Quatorze couverts seulement devant une petite cuisine-bar en marbre du
Brésil, du noir, des briques, des tables nappées, des verres soufflés à la
bouche, une banquette moutarde qui court tout le long du mur : le restaurant
Vagabond a des allures de grotte chic, nichée au bout du Vieux-Lille, mais
ouverte sur la rue avec sa grande baie vitrée.
Dans son repère savamment organisé, le chef Nicolas Pourcheresse
officie seul, en cuisine et au service tous les soirs, se laissant observer,
tout en ayant un oeil attentif sur les clients en face de lui. Un jeu de regards
qui s'accompagne des échanges verbaux qui naissent plus facilement dans ses
conditions, aux dires du chef. "Il n'y a rien d'écrit, j'explique tout à l'oral,
d'autant plus que le menu est unique -
70 € par personne. J'ai envie de
bien faire comprendre notre métier. Cela favorise les interactions avec moi,
mais aussi entre les clients", explique-t-il. Une façon de faire
radicalement différente de celle qu'il pratique dans les cuisines de La Table
(1 étoile Michelin) à l'Hôtel
Clarance juste à côté, où il est présent pour le déjeuner.
Au plus près des saisons et du jardin
Chez Vagabond, c'est la spontanéité qui prime, dans la cuisine et les
menus tout particulièrement. "Je construits mes menus au jour le jour, en
fonction de la récolte du jardin". Car le chef est aussi devenu jardinier, un
autre rêve depuis son passage à l'Auberge à Coulans, il y a plus de dix ans.
Avec 3 000 m2 de terres dans la banlieue lilloise, il teste ses
premières récoltes de légumes qu'il met ensuite au menu. Ce jour-là, le
chou-fleur s'encanaille d'une sauce béarnaise et d'encre de sèche, le céleri boule
se dissimule dans une crème vanille-amande, les pommes de terre se fondent en
velouté. Et d'autres légumes sont miqen boîte, séchés, fermentés ou même distillés.
"Je n'ai pas de congélateur et il faut bien les conserver !"
Un bocal de chou-rouge aux pommes et oignons rouges, gingembre, vinaigre,
cassis séché et poivre trône sur les tables pour accompagner l'apéritif.
Nicolas Pourcheresse revendique son attachement à la saisonnalité, anticipant
la période creuse en légumes pour cuisiner plus iodé et carné, avec plus de
fruits et d'agrumes. En 2017, il prendra aussi le temps de mettre au point une
carte de vins bio et nature, mais aussi développer un nouveau projet pour l'instant
encore secret.
Publié par Emmanuelle COUTURIER