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Avenue Bugeaud à Paris, un restaurant au nom de Ghislaine Arabian vient d'ouvrir. La décoratrice Laure Welfling a concocté un décor tout d'or vêtu, en hommage à sa cuisine. Visite.
m Cécile Junod
Photos Ludovic Maisant
On ne présente plus Ghislaine Arabian, ce chef
venu du Nord qui a su si bien bousculer les idées reçues. Elle n'a pas hésité à faire
découvrir aux Français qu'il existait une cuisine flamande. Elle a même osé proposer
des frites et de la bière sur une carte gastronomique. Son histoire, on la connaît :
tout d'abord, sa rencontre avec le chef Thierry Cambier dans le restaurant lillois dont
elle devient un peu plus tard, elle-même, le chef. Un an après, la première étoile,
puis en 1989, la seconde. On connaît également son succès parisien durant 6 ans...
Aujourd'hui commence une autre grande aventure. Avec son équipe, Ghislaine Arabian ouvre
son restaurant qui porte son nom.
La carte de l'avenue Bugeaud comporte un certain nombre de plats incontournables,
véritables best-sellers du répertoire du chef flamand : Légumes cuits et crus en
millefeuille, vinaigrette douce d'herbes et fruits secs, Langoustines royales rôties,
compotée de jeune chou, vinaigrette de tomates fumées, Turbot rôti à la bière de
garde dont la sauce est un subtil dosage entre amertume et douceur, ou bien encore Filet
de buf à la Gueuze, purée de pommes de terre à l'oseille, sans oublier bien sûr
ses célèbres frites qu'elle prépare avec des charlottes de Noirmoutier, des Mona Lisa
ou des Nicola.
Ingrédient incontournable de sa cuisine, la bière, qui figure également en bonne place
dans sa carte des desserts, ainsi que le kirsch : Parfait glacé à la chicorée et pain
d'épices, Sabayon à la Blanche de Bruges. Mais au fait, pourquoi cette attirance pour la
bière ? Par provocation ? Certainement pas. La bière, elle l'utilise par tradition, mais
aussi par défi afin d'en apprivoiser l'intéressante amertume. La cuisine de Ghislaine
Arabian est une cuisine de saveurs et de textures. Chaque mets est une subtile rencontre
entre l'amer et le doux, le fondant et le craquant.
Pour accompagner ses plats, le sommelier David Desbonnet propose des vins de haute
qualité à des prix accessibles. C'est un parti pris. Fini les coefficients
multiplicateurs déraisonnables. Ici, le client doit pouvoir se faire plaisir en demandant
une deuxième bouteille de vin qu'il a appréciée.
Un décor à la hauteur de son talent
En hommage à la bière, au houblon et surtout à la belle chevelure de Ghislaine Arabian,
la décoratrice Laure Welfling a placé son travail sous le signe de la blondeur : bois
blond foncé incrusté de cabochons dorés décrivant des losanges pour les sols, bois
blond clair pour le mobilier spécialement dessiné pour ce restaurant. Quant aux murs,
ils sont entièrement habillés d'or fin posé à la feuille et patiné à l'ancienne.
Travaillé comme une teinte chaude et conviviale, tout cet or crée une ambiance
élégante, subtilement raffinée, un rien sophistiquée, mais loin d'un luxe tapageur. Il
n'a rien de commun avec les ors ostentatoires des fioritures clinquantes. Le haut des murs
est orné d'une frise de petits pavés de verre, réalisés à Murano et sculptés de
têtes de femmes. Eclairés par des fibres optiques, ils créent une animation originale.
Par ailleurs, les appliques en forme de feuillage diffusent une lumière dorée et douce,
propice à la dégustation de mets raffinés.
Très confortables, les sièges sont réchauffés par du velours et du lin, eux aussi de
teinte or. De gros coussins, jetés ça et là, parachèvent cette sensation de confort en
cassant la rigueur des banquettes et en apportant une indéniable note intimiste.
Moins cru qu'en blanc, le nappage beige est apaisant. Il participe à la création d'une
atmosphère sereine et calme. Quant à la vaisselle signée Bernardaud, elle est
minimaliste. Son seul décor : les initiales GA en blanc sur blanc, et parfois un simple
filet doré. Parfois encore, quelques incursions dans la couleur, comme ces petits carrés
de céramique chinoise sur lesquels sont servies les mignardises.
L'équipe du GA |
Eric Martins, directeur Dider Block, directeur adjoint Guillaume Doisy, maître d'hôtel Thierry Cambier, chef de cuisine Frédéric Simonin, second chef de cuisine François Benot, chef pâtissier |
Derrière tout ce décor, on retrouve le groupe Ilta, et à sa tête, Théodore Margellos.
Voilà déjà 3 ans que ce passionné de grands crus de Bourgogne, appelé le
'milliardaire grec', a jeté son dévolu sur la gastronomie. Loin de se définir comme un
mécène, il aime accompagner un talent en l'assistant financièrement. De son expérience
acquise en goûtant les plus grandes tables de France, il regrettait que trop souvent
gastronomie rime avec cadre sévère, rigide, un peu tristounet. Aussi a-t-il tout
naturellement intégré à temps plein dans son équipe la décoratrice Laure Welfling,
sur qui il compte pour créer des décors à la hauteur des talents qu'il parraine.
Formée à Saint Martin School de Londres, puis à l'Ecole nationale des beaux-arts de
Paris, Laure Welfling possède un goût mêlé d'audace et de liberté. Elle n'hésite pas
à affirmer son talent dans des mélanges de styles inattendus accompagnés d'alchimie
subtile de couleurs, tissus et matières. Au-delà des conventions et des modes, elle met
en scène les décors les plus variés, avec toujours des trouvailles en avance d'une ou
de deux tendances. Elle décline ses réalisations en dehors des sentiers battus et
conçoit elle-même la plupart des meubles qu'elle utilise. Le restaurant GA n'échappe
pas à cette règle. n
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L'abécédaire de Ghislaine ArabianAu hasard de l'il et du goût Accueil. Attentif sans être
compassé. Il faut "déstresser le client", précise Ghislaine Arabian.
Première attention : deux voituriers pour éviter toute attente. L'histoire ne finit pas. Elle commence... |
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L'HôTELLERIE n° 2725 Magazine 5 Juillet 2001