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du 10 juin 2004
ENQUÊTE

La filière vins en restauration

Etat des lieux

L'Office national interprofessionnel des vins (Onivins) vient de réaliser une étude sur la filière vins en restauration. Nous vous proposons d'en découvrir la synthèse, telle qu'elle a été présentée récemment à Paris, à l'occasion d'une journée de colloque organisée sur ce thème.

Sylvie Soubes - Enquête réalisée par l'Onivins avec D.V.A. Consultants

Le secteur du hors domicile se trouve confronté à une baisse de la consommation des produits alcoolisés, les bières ayant perdu 20 % de leurs volumes entre 1990 et 2000, les vins 8,5 % et les alcools 4,5 %. Au total, les boissons alcoolisées ont chuté de 13 % en 10 ans. Les hausses de BRSA (boissons rafraîchissantes sans alcool) de + 45 % et de boissons chaudes de + 22,5 % ont permis de compenser les volumes, mais les marges sont sensiblement plus faibles que celles pratiquées sur le vin ou la bière.

Où se fournissent restaurateurs et cafetiers ?
Les restaurants, bars à vins et brasseries indépendantes s'adressent pour leurs achats essentiellement aux producteurs, les entrepositaires-grossistes n'étant utilisés que pour les vins basiques, mais surtout pour la fourniture des eaux minérales et des soft drinks. Le reproche qui leur est fait est de ne pas proposer des vins adaptés à la demande de la restauration et, quand ils en ont, de ne pas se donner les moyens d'assurer un suivi de ces vins dans la durée. Les restaurateurs cherchent, en travaillant avec les producteurs, l'originalité des vins, la convivialité et la qualité du suivi et des relations qu'ils entretiennent. Ils ne souhaitent pas proposer des vins que l'on peut trouver en grande distribution ni dans les grandes brasseries. Ils estiment que leur rôle est de proposer ces découvertes à leurs clients.
Les cafés et les bars, en revanche, ne travaillent que très épisodiquement avec les producteurs. Leur approvisionnement venant presque exclusivement des entrepositaires-grossistes, qui les aident à constituer leur stock, à éditer leur carte et leur assurent des livraisons de façon hebdomadaire. Mais il s'agit de vins basiques, à volume, destinés à être servis en pichets. La force des grossistes réside dans la logistique, dans leur capacité à approvisionner ces établissements en bière, café et soft drinks. Ce qui n'empêche pas les dépannages auprès des cash & carry, chez qui les patrons de bars et de cafés trouvent une plus grande fréquence de promotion.

Les chiffres de la distribution

France Boissons
a 82 entreprises
a 121 entrepôts
a 40 000 clients
a 890 Me de CA

Elidis
a 70 entreprises
a 35 000 clients
a 500 Me de CA

La Centrale Européenne de Boissons (CEB)
a 120 entreprises
a 130 entrepôts

Les grossistes indépendants
a 700 entrepôts

Quelle est la politique d'achat des distributeurs ?
AssietteVin.jpg (17335 octets)La politique des distributeurs (entrepositaires-grossistes) est marquée aujourd'hui par la volonté de maîtriser la structuration de l'offre dans leurs entrepôts régionaux. Cette stratégie se manifeste en premier lieu par une volonté de centralisation des achats et de rationalisation de l'offre.
Les assortiments sont constitués par un tronc commun d'assortiment national, composé des références indispensables à toute gamme et qui doit être détenu par tous les entrepôts. Cet assortiment est, pour une grande part, constitué par des marques propres, soit une marque transversale comme c'est le cas chez Elidis, soit des marques spécifiques pour les vins de table, pour les vins de pays et pour chaque vignoble de vins d'appellation à l'instar de France Boissons. Cette politique se heurte à la réticence des entrepôts, qui mettent en avant - à juste titre - la difficulté de placer les mêmes vins dans tous les bars et restaurants d'une petite ville.
Ensuite, l'assortiment se compose d'un tronc d'assortiment régional, composé de vins achetés à des fournisseurs régionaux référencés par la centrale et auprès desquels les entrepôts peuvent s'approvisionner en vins de leur région d'implantation. Enfin, les entrepôts gardent la possibilité de s'approvisionner localement auprès des fournisseurs locaux de leur choix. Les cash & carry ont également une volonté de centralisation de l'offre, une certaine latitude étant laissée pour les achats régionaux. Ceci se traduit par l'existence de deux gammes : une gamme nationale, présente dans tous les magasins, et une gamme régionale, spécifique aux magasins d'une région. Les achats sont effectués à la fois auprès des gros opérateurs nationaux pour les vins de volume (vins de table, de pays et AOC génériques) et auprès des producteurs (caves particulières ou coopératives) pour les vins plus haut de gamme. Il semble que de plus en plus de grands noms de la viticulture acceptent d'être référencés dans les cash & carry pour être distribués dans les restaurants, augmentant par là la légitimité de ces magasins dans le secteur de la restauration. Les cash & carry sont tous réticents à travailler avec des marques présentes en grande distribution, préférant négocier avec leurs fournisseurs des vins de marque dédiés à la restauration. Ils sont toutefois ouverts à proposer des vins de négociants travaillant avec la grande distribution, mais sous des étiquettes ou des habillages spécifiques.

