Du Céladon au Petit Céladon, il n'y a qu'un saut : celui de l'innovation en matière de management et de réorganisation du temps de travail.
Lydie Anastassion
Le chef de cuisine Christophe Moisand. Agé de 34 ans, Christophe Moisand dirige
les cuisines du Céladon depuis août 1999, après avoir été le second de Marc Marchand
au Meurice et lauréat du trophée Coq Saint-Honoré en 2000.
Durant le week-end, le restaurant de l'Hôtel
Westminster, Le Céladon, rue Daunou à Paris, change de nom, change de look, change de
carte et... 'perd' son étoile. Créé en janvier 2001, Le Petit Céladon constitue une
solution en matière de réaménagement et de réorganisation du temps de travail dans le
vrai sens du terme. Pour rentabiliser les 4 embauches réalisées suite à la mise en
place des 35 heures - difficiles à gérer à effectif fixe -, la direction a décidé
d'ouvrir les samedis et dimanches. Et pour que l'opération reste rentable au niveau des
coûts, une offre totalement différente de celle de la semaine a été définie.
"Un restaurant doit être toujours ouvert, explique Philippe Dubois,
sous-directeur en charge de la restauration au Céladon. C'est ce qui a fait le succès
des brasseries et nous voulions avoir ce type de clientèle le week-end. Certains chefs
étoilés créent bien des bistrots pour diversifier leur offre. Nous avons tenté une
expérience originale." Exit le menu Retour du marché à 44,21 e, vin et café
compris, ainsi que la carte et le menu dégustation du soir à 57,93 e. Le Petit Céladon
propose un seul et unique menu entrée-plat-dessert au déjeuner et au dîner pour 41,16
e, vin et café compris. De même qu'une carte Sélection de vins du week-end a été
créée avec une offre resserrée de références, notamment pour les apéritifs et le
champagne, la coupe passant de 13 e en moyenne à 8 e.
"Nous devions répondre à un impératif : que les clients du restaurant étoilé
ne se sentent pas floués le week-end", poursuit Philippe Dubois. Pour le chef
Christophe Moisand, l'exercice était intéressant : construire une carte de 4 entrées
plus la suggestion du jour, de 4 plats plus une suggestion du jour pouvant être
réalisée en cuisine et servie en salle par une équipe réduite. "Au bout d'un
certain temps, nous avons introduit des plats avec supplément qui fonctionnent bien. En
fait, au niveau de la cuisine, nous réalisons des plats pointus tout en sortant
également des coqs au vin ou autres plats terroir comme un pot- au-feu, une blanquette ou
une escalope de veau", ajoute le chef. Le prix du menu week-end à 41,16 e permet
de grimper à un ticket moyen de 47,25 e. "Quand les clients lisent 41,16 e
tout compris, ils sont très enclins à prendre un apéritif. En fait, on leur laisse le
choix de consommer davantage", ajoute Philippe Dubois. Le Petit Céladon réalise
110 couverts chaque fin de semaine.
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Différenciation de l'offre
Pour trouver une légitimité et surtout une clientèle, Le Petit Céladon se devait
d'être visible. C'est pourquoi la carte est présentée sur un support cartonné
différent en forme de vase en céladon, une porcelaine chinoise vert pâle. La salle
change aussi de couleur, les nappages passant du blanc au bronze, les bouquets artistiques
étant remplacés par des bambous. Sur les tables, les assiettes ne sont plus en
porcelaine, mais transparentes avec un bord doré, et des gobelets sont mis pour les
verres à eau. Enfin, les serveurs arborent leur tenue week-end : un polo noir porté sans
cravate sous un costume. "En tout, cela nous a coûté 7 622,45 e",
précise Philippe Dubois. Une somme à laquelle il faut ajouter un investissement en temps
passé en communication auprès des concierges des hôtels voisins et des guides. "Lorsque
l'on nous appelle pour une réservation le week-end, nous précisons bien qu'il s'agit du
Petit Céladon et non du Céladon."
Les enfants n'ont pas été oubliés, la clientèle familiale constituant une des cibles
de cette nouvelle politique commerciale. Jusqu'à 11-12 ans, ils peuvent bénéficier du
menu enfant à 18 e. Et surtout gagner des invitations au Petit Céladon pour inviter
leurs parents à déjeuner. "Nous distribuons des crayons de couleur et un grand
album à dessiner. Quand nous avons collecté un certain nombre de dessins, la
périodicité variant selon le taux de fréquentation des juniors, nous sélectionnons le
plus beau. Le gagnant reçoit chez lui une invitation pour 3 personnes", commente
Philippe Dubois.
Promotion interne
Sur les 18 personnes de la brigade de cuisine, 5 dont 1 en pâtisserie, travaillent le
week-end par roulement. Ceux qui parmi les anciens sont réfractaires à travailler le
samedi et le dimanche ne sont pas obligés de le faire, même s'ils sont supposés donner
un coup de main pour dépanner. La RTT a donné lieu à une vague de promotion interne. Un
chef de partie promu sous-chef permet d'effectuer la rotation du week-end. Même chose
pour la salle où un chef de rang est passé responsable de week-end. "Les
serveurs ont dû adapter leur service à la nouvelle offre, se décontracter en quelque
sorte. Par exemple, ils ne sont pas obligés de servir le vin aux clients qui y sont
peut-être habitués au Céladon. En fait, c'est à eux de s'adapter au cas pas cas, de
faire une psychologie du client", explique encore le sous-directeur. Et de
conclure : "En innovant pour éponger la dépense des 35 heures, nous avons
consolidé la qualité du service et nous l'avons fait progresser." nzz22v
Le Céladon
15, rue Daunou
75002 Paris
Tél. : 01 42 61 77 42
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L'Hôtellerie n° 2776 Magazine 4 Juillet 2002 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE