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Les chefs de cuisine ont leur musée : le musée Escoffier de l'art culinaire créé en 1966, à Villeneuve-Loubet (06) dans la maison natale d'Auguste Escoffier. Un musée que chacun peut aujourd'hui enrichir.
m Bernadette Gutel
Le musée Escoffier.
Après la mort d'Auguste Escoffier, Paul Thalamas et Eugène Herbodeau, tous deux célèbres chefs de cuisine ayant travaillé avec Auguste Escoffier, à Londres au Savoy et au Carlton, ont eu le projet de créer dans sa maison natale à Villeneuve-Loubet un mémorial à sa gloire, et de prolonger ainsi son uvre et son éthique. Leur projet a pu se réaliser grâce à la générosité d'un autre de ses disciples, Joseph Donon, qui, parti en avril 1912 aux Etats-Unis, à l'initiative d'Auguste Escoffier, y fit fortune et accepta de réaliser et de financer le grand dessein de Paul Thalamas et d'Eugène Herbodeau. La Fondation Auguste Escoffier, créée pour la réalisation de ce projet, a donc acheté la maison natale d'Escoffier en 1960 pour la transformer en musée. Le musée Escoffier de l'art culinaire a ouvert ses portes en 1966. Alain Meyrueis, secondé par Julie Durand, en est le conservateur depuis 1999.
Alain Meyrueis, conservateur du musée, et Julie Durand, conservateur adjoint.
La carrière d'Escoffier
Dès le pas de la porte de ce musée, le visiteur partage quelques-uns des souvenirs
d'Auguste Escoffier. Sur le perron, un anneau de fer scellé au mur rappelle que son père
fut maréchal ferrant. C'est là qu'il attachait les chevaux à ferrer. Au
rez-de-chaussée, on découvre l'âtre qu'utilisait la famille Escoffier. Le tournebroche,
qui date de la fin du XVIIIe siècle, a été offert par monsieur Giraudon. On peut
également admirer une belle collection de moules à gâteaux en cuivre et terre cuite,
ainsi qu'une machine à faire de la chapelure, un appareil à dénoyauter, mis au point
par Auguste Escoffier, et une 'niçoise', appareil utilisé jusqu'en 1915 pour fabriquer
la soupe de poisson. Un 'potager' datant de la même époque, a été restauré afin de
montrer aux visiteurs l'ancêtre du 'piano', à l'origine de la Haute cuisine française.
Au 1er étage, la salle Auguste Escoffier rassemble de nombreux documents qui retracent
les principales étapes de sa carrière professionnelle qui dura 60 ans. Au 2e étage, les
visiteurs sont surpris par une collection de mille menus et cartes, comprenant des menus
d'Escoffier au Savoy et au Carlton de Londres, mais également des menus proposés sur les
bateaux transatlantiques, des menus de présidents de la République, et bien d'autres
menus français et étrangers de la même période. Le plus ancien menu est celui du
Rocher du Cancale qui date de 1822. Notez que 7 000 menus sont en archives. Ce musée
comporte également une bibliothèque riche de plus d'un millier de livres anciens et
récents sur la cuisine et la gastronomie, et une salle audiovisuelle qui permet aux
visiteurs de visionner des cassettes vidéo de chefs célèbres qui réalisent leurs
recettes.
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Bientôt, la carrière des autres
cuisiniers
"Voilà près de 40 ans, explique Alain Meyrueis, que nous entretenons ici
la mémoire d'Escoffier. Aujourd'hui, notre objectif est de conserver le passé, faire
découvrir le présent et développer le futur. Pour cela, nous demandons aux chefs, aux
fournisseurs de la restauration et de l'hôtellerie, et aux mécènes de collaborer avec
nous. Ce musée n'est pas seulement le musée Escoffier, il est aussi le musée de
l'ensemble de la profession. Nous voulons en faire un véritable moyen de promotion de
l'art culinaire français si réputé dans le monde entier. Nous souhaitons que les
visiteurs français et étrangers, jeunes ou moins jeunes, y découvrent un véritable
panorama de cet art et de son évolution. Nous voulons qu'il serve à valoriser le beau
métier de cuisinier et donner aux jeunes l'envie et la passion de ce métier."
Pour atteindre ces objectifs, Alain Meyrueis ne manque pas d'idées. Tout d'abord, il
souhaite compléter la collection d'ustensiles de cuisine anciens ou originaux et sa
collection de menus. Si vous disposez d'objets et de menus anciens ou originaux, et si
vous souhaitez que les visiteurs du musée en profitent, n'hésitez pas à le contacter :
il sera ravi de les accueillir. Alain Meyrueis souhaite également créer une galerie de
portraits des chefs français les plus renommés du passé et du présent. Ces portraits
viendraient s'ajouter à ceux d'Auguste Escoffier, de Joseph Donon, d'Eugène Herboreau,
de Paul Thalamas, de Vincent Bourrel déjà exposés. "Nos visiteurs,
explique-t-il, veulent en savoir plus sur les grands chefs qui se sont illustrés
après Auguste Escoffier et sur les plus renommés d'aujourd'hui. Alors, nous sommes à la
recherche de portraits, de photos de brigades, de menus des chefs renommés aujourd'hui
disparus. Quant à nos grands chefs, en activité à ce jour, nous allons les contacter
pour obtenir de leur part ou faire réaliser une photo d'eux, de leur brigade et de l'une
de leur recette favorite. Ce projet est ambitieux, mais si tout le monde y met un peu de
sien, nous pourrons le réaliser assez rapidement."
Le musée Escoffier possède une collection de plus de 3 000 menus qu'il souhaite
compléter grâce à votre collaboration.
En projet, une collection de costumes
de cuisinier
Dans ses archives, le musée Escoffier dispose d'une importante iconographie de costumes
de chefs du Moyen Age jusqu'à nos jours. "Nous voudrions, poursuit Alain
Meyrueis, montrer l'évolution des costumes des chefs de cuisines au cours des siècles
et expliquer aux visiteurs pourquoi les costumes ont ainsi été transformés. Je
recherche 10 mannequins pour présenter ces costumes, et surtout, je recherche quelqu'un
qui pourrait les fabriquer à un prix raisonnable, ou sponsoriser leur fabrication."
Concours de littérature gastronomique
Auguste Escoffier estimait que tout chef de cuisine se devait de transmettre sa passion et
son savoir-faire par l'intermédiaire de l'écriture. Pour rester fidèle à cette
éthique, et le faire savoir, la fondation a décidé en 2001 de créer un événement en
organisant un grand prix international de littérature gastronomique appelé L'Escoffier.
"Les chefs d'aujourd'hui, explique Alain Meyrueis, tout comme Escoffier,
aiment écrire des livres de recettes, des livres sur la gastronomie de leur terroir ou
sur leur expérience dans le monde de la restauration. Mais s'intéressent aussi à la
gastronomie les historiens, journalistes, sociologues, chercheurs, nombreux à écrire sur
le sujet. Nous les invitons à participer à ce concours." Pour participer, les
auteurs ou leur(s) éditeur(s) doivent faire parvenir à l'Association du grand prix
international de littérature Escoffier (située à la Fondation Escoffier et
spécialement créée pour ce concours) 3 exemplaires de l'ouvrage avant le 31 janvier
2002. Le prix sera décerné en mars 2002. Le jury sera composé d'écrivains, de
restaurateurs et d'hôteliers, des membres du bureau la Fondation Auguste Escoffier et de
ceux de l'Association grand prix international de littérature gastronomique L'Escoffier.
Le grand prix international de littérature gastronomique aura lieu chaque année.
Tous les ans, des expositions
thématiques
Pour attirer les visiteurs, le musée organise une à deux fois par an une exposition sur
un thème bien précis. La dernière exposition, organisée par Julie Durand, conservateur
adjoint du musée, avait pour thème Auguste Escoffier, ses recettes, un hommage rendu à
la femme. Cette exposition, conçue avec beaucoup d'attention et de passion, permettait
aux visiteurs de découvrir combien Auguste Escoffier était sensible aux charmes
féminins. Pour les femmes, il a créé quelques-uns de ses plats les plus célèbres : la
Pêche Melba, la Coupe Belle-Hélène, les Fraises Sarah Bernhardt, le consommé Isabelle
de France... Pour chaque femme à laquelle Auguste Escoffier a voulu rendre hommage, le
visiteur pouvait découvrir le portrait de celle-ci, ce qu'Auguste Escoffier avait écrit
sur elle, le menu et la recette qu'il avait imaginé pour elle, et une photo de la
recette. Les recettes et les photos ont été réalisées par l'Association des disciples
d'Escoffier... japonaise. "Nous serions ravis, explique Alain Meyrueis, de
présenter cette exposition dans des lycées hôteliers qui le souhaiteraient."
Julie Durand travaille déjà sur la prochaine exposition qui aura pour thème le
chocolat. Alain Meyrueis est par ailleurs en train de mettre au point, avec divers
fabricants d'arômes et d'huiles essentielles, un jeu-test composé d'une gamme d'arômes.
Les visiteurs seront invités à les sentir et à indiquer leur nom. Les gagnants, 'les
nez', seront récompensés. "Et si ce jeu-test plaît à nos visiteurs, nous
commercialiserons la mallette des arômes. Je compte également faire diffuser dans le
musée de bonnes odeurs de cuisine." Et pour que les visiteurs soient totalement
mis en situation, Alain Meyrueis envisage également de leur faire entendre des bruits de
cuisine.
Chaque jour, la participation des
chefs de cuisine
Ainsi, Alain Meyrueis, ce bénévole qui a terminé sa carrière professionnelle au Grand
Hôtel et au Café de la Paix à Paris, et qui, aujourd'hui, consacre une partie de son
temps au musée, déborde d'optimisme, d'énergie et d'idées. Avec Julie Durand, ils ont
envie de faire vivre leurs projets. Ils souhaitent que ce musée - seul musée consacré
à la gastronomie - soit très fréquenté. Leurs relais de promotion sont bien sûrs les
offices de tourisme et les médias, mais les chefs de cuisine ont aussi leur rôle à
jouer. "Nous serions ravis, commente Alain Meyrueis, que les professionnels
de la région et d'ailleurs nous aident à faire la promotion de ce musée, qui est leur
musée, auprès de leurs clients. Nous souhaiterions tout simplement qu'ils acceptent de
distribuer les affichettes relatives aux expositions, de placer l'affiche du musée bien
en évidence quand cela est possible dans l'espace informations touristiques de leur
hôtel, qu'ils conseillent à leurs clients de venir visiter le musée ou l'exposition."
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Un fourneau Paganetti, bientôt au musée ? |
Parmi tous ses projets, Alain Meyrueis souhaiterait vivement enrichir le
musée d'une pièce extraordinaire et essentielle : un fourneau signé Paganetti,
constructeur à Nice daté de 1860. "J'ai découvert ce fourneau, confie-t-il,
à l'occasion d'une visite que je rendais à Jacques Maximin qui en fait la collection.
Je serais ravi de voir ce fourneau dans le musée Escoffier. Les visiteurs pourraient
mieux se rendre compte de la façon dont on cuisinait du temps d'Escoffier dans les
grandes maisons. M. Maximin est prêt à le céder pour la somme de 80 000 F. Là encore,
le musée aurait besoin de la participation de tous ceux qui veulent préserver et faire
découvrir à chacun notre culinaire traditionnel !"
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Comment enrichir ses collections ?n Faire don au musée n Participer au grand prix
international de gastronomie L'Escoffier en envoyant 3 exemplaires de l'un de vos ouvrages
à l'Association du grand prix international de gastronomie L'Escoffier :
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Musée Escoffier de l'art
culinaire
06270 Villeneuve-Loubet
Tél. : 04 93 20 80 51 - Fax : 04 93 73 93 79
E-mail : contact@fondation-escoffier.org
Web : www.fondation-escoffier.org
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L'Hôtellerie n° 2747 Magazine 6 Décembre 2001