Que pensent les fournisseurs de la façon dont les restaurateurs vendent le vin ?
L'ensemble des fournisseurs (entrepositaires, cash & carry et négoce) s'accorde pour émettre des critiques vis-à-vis de la restauration indépendante. Le manque de compétence des restaurateurs est principalement mis en avant, une part importante d'entre eux n'ayant pas les qualifications nécessaires à l'exercice du métier. S'ils ont des compétences culinaires, la gestion n'est pas leur fort. D'où les problèmes rencontrés lorsqu'il s'agit, par exemple, de les aider en matière de prix de revente. Les coefficients prohibitifs appliqués au vin notamment constituent un des éléments complémentaires à la chute de la demande. Leur gestion est le plus souvent totalement assurée par des comptables qui les poussent à appliquer les marges les plus élevées afin d'éviter tout problème 'fiscal'. Parallèlement, leur manque de formation à la connaissance des vins, leur réticence à se former et donc à former leurs équipes, leur manque de volonté dans la motivation de ces équipes au service du vin expliquent aussi que le vin est souvent proposé dans de mauvaises conditions (de température, notamment). La restauration de chaîne est davantage appréciée. La politique des chaînes en matière de vins est construite autour des repas servis : adéquation entre les formules proposées et les vins figurant à la carte, tant en termes de qualité que de prix.

Combien de restaurants dans l'Hexagone ?
Rares sont les enquêtes à donner des chiffres précis sur le nombre et le type d'établissements en France. Celle-ci avance un total de 108 500 établissements (pour un chiffre d'affaires de 30,8 milliards d'euros), auxquels il convient d'ajouter 43 500 cafés/bars.

* Restaurants à thème 14 850
* Brasseries 2 800
* Grills 1 250
* Pizzerias 8 100
* Fast-food 1 500
* Fast-food hamburger 1 350
* Cafétérias, self 1 250
* Restaurants de site 2 800
* Restaurants de transport 1 000
* Restaurants indépendants 49 500
* Restaurants d'hôtel 24 000
* Total 108 500
Source : Onivins

Quelles sont les aides au service du vin ?
Vin.jpg (12727 octets)Trois axes principaux sont suivis par les fournisseurs pour aider les restaurateurs ou les patrons de bars dans le service du vin : l'aide à la connaissance des vins, l'aide à la confection des cartes et l'aide au service client. La première est fournie par les producteurs ou négociants. Il s'agit surtout de faire connaître les vins par des dégustations des références proposées et par quelques commentaires basiques sur les vins, à partir d'informations sur les arômes, les cépages ou les terroirs. L'aide à la confection des cartes est aujourd'hui primordiale pour tous les fournisseurs, dans la mesure où ces cartes assurent la pérennité des références dans l'établissement pour une durée d'au moins 6 mois. De plus, tous reconnaissent que la gestion des cartes permet de rentrer des références additionnelles beaucoup plus facilement. L'aide au service client est plus difficile à apporter, compte tenu du manque de compétence et de motivation d'une partie des restaurateurs ou des patrons de bars à l'égard du vin.
Un problème prioritaire ne peut même pas être évoqué : celui de la fixation des prix de vente, donc des coefficients. L'ensemble des fournisseurs se heurte à un refus d'écoute, malgré les arguments avancés par les commerciaux qu'un moindre coefficient permettrait d'augmenter les ventes dans des proportions permettant de dégager un meilleur chiffre d'affaires ; malgré également les exemples fournis de confrères pratiquant avec succès des coefficients raisonnables. Le service se résume à des vins basiques, en pichet, sur lesquels les coefficients peuvent être énormes en évitant toute la perte de temps que pourrait occasionner la vente de vins en bouteille et les réponses - difficiles à fournir - à d'éventuelles questions sur l'origine et les particularités de ces vins. Pour une bonne partie des restaurateurs, le vin n'est pas considéré comme un produit à part entière, mais comme un accompagnement du repas. Le vin est, pour eux, un produit compliqué à connaître et donc à proposer. Il n'est souvent considéré que comme un vecteur de fortes marges.

Quel est l'intérêt du vin au verre ?
La demande continue à évoluer fortement à la baisse. Devant la politique de répression de la consommation abusive d'alcool au volant, les quantités consommées au restaurant diminuent de façon régulière et importante. Le pichet de 25 cl peut désormais faire peur. L'une des solutions les plus conseillées est le service du vin au verre. Il offre la possibilité de proposer un vin à l'apéritif et un autre avec le repas. Il permet de ne pas obliger plusieurs convives à prendre le même vin et enfin de proposer deux vins différents au cours du repas, si l'on souhaite rester dans la limite des deux verres.

Que faire pour redynamiser les ventes ?
C'est sans doute une remise en cause des façons de travailler de la plupart des intervenants de la filière qu'il faut prôner : restaurateurs, dans leur façon de proposer le vin, de le servir et d'en parler ; grossistes, dans la gestion de leurs gammes et dans leur plus grande implication dans leur rôle de relais des actions venant de l'amont ; mais surtout instances professionnelles du vin, dans les moyens qu'elles seront collectivement capables de dégager pour redévelopper la demande de vin dans les restaurants.
Mais la filière ne pourra pas faire l'impasse de la réflexion sur les moyens de faire venir les jeunes à la consommation de vin. On voit bien qu'ils sont plus naturellement attirés aujourd'hui vers les soft drinks. Les études menées par l'Onivins montrent néanmoins qu'ils sont aussi de gros consommateurs d'alcool, notamment lors de soirées en discothèque ou à domicile. Ne peut-on pas imaginer des vins de soif titrant peu d'alcool ou des vins aromatisés, correspondant à une attente de produits de mélange ?
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Politique d'achat : comment les grands groupes procèdent-ils ? 4 L'exemple d'Accor...

< François Tissandier, directeur des achats, groupe Accor

Les gammes sont différenciées par enseigne. Très peu de vins ressortent en commun dans plusieurs enseignes, et il s'agit surtout de vins destinés à des séminaires. Aujourd'hui, auprès de l'ensemble des chaînes, ce sont des gammes adaptées à chaque enseigne qui remportent tous les suffrages.
Lors des commandes à la plate-forme, chaque enseigne se connecte à des bons de commande sur lesquels ne figurent que les vins qui lui sont destinés. Il n'y a pas d'exclusivité demandée aux fournisseurs. Pour ce qui est des marques, on évite d'avoir des vins vendus en grande distribution. Sauf, bien entendu, pour les Grand crus de Bordeaux vendus en foires aux vins. Et même ceux-là, si on peut les éviter, on le fait. Cela tient d'une part à un historique de la politique d'achats du groupe, mais aussi pour éviter les comparaisons de prix que ne manqueraient pas de faire les clients.
a Chez Ibis, par exemple, on se situe dans une logique de coefficient, en tenant compte toutefois
du seuil de tolérance du prix de vente. On se situe dans l'esprit d'un client et on se demande si, à ce prix, on l'achèterait.

Sinon, on se déconnecte de la volonté affichée par l'enseigne de se positionner comme une chaîne hôtelière économique.
a Chez Mercure, en revanche, il s'agit d'une marge au forfait, en valeur absolue sur le prix de la bouteille, quel que soit son prix de revente.
L'enseigne s'efforce de respecter la demande des châteaux ou des négociants au cas où le prix de revente proposé leur paraît trop faible. La limite
inférieure demandée par le propriétaire est respectée.

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L'Hôtellerie Restauration n° 2876 Magazine 10 juin 2004 Copyright © - REPRODUCTION INTERDITE

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