directeur général, dresse un constat analogue : "Le mois de septembre a été très difficile, voire catastrophique, et la situation est identique dans tous les établissements 4 étoiles", explique l'intéressé. En effet, toujours selon l'observatoire de l'hôtellerie, la désaffection de la clientèle a touché l'ensemble des hôtels haut de gamme, qui affichent pour le mois de septembre moins de 60 % d'occupation (- 17 points comparé à 2003).
"Nous n'avons pas l'habitude de nous plaindre, confie Patrick Diebold, président des hôteliers du Bas-Rhin. Mais force est de constater que nous vivons une situation inconnue." Et de poursuivre en pointant du doigt l'offre hôtelière de la ville : "Le parc strasbourgeois a augmenté régulièrement depuis 20 ans alors que l'attractivité de la ville n'a cessé de diminuer. En 1979, Strasbourg recensait 1 980 chambres. Aujourd'hui, il y en a 7 300 ! À population équivalente, Strasbourg compte 2 fois plus d'équipements hôteliers que Bruxelles. À l'exception de 2 semaines dans l'année, la ville est en surcapacité hôtelière."

Lente mais durable érosion
Place de Bordeaux, au siège du Groupement des cafetiers-hôteliers-restaurateurs du Bas-Rhin, les dernières statistiques communiquées par la chambre de commerce et d'industrie sont évidemment au centre des discussions… Jean-Louis Clauss, président dudit organisme, parle d'une lente mais durable érosion. "Strasbourg a connu une période faste où les affaires marchaient toutes seules grâce au Parlement européen, au Conseil de l'Europe et au palais des congrès. Avec le contexte économique actuel et la concurrence d'autres villes, la situation locale a évolué. Les parlementaires séjournent moins longtemps (2 nuits par session au maximum), et le palais des congrès - l'un des plus anciens de France - a du mal à cacher son grand âge."
'Enfant gâté' depuis longtemps, Strasbourg se retrouve aujourd'hui dans une situation toujours confortable mais pour le moins inquiétante - "même si c'est moins bien que par le passé, c'est toujours mieux qu'ailleurs", selon Jean-Louis Clauss. "Si les projets d'implantations portés par Marriott et Radisson n'ont pas abouti, c'est bien la preuve que la ville n'est plus aussi attractive que par le passé", concède Jean-Claude Bader, président des restaurateurs du Bas-Rhin, adjoint au maire de Strasbourg, président délégué de l'office de tourisme et également à la tête d'un établissement.
Signe de ces temps difficiles, la ville a récemment engagé une étude de positionnement pour analyser ses points forts et ses points faibles. "Une première dans l'histoire de la ville, qui se contentait jusque-là de la cathédrale, de la Petite France et du munster", note Jean-Claude Bader.

Des motifs d'espérer
Confiée à un cabinet parisien, l'étude a fait l'objet d'un compte rendu partiel avant l'été. Principaux enseignements : Strasbourg ne sait pas se vendre et manque d'un événement fort pendant l'été, comme, par exemple, les marchés de Noël, que beaucoup de professionnels attendent pour équilibrer leurs comptes. "Les hôteliers et les restaurateurs ne manquent pas d'idées, confirme Marie-Claude Ouvrard. Il y a eu un projet de spectacle mis en scène par Robert Hossein, mais il est resté dans les cartons faute de budget." À la place, les Strasbourgeois ont eu droit à un Jardin des deux rives, des floralies organisées conjointement avec les voisins allemands de Kehl. "La manifestation était certes de qualité, mais elle n'a pas bénéficié d'une communication à la hauteur de l'événement", estime Jean-Louis Clauss. "Nous avons dégagé un budget de 20 000 ‚ pour définir les contours d'une autre manifestation tant espérée par les professionnels strasbourgeois, ajoute Patrick Diebold. Le projet de spectacles et d'animations baptisé provisoirement 'Les visiteurs de l'histoire' est bouclé. Le dossier est entre les mains des décideurs locaux. Il s'agit d'un événement pérenne, capable d'attirer des visiteurs de toutes les régions de France et d'Europe." À bon entendeur…
Malgré tout, Strasbourg peut légitimement nourrir des motifs d'espoir dans un avenir assez proche. Tous les professionnels ont d'ores et déjà le regard tourné vers 2007, qui célébrera l'arrivée du TGV-Est en Alsace. Certes, la portion entre le département de la Moselle et le Bas-Rhin ne sera pas à grande vitesse à cette échéance. Il n'en demeure pas moins que la capitale alsacienne se rapprochera sérieusement de Paris : un trajet direct effectué en 2 h 20, contre 4 heures actuellement.
"Géographiquement, nous sommes excentrés, constate Jean-Louis Clauss. Si nous sommes enfin mieux reliés à la capitale, c'est toute l'activité économique qui en profitera." Une évidence que ne conteste pas Patrick Diebold, en insistant cependant sur une nuance d'importance : "Pour profiter de l'effet TGV, il va falloir s'y mettre dès maintenant. Marseille n'a pas attendu que les trains arrivent en gare pour communiquer."

