d'avril 2003 |
SAGA |
Les Tournier, loin de s'installer dans la gestion confortable de leur patrimoine, créent sans cesse des hôtels et des restaurants de rêve à Courchevel.
Fleur Tari
|
|
En 1947, les familles qui
choisissaient de s'implanter à Courchevel 1850 étaient de la race des pionniers. Il en
fallait du courage pour partir à la conquête de l'or blanc, alors que la station
n'était qu'un vaste champ de neige, hostile et battu par les vents. A l'époque,
Courchevel, créée à l'initiative du conseil général, avait une vocation de tourisme
social... Les temps changent. Jo Tournier avait l'étoffe d'un bâtisseur et une
inépuisable envie d'entreprendre. Patron du bar L'Equipe, il accueillait les premiers
skieurs, et ses apéritifs dansants sont restés dans toutes les mémoires autant que ses
investissements : l'Hôtel le Lana, l'Hôtel Tournier, les restaurants, bars et
discothèque de la station. Aujourd'hui disparu, il a légué un peu de cette folie et de
cette opiniâtreté à ses enfants.
Eric Tournier faisait le désespoir de son père, qui lui voyait un destin tout tracé par
de brillantes études supérieures. L'école était un cauchemar pour ce garçon bourré
de créativité et pétillant de vie. Pour ses 18 ans, Catherine, la mère d'Eric,
intercède auprès de son mari pour qu'il lui donne la gérance du restaurant de nuit Le
Grenier. C'est un établissement vieillissant et désuet. Mais Eric a trouvé sa voie : il
quadruple le chiffre d'affaires en un an. En quelques années, il va multiplier les
investissements, améliorant et augmentant le patrimoine. Le Choucas devient La Locomotive
après 914 694 e de travaux. L'Anerie, La Cloche, La Grange, Le Lana, tenu par Nicolas,
son frère, sont entièrement créés ou modernisés.
|
© Bertrand Yavus |
Un pari fou
En 2000, l'Hôtel Tournier a besoin d'être rénové. Eric n'a aucune envie de faire 'du
neuf avec du vieux'. Dans sa tête, depuis longtemps, il a un projet bien à lui. Du
passé, il veut faire table rase. Le Tournier sera détruit. A sa place naîtra Le
Saint-Joseph, en mémoire de son père Joseph, dit Jo. Les plans seront refaits 24 fois,
car Eric et sa mère Catherine veulent atteindre une certaine perfection. Le Saint-Joseph
est aussi et surtout l'aboutissement des expériences récoltées au fil des années. Pari
fou, il faut construire vite avant que la saison arrive. En 180 jours, l'hôtel est
construit, 6,1 Me ont été investis pour 11 chambres et 3 appartements. Le Saint-Joseph
est un lieu unique et donne le ton d'un nouveau Courchevel, moins clinquant, plus demeure
de famille. C'est un peu cela le paradoxe Tournier. Créer dans la démesure certes, mais
dans le décalage, sans tenir compte des mouvances de la mode. Le meilleur exemple en est
le très couru Cap Horn. Loin de toute piste, à 2 100 mètres, perdu dans la neige, on se
bouscule dans le décor surréaliste de ce restaurant : pirates grandeur nature, lampes
tempêtes, barque en cale sèche... "Le paradis, cela se mérite, l'emplacement
est volontairement isolé. On vient ici par choix et non au hasard d'une promenade",
explique Eric. Ce fou de mer a recréé l'antre du capitaine. Un détour par l'Ile au
Trésor ou le Capitaine Crochet peut surgir à tout moment. Tout cela n'a rien de kitsch.
Beaucoup de beaux objets, de sensibilité, de raffinement et cela fait venir en masse. La
clientèle apprécie aussi une cuisine de grande qualité et surtout une cave admirable.
"J'ai voué cet endroit à la mer et au vin. La cave ne compte pas moins de 450
appellations des plus prestigieuses, plus de 381 000 e de stock." A
Courchevel, les amateurs de vins fortunés veulent pouvoir boire du Pétrus au déjeuner,
et plus de 350 couverts par jour sont servis en moyenne.
Nicolas, Eric et Catherine Tournier ont choisi dans tous leurs projets le décalage. La
suite n° 9 du Lana au décor 'retour des Indes' est très demandée. Ce positionnement
différent dans la décoration laisse à réfléchir. Le décor 'rustique savoyard', né
il y a 10 ans, fleurit partout, et l'originalité des projets Tournier séduit. Les
nouvelles ouvertures - Le Bal, restaurant-guinguette au décor rue de Paris, ou le
restaurant Thaï, haut de gamme du Saint-Joseph - sont attendues avec enthousiasme.
Cependant, si le décor fait entrer le client, c'est le professionnalisme, l'exigence et
la gentillesse des Tournier qui les retiennent. Force est de constater, 10 ans après la
mort de Jo le Patriarche, le succès éclatant de la relève. nzzz36v zzz22v
HOTELS
Le Lana 78 chambres
Le Saint-Joseph 11 chambres et 3 appartements
RESTAURANTS
è Le Cap Horn
è La Locomotive
è L'Anerie
è La Cloche
è Le Saint-Nicolas
è Le Hussard
è Le Grand Café Thaï
è Le Bal
è Les Nuits de Bacchus
Article précédent - Article suivant
Vos réactions : cliquez sur le Forum de L'Hôtellerie
Rechercher un article : Cliquez ici
L'Hôtellerie Restauration n° 2815 Magazine 3 Avril 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE