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Succès et difficultés |
Dans les dix années à venir, Londres pourrait bien devenir la capitale de la restauration. Des hommes comme Oliver Peyton qui embauche des chefs français et foisonne de bonnes idées, n'y seront pas pour rien !
m Lydie Anastassion
Créé il y a trois ans, le nom Gruppo est encore peu connu aujourd'hui, à l'inverse des cinq restaurants londoniens d'Oliver Peyton, l'Atlantic Bar and Grill, les deux Mash et Isola et Osteria à Isola et le dernier-né, The Admiralty, dans Somerset House.
A 39 ans, l'air rêveur, l'Irlandais Oliver Peyton, installé en Angleterre depuis 1979, avance rapidement mais sûrement. "C'est un visionnaire", disent de lui ses collaborateurs. En 2000, son groupe, qui fait travailler 550 personnes, a enregistré un chiffre d'affaires de 21 millions de livres sterling. Son truc : d'abord trouver un lieu, faire venir l'idée et enfin embaucher les gens adéquats. "Je suis un restaurateur et un créateur. Je cherche à ouvrir des bars et des restaurants innovants mais construits autour d'une base classique. J'essaie de faire évoluer tous nos restaurants en permanence. Je ne crois pas au principe d'ouvrir un établissement et de ne faire ensuite aucun changement", explique Oliver Peyton.
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Mélanger bar et salle
Oliver Peyton a d'abord dirigé des boîtes de nuit à Londres de 1982 à 1989, avant
d'importer des boissons alcoolisées et d'obtenir l'exclusivité sur l'Absolut vodka et la
bière japonaise Sapporo. L'aventure de la restauration a commencé avec l'ouverture en
1994 de l'Atlantic, un restaurant-bar situé dans une ancienne discothèque sous le Regent
Palace Hotel. "Nous avons voulu proposer une bonne cuisine sans le snobisme qui va
généralement de pair à Londres, laisser les gens entrer sans cravate, explique
Christian Kaid, le manager du lieu, et mélanger le bar avec la salle de
restaurant." Rapidement, c'est le succès, d'autant plus que l'établissement
obtient une autorisation d'ouverture jusqu'à 3 heures du matin, ce qui est plutôt rare
à Londres. Les espaces sont bien définis. Outre le restaurant de 180 places et le bar
principal, un second bar, le Dick's Bar accueille les clients avant et après le repas. 50
couverts peuvent être dressés dans un salon particulier.
Puis en 1995, Oliver Peyton lance le Coast, à Mayfair. Le ticket moyen se situe entre 25
et 30 livres par personne, l'endroit fonctionne. Pas assez cependant à son goût. Il le
transforme ensuite en un 'petit Mash', dont la carte et le décor sont très proches du
premier Mash lancé, lui, en 1997 à Great Portland Street. Entre-temps, le Mash and Air
qui fonctionnait à Manchester est fermé. C'est Londres qui intéresse Oliver Peyton.
Impossible de ne pas penser au design du film Orange Mécanique quand on entre dans
un Mash. Tout est seventies. Les angles des ouvertures du bar sont arrondis, une note que
l'on retrouve également sur le dossier des chaises. Les couleurs sont là : orange et
rouge contrastent avec le blanc des tables. Au menu : pizza à pâte fine pour une
clientèle plutôt jeune. Et dans les deux endroits, on fabrique de la bière dans une
microbrasserie.
"Il y a quatre ans, ce n'était pas envisageable de s'installer à Paris car
la ville n'était pas ouverte à de nouvelles idées", commente Oliver Peyton.
Des chefs français
Pour conserver le rythme, le groupe s'agrandit en novembre 1999, et investit 5 millions de
livres sterling dans un nouveau lieu, Isola, un restaurant de cuisine fine italienne et
doublé par l'Osteria, au sous-sol, moins huppé et qui fonctionne au déjeuner. Le
premier affiche un ticket moyen de 50 à 55 livres sterling, le second de 35 livres
sterling et dans les deux, "on mange les meilleurs produits italiens",
précise Christian Kaid. C'est un Français, Bruno Loubet, 39 ans, qui dirige les
cuisines. Tout comme Morgan Meunier, 28 ans, qui a pris le 1er mars dernier ses fonctions
devant le piano du restaurant à vocation gastronomique, The Admiralty. Les jeunes chefs
anglais feraient-ils défaut ? "En Angleterre, il y a trop de jeunes chefs de
cuisine qui ont reçu des promotions rapidement sans avoir eu l'opportunité d'acquérir
l'expérience nécessaire pour le poste qu'ils occupent. Je crois également que
l'Angleterre n'a pas de passé gastronomique. Ce qui veut dire que nous n'avons pas de
cuisine qui nous est propre. Du même coup, nous sommes sûrement plus réceptifs aux
nouvelles idées", commente Oliver Peyton. Lui, en tout cas, n'est pas à court
d'idées. Il lui manquait un club privé. Ce sera chose faite en janvier 2002 avec le
Lothburu, situé dans la City, un restaurant de 'modern british cuisine' avec, comme
ticket d'entrée, une adhésion annuelle de 750 livres sterling par personne. "Nous
tablons pour la première année sur 700 membres", poursuit Christian Kaid. Et
puis enfin, un autre Atlantic sera inauguré dans la même année à Bloomsberry, dans un
ancien bâtiment de bureaux art déco. "Il y a dix ans, on ne faisait pas à
Londres de business autour de la restauration. Mais les choses ont beaucoup changé. Je
pense que durant les dix prochaines années, Londres va peu à peu devenir la capitale de
la restauration." n
Décoration seventies pour les 2 restaurants Mash.
En chiffres |
Atlantic Bar and Grill 20 Glasshouse Street London W1B 5DJ * Ouverture : 1994 * Nombre de places : 180 + bar + lounge bar + salon * Ticket moyen : £35 par personne * Nombre de couverts par jour : 250 Isola/Osteria d'Isola Mash Mash The Admiralty Somerset House |
Bruno Loubet
Chef de l'Isola depuis 1 an et demi, Bruno Loubet est entré dans le Gruppo en 1999. Il s'est installé en Angleterre il y a 17 ans. Depuis, il est passé au Manoir des Quatre Saisons de Raymond Blanc (2 étoiles au Guide Rouge) à Oxford, et au Four Seasons à Londres où il a décroché le macaron avant de lancer sa propre affaire à Soho, le restaurant Odéon qu'il a quitté ensuite.
Morgan Meunier
Jeudi 1er mars 2001. C'est un grand jour pour le jeune chef français Morgan
Meunier, 28 ans. Il prend les commandes des cuisines du restaurant The Admiralty dans
Somerset House, dans le giron du Gruppo depuis le mois de juillet 2000.
Au menu, cuisine française mâtinée de cuisine italienne. Le chef affiche un début de
carrière prometteur. Il s'est installé en Angleterre il y a quatre ans, après avoir
fait ses classes auprès de Michel Guérard, Jacques Lameloise, Marc Meneau, André
Westermann.
Arrivé au restaurant Chez Max au sud de Londres, à Hampton Hill, il décroche un macaron
en 1999. La même année, le restaurant obtient le London Carlton restaurant Award du
meilleur restaurant français.
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L'HÔTELLERIE n° 2721 Magazine 7 Juin 2001