Communiquer et s'adapter
Voilà ce que vont devoir faire les professionnels de l'hôtellerie et de la restauration strasbourgeoises. Car avec le TGV, la typologie de la clientèle se modifie en profondeur, comme le confirme François Cluzel, directeur général de la CCI de Lille où le TGV est arrivé il y a 11 ans : "Depuis que le TGV est arrivé dans le Nord, l'effet tourisme est très important. Il faut se préparer à accueillir un autre type de visiteurs" - ce qui relève du défi pour Strasbourg, longtemps habitué aux flots réguliers de parlementaires, clientèle captive.
Le train à grande vitesse ne porte pas à lui seul tous les espoirs des professionnels alsaciens. La rénovation souhaitée du palais des congrès, l'ouverture d'un guichet unique pour accueillir les demandes relatives à la tenue de conventions, la restauration - enfin - annoncée de La Cour du Corbeau en établissement haut de gamme dans l'un des plus vieux bâtiments de la ville, le lancement d'une campagne de certification dans les hôtels ou la construction d'une gare routière destinée à accueillir les autocars, nombreux en périphérie, témoignent d'un véritable esprit d'entreprendre. Une prise de conscience collective à laquelle adhère Patrick Diebold avec son éternel sens de la mesure : "Maintenant que le constat est dressé, il faut passer à l'acte. Sinon, c'est sûr, il y aura de la casse…"
Jérôme Bergerot
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La restauration attend son étude
Malgré l'absence momentanée d'une étude quantitative et qualitative, le constat n'est guère brillant s'agissant de la restauration strasbourgeoise.
Dans l'attente d'un travail d'analyse sur le sujet, dont le résultat sera présenté au printemps 2005, il faut donc se fier au ressenti des uns et des autres. La diminution des frais généraux pour la clientèle d'affaires, des touristes qui partagent le même plat, les nouveaux comportements des consommateurs surtout à l'heure du déjeuner, les campagnes de santé publique contre les méfaits de l'alcool expliquent, à première vue, une certaine morosité derrière les fourneaux. Pour autant, Roger Sengel, vice-président des restaurateurs du département et président du CFA, se refuse au pessimisme ambiant.

"La situation n'est pas catastrophique, mais il ne faudrait pas qu'elle perdure. Nous devons retrousser nos manches le plus vite possible et miser davantage sur la formation pour préparer les jeunes à mieux appréhender le monde de l'entreprise. Ce sont eux qui feront le dynamisme de nos établissements dans les prochaines années." Quant au développement des espaces de vente à emporter en centre-ville, jugé trop rapide pour certains, Roger Sengel considère que "ceux qui veulent s'asseoir et manger dans une assiette avec de vrais couverts sur une table nappée viendront toujours au restaurant. Il ne faut pas avoir peur de faire de la vraie cuisine et de le faire savoir".

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L'Hôtellerie Restauration n° 2899 Hebdo 18 novembre 2004 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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