de mai 2004 |
MICHELIN |
Jean-Luc Tartarin La Villa du Havre [Le Havre - 76] |
A 39 ans, ce Normand de souche renoue avec la première étoile. Installé dans l'ancienne villa de l'écrivain Armand Salacrou, au bord de la Manche, il défend son 'atelier des sens'. Et rend hommage aux artistes contemporains.
Jean-Luc Tartarin parle davantage "d'émotion" de la "reconnaissance d'un savoir-faire", qu'il défend et qu'il voudrait transmettre aux nouvelles générations |
Une étoile. Le bonheur simple et resplendissant du premier macaron, de celui qu'on espère sans y croire, Jean-Luc Tartarin connaît. Il l'a vécu, déjà, une fois, "dans une autre vie". C'était au début des années 90, dans un restaurant qu'il crée sur les bords de Seine, à Caudebec-en-Caux. Neuf années s'écoulent, las d'être au four et au moulin, il ferme boutique. L'étoile s'éteint, faute de combattant. 2003, le Guide Rouge le retrouve à la tête de La Villa du Havre, au Havre. Une imposante maison bourgeoise, ancienne demeure de l'écrivain Armand Salacrou, restaurée par le groupe Partouche. "La bâtisse était dans un sale état quand je l'ai vue la première fois", lâche le chef et directeur. Difficile à croire qu'il y a 3 ans, en effet, ces tours et murs qui font face avec tant de fierté au front de mer n'étaient qu'un squat miséreux. A l'intérieur, plusieurs salles. Deux tables ici, trois là-bas, deux autres un peu plus loin. Le décor épuré, dédié aux artistes contemporains, privilégie l'espace. Le couple Tartarin l'a voulu ainsi. Février 2004. Le Guide Rouge, qui surveille, crédite l'établissement d'une étoile. Surpris ? Pas surpris ? Jean-Luc Tartarin parle davantage "d'émotion", de la "reconnaissance d'un savoir-faire" qu'il défend et qu'il voudrait transmettre aux nouvelles générations. "J'aimerais tellement faire partager ma passion aux jeunes", dit-il, songeur. Lui qui rêvait d'être un jour Robuchon ou Bocuse s'inquiète. "La plupart des jeunes travaillent parce qu'il faut travailler. La société fait d'eux des gamins qui ne cherchent pas à comprendre. Ils sont dans une sorte d'oisiveté continuelle." Sourire. "Non, je ne suis pas vieux jeu. Je constate, c'est tout, déconcerté, je l'avoue, par ce que je vois."
L'odeur chaude des mijotés
Jean-Luc Tartarin est né à Caen et a grandi à Rouen. Il garde en mémoire
l'odeur chaude et enveloppante des ragoûts qui s'échappaient des grosses cocottes en
fonte, dans la cuisine de ses grands-parents. Mijotés de buf, d'agneau. Sauces au
beurre, à la crème. Au lycée, Jean-Luc Tartarin s'ennuie. Il veut "du concret".
Il veut devenir cuisinier. Mais il lui sera impossible d'intégrer l'école hôtelière en
cours d'année scolaire. Qu'à cela ne tienne, Jean-Luc Tartarin choisit l'apprentissage.
En 1984, à 19 ans, il décroche son CAP. Il gravite à Rouen, chez Gilles notamment, un 2
macarons Michelin à l'époque. Puis quitte la région pour les Crayères à Reims, où il
restera un an et demi. Vient le temps du service militaire. On lui confie les cuisines du
mess. Ceux qui partent en manuvre emportent dans leur besace des sandwiches au foie
gras et autres gourmandises. Libéré, Jean-Luc Tartarin officie comme second à
Veules-les-Roses, chez Gilbert Plaisance. 1989, une nouvelle étape se profile. "J'ai
voulu, comme beaucoup, devenir mon propre patron. Ça a été dur parce que
l'établissement que j'ai pris était isolé. Il fallait être partout et surtout faire
venir la clientèle. J'ai fini par vendre pour pouvoir, de nouveau, me consacrer
entièrement à la cuisine."
Jean-Luc Tartarin est chef de cuisine du restaurant de l'hôtel et du casino de
Forges-les-Eaux, autre propriété du groupe Partouche, lorsqu'un responsable de la
société l'arrache à ses fourneaux pour lui montrer leur toute récente acquisition
havraise. "Ari Sebag m'a dit qu'ils venaient de l'acheter à la mairie. Qu'ils en
feraient peut-être un hôtel-restaurant ou un restaurant. Il m'a aussi demandé, si
l'idée me tentait, de pondre un projet." Quelques jours suffisent à faire
naître sur le papier un 'atelier des sens'. Entre 'sa' cuisine et 'l'art contemporain'.
Fiançailles prometteuses. Un hommage, aux produits vrais comme aux artistes attirés par
la Normandie, allait être rendu. Un besoin sans cesse renouvelé d'expression et de
curiosité. Demi-gelée chaude de crustacés aux saveurs piquantes, asperges étuvées,
Turbot sauvage cuit sur des os à moelle, jus de carottes caramélisé, fondue d'oignons
doux, Ris de veau de cur français, Pigeonneau fermier de la région cuit entier en
cocottée luttée, jus de mangue et soja, carpaccio de chou-fleur cru assaisonné aux sucs
de mandarines... Au gré du marché, de la criée, de l'inspiration. <
Sylvie Soubes zzz22i
La Villa du Havre
66, bd Albert 1er
76000 Le Havre
Tél. 02 35 54 78 80 - Fax : 02 35 54 78 81
villa.du.havre@free.fr
Couverts
60
Capacité
40 places
Ticket
moyen
75 e
Prix
menus
46, 72 et 125 e
CA
2003
838 500 e HT
Effectif
10 à 15 personnes en moyenne selon la saison
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L'Hôtellerie Restauration n° 2871 Magazine 6 mai 2004 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE