de mai 2003 |
STRATÉGIE |
Une vingtaine d'entreprises du Gard, voulant réduire l'impact de leur activité sur l'environnement, se retrouve régulièrement pour partager leur expérience. Parmi elles, la Magnanerie de Bernas, un hôtel toujours à la recherche d'idées.
La Magnanerie de Bernas, au cur de la Vallée de la Cèze à Montclus, un
hôtel-restaurant respectueux de l'environnement.
Rachetée en 1996 pour être transformée en hôtel-restaurant, cette ancienne commanderie semi-fortifiée du XIIIe siècle était en piteux état. La bâtisse avait servi de colonie de vacances pendant 30 ans, avec 52 convecteurs électriques pour la chauffer et aucune isolation. La vue était défigurée par une grande fosse septique et des poteaux électriques. Pour son acquéreur Katrin Keller, 38 ans, transformer l'établissement en hôtel était un vrai défi. "J'ai grandi dans la nature, on m'a toujours appris à respecter l'environnement, à en prendre soin", explique cette diplômée d'une école hôtelière suisse. "Je n'ai eu ni le temps, ni l'argent, pour utiliser de la peinture biodégradable ou poser des panneaux solaires. Protéger l'environnement, ça a un prix. J'ai donc cherché pour ce début des solutions que je pouvais facilement mettre en uvre sans surcoût important." Après des études de consommation et des devis, Katrin Keller a choisi de combiner 3 sources d'énergie : avec un chauffage central au fuel, une production d'eau chaude et des fours à gaz, le reste à l'électricité. Explication : "Le recours à différentes sources d'énergie me donne de la souplesse et me permettra de m'adapter en cas de changements tarifaires significatifs."
Katrin Keller, propriétaire de l'établissement : "J'ai grandi dans la
nature, on m'a toujours appris à respecter l'environnement."
Etude personnalisée de l'installation électrique
Pour un éclairage extérieur (les murs sont en pierres), Katrin Keller a opté pour des
lampes à incandescence (230 e pièce), qui diffusent une douce lumière chaude. "Les
halogènes ne sont pas chers, mais donnent une affreuse lumière blanche et consomment
beaucoup." La propriétaire a posé partout des ampoules longue durée et, dès
que possible, des minuteries automatiques. Avec EDF, le courant est bien passé : elle a
obtenu l'enlèvement des poteaux, l'enterrement de son accès au réseau, et a fait
réaliser une étude personnalisée de son installation. "C'est quelque chose de
gratuit, tout le monde devrait en profiter. Les techniciens regardent tous les appareils,
et on reçoit chaque année une analyse détaillée de la consommation, poste par poste,
avec les économies réalisables en cas de solution plus adaptée." La Magnanerie
consommant 3 000 m3 d'eau par an, dont la moitié pour la piscine et l'arrosage, Katrin
Keller a aussi demandé qu'on lui installe un second compteur, de type agricole, pour
l'utilisation non domestique de l'eau. "Je n'ai pas trouvé le même
professionnalisme de la part de la Saur."
Rendez-vous manqué, promesse de nouveau raccordement à l'occasion du creusement d'une
tranchée non tenue spontanément, absence de réponse. "Ils ont trouvé ma
demande fantaisiste. Or j'ai appris, avec le club Aile*, que les distributeurs sont
obligés de poser ce type de deuxième compteur. Seulement, quand on ne connaît pas la
réglementation, on se fait avoir." Pour finir, Katrin Keller a décidé de se
débrouiller toute seule. Elle a installé des conduites pour récupérer les eaux
pluviales, stockées dans l'ancienne fosse septique, après nettoyage par une entreprise
spécialisée. Cette fosse a été cachée derrière une jolie, mais fausse, cabane en
pierres. Dans un deuxième temps, l'hôtelière a fait faire un forage - 12 200 e, déjà
amortis - pour alimenter la piscine et pour l'arrosage. Cet aménagement lui a permis de
diviser par deux (de 6 000 à 3 000 e) sa facture d'eau.
Traitement des déchets
Installée dans un hameau isolé, la Magnanerie a posé des problèmes au voisinage, le
conteneur public et le rythme de collecte ne suffisant pas à absorber les poubelles de
l'établissement. Un accord a été trouvé : Katrin Keller a acheté un nouveau
conteneur, la mairie s'engageant à le vider. Pour le verre, lassée par d'incessants
allers-retours jusqu'au point de collecte installé à plusieurs kilomètres, elle a aussi
investi dans un conteneur (plus de 600 e), et passé un contrat avec une société de
récupération qui le vide gratuitement. Désormais, ce conteneur est aussi utilisé par
les habitants du hameau ! D'autre part, elle a installé un conteneur à compost dans
lequel elle jette une quinzaine de litres de déchets végétaux par jour. Seul
inconvénient, les mauvaises odeurs : il faut un peu d'espace. Pour les huiles de friture,
Katrin Keller a fait appel à une société basée dans l'Aude qui a mis un fût de 200
litres à sa disposition pour un coût de 180 e par an. "Encore trop de
professionnels stockent l'huile dans de petits bidons qu'ils jettent avec les ordures.
C'est interdit, mais peu contrôlé !" Pour éviter les déchets inutiles,
l'hôtelière refuse les conditionnements individuels pour le beurre, la confiture (elle
est faite maison), ou les savonnettes, remplacées par des distributeurs de savon liquide.
La Javel est bannie au profit de produits moins toxiques pour l'environnement, et les
produits de nettoyage sont contingentés. "Il m'est arrivé d'être volontairement
en rupture de stock pour obliger les femmes de ménage à faire attention." Dans
les chambres, un écriteau informe que les serviettes sont changées à la demande, ce qui
est plutôt bien perçu. Autre truc : le papier alu reste en cuisine, il est interdit
d'emballer les sandwiches avec. "On a comme ça un ensemble de petites choses qui
permettent de limiter les rejets." Sans compter les économies générées par le
forage. Katrin Keller estime que la contribution de son entreprise à la protection de
l'environnement ne coûte rien, et permet même d'économiser 1 500 e par an, ce qui est
peu, elle le reconnaît bien volontiers, au regard du chiffre d'affaires annuel. "On
n'a rien fait d'extraordinaire. Concernant l'isolation, les choses se font petit à petit
parce que c'est cher, mais il est clair que le coût d'une démarche environnementale
s'amortit très vite par les économies d'énergie qu'elle suscite", conclut la
directrice. n
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* Aile, club d'entreprises du Gard
Virginie Sanselieu
Tél. : 04 66 76 34 16
Web : www.ademe.fr
Magnanerie de Bernas
30630 Montclus
Tél. : 04 66 82 37 36
Fax : 04 66 82 37 41
L'hôtel-restaurant la Magnanerie de Bernas fait partie des fondateurs de l'association Aile (Agir, innover pour l'environnement), créée en juin 2001 à l'initiative de la CCI du Gard. Ce 'club' rassemble aussi des ingénieurs de grands groupes industriels comme Perrier, Framatome ou encore Sanofi qui se réunissent périodiquement pour échanger en matière d'économie d'énergie, de gestion des déchets et de l'eau.En chiffres
En chiffres |
Etablissement 3 étoiles Création en 1996 Ouverture 8 mois par an Nombre de chambres 13 Taux d'occupation Environ 65 % en 2002 Capacité 50 places |
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L'Hôtellerie Restauration n° 2819 Magazine 1er Mai 2003 